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Avec Tridoo, les déchets industriels s’offrent une seconde vie en franchise

Développement durable. Lauréat 2022 du Réseau Entreprendre Franche-Comté, l’entreprise familiale Tridoo ne cesse d’innover dans le domaine de la collecte et de la valorisation des déchets industriels. Son concept unique en France vient même d’être franchisé.

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Photo de Laurent Cuinet
Laurent Cuinet (Crédit : JDP)

Laurent Cuinet, 44 ans et père de trois enfants, et son frère cadet, Francis, 40 ans et père de quatre enfants, sont tous les deux diplômés d’un DUT Génie Civil.

Leur aventure entrepreneuriale commune débute en 2010, lorsqu’ils achètent l’entreprise familiale spécialisée dans les aménagements extérieurs.

« Depuis mes dix ans, je vis au rythme de l’entrepreneuriat. Pendant les vacances scolaires, j’étais sur les chantiers avec mon père. À la maison, l’entreprise prenait toute la place : je n’ai jamais connu autre chose », confie Laurent Cuinet.

En 2016, il décide, avec son frère de se diversifier en créant une nouvelle activité valorisant le développement durable afin de rendre le monde plus propre pour leurs enfants.

« Nous avons choisi le métier de la collecte et du traitement des déchets professionnels, une activité complémentaire à celle de l’aménagement extérieur. Et c’est d’abord de nos clients et fournisseurs que nous nous sommes rapprochés. Nous avons échangé avec eux sur l’existant en matière de modalité de collecte et de recyclage. De cette phase d’écoute est née une solution brevetée unique en France », affirme Laurent Cuinet.

« Avec les bennes classiques de ramassage des déchets, ouvertes sur le haut, des éléments légers comme le polystyrène s’envolent pendant le transport, l’eau de pluie peut pénétrer dans la benne et fausser la pesée à l’entrée des centrales de traitement des déchets et générer des surcoûts... Nous avons donc imaginé une benne étanche dotée d’un toit ».

Photo de l'entreprise familiale Tridoo
L’entreprise familiale Tridoo (Crédit : JDP)

Mais leur innovation ne s’arrête pas là, puisque le duo conçoit également un système de compartiments à l’intérieur de ses bennes pour faciliter le tri en amont des déchets. D’un volume de 30 mètres cubes, elles peuvent compter de trois à quatre compartiments en fonction du volume de déchets à traiter.

« Notre concept permet une gestion sur-mesure des déchets de tous les types d’entreprises et de réaliser jusqu’à 50 % d’économie par rapport à une solution de traitements classiques », appuie l’entrepreneur.

En 2016, la société Cuiney Solutions Déchets est créée. Le succès est au rendez-vous. « Notre chiffre d’affaires est passé de 100.000 euros la première année à 1,66 millions d’euros en 2022, soit une augmentation de 158 % par an depuis sept ans. Notre objectif est d’atteindre 2,2 millions d’euros en 2023 et 2,8 millions d’euros en 2024 », lance Laurent Cuinet.

Pour ce faire, la fratrie n’est jamais à court d’idées. En 2022, elle change le nom de l’entreprise pour Tridoo.

« Nous voulions une dénomination facile à retenir en deux syllabes. Tridoo évoque à la fois nos origines : « le tri dans le Doubs » et la notion d’implication avec la formule anglaise « To do ». A cela s’ajoute un logo abeille : animal emblématique du travail sans relâche, en tout discrétion et de la préservation de l’environnement ».

De la collecte au centre de tri

Une mue de patronyme qui s’accompagne d’un déménagement de quelques kilomètres (de Tarcenay à L’Hôpital-du-Grosbois) et de la création d’un imposant centre de tri. Sans volume imposé et avec une plage horaire étendue (de sept à 19 heures), le site est à même de répondre aux besoins de tous les professionnels.

« Jusqu’alors, notre métier consistait à transporter nos bennes de déchets depuis le site de nos clients, entreprises du BTP, industriels, commerces… jusqu’à une déchetterie souvent tenue par nos concurrents. Aujourd’hui avec cet investissement de quatre millions d’euros, nous offrons à nos plus de 250 clients locaux une solution complète.

Ils trient avec nos contenants pratiques et adaptés à leurs contraintes, nous nous collectons sous 48 heures, puis valorisons plus de 30 déchets différents (du carton à l’amiante en passant par le bois, la bombe aérosol, les plastiques et divers produits liquides...).

Enfin, nous leur remettons un certificat d’action environnementale, qui leur permet notamment de communiquer sur leur participation au développement durable. Notre objectif est de faire rimer écologie avec économie, c’est pourquoi nous cherchons constamment à augmenter notre capacité de valorisation matière de nos déchets.

Aujourd’hui, nous affichons 85 % de valorisation matière, 15 % de valorisation énergétique et zéro enfouissement. Cela passe par une recherche toujours plus fine de nouveaux partenaires : notre placoplâtre est ainsi recyclé par les usines Placo Recycling à Chambery, notre laine de verre par Isovert à Orange, notre PVC par une menuiserie à Troyes... et même pour les demandes les plus improbables nous trouvons des solutions, comme le cas de ce client qui avaient un problème, inédit pour nous, de déchets de bananes.

Cette exigence s’accompagne d’une nécessité de tri manuel et de l’embauche de main-d’œuvre. Nous sommes ainsi passés de quatre personnes au début de notre aventure à 18 salariés aujourd’hui », raconte Laurent Cuinet.

Et là aussi les deux frères innovent avec un tapis de tri est en circuit fermé, comme celui des bagages dans les aéroports.

« Les déchets passent et repassent plusieurs fois devant les salariés tant que le tri n’est pas optimum. Cette méthode est par ailleurs moins stressante pour les salariés et permet l’emploi de personnes handicapées ».

Un concept qui se franchise

En 2022, Laurent et Francis accélèrent encore leur développement et créent un réseau organisé de partenaires franchisés partageant leurs valeurs et souhaitant exploiter le concept.

« Pour ce nouveau pas, nous avons voulu améliorer la conception de nos bennes et notamment relocaliser la fabrication de celles-ci. Nous avons eu la chance de concrétiser un partenariat avec le groupe GMI, basé à Autechaux, dans le Doubs et spécialisé dans la gestion de projets basée sur les technologies de la plasturgie et de la métallurgie. Ils ont ainsi doté nos bennes, agrandies pour l’occasion de cinq mètres cubes, de volets en plastique rotomoulé 100 % recyclé. Actuellement trois bennes sortent par semaine de leur usine. Nous avons signé notre premier franchisé le 1er octobre à Belfort, puis un second à Dijon et depuis notre passage au dernier salon de la Franchise nous enchaînons les coups de fil », se félicite Laurent Cuinet.

Photo de l'entreprise familiale Tridoo
L’entreprise familiale Tridoo (Crédit : JDP)

Le franchisé achète un secteur géographique dimensionné à 300 bennes louées à prix compétitif (à 200 bennes le centre de tri est rentable) et une exclusivité territoriale pour utiliser la marque Tridoo.

« En France, il y a un potentiel 90 millions de tonnes de déchets industriels traitables. Si on ne capte ne serait-ce que 2,3 % de ce marché, cela représenterait 260 implantations en franchises possibles pour Tridoo sur l’ensemble du territoire national », conclut Laurent Cuinet.