Une des tartes à la crême que les commentateurs aiment à ressortir dès lors que le fait religieux pointe un peu trop le bout de sa soutane, de sa sourate ou de sa kippa - pour ne s’en tenir qu’aux monothéismes - est une formule en forme de prédiction qu’aurait prononcée André Malraux, ministre de la Culture de Charles de Gaulle : « Le XXIe siècle sera religieux (ou spirituel, les versions divergent) ou ne sera pas ». Passons sur le fait que cet aphorisme a quand même un peu plus de tenue que les punchlines délivrées sur X, chez Hanouna ou que les saillies du président Macron (« C’est Bibi qui paye ») - à l’époque du Général, ma bonne dame, on avait le sens de l’histoire et de l’agencement des mots. Mais, donc, passons.
Arrêtons-nous en revanche, sur le sens du pronostic. Que nous disait Malraux, avec quelques décennies d’avance ? Que l’humanité a besoin de croire en quelque chose qui la dépasse, l’exalte et lui fait lever le nez vers les cieux, lui offrant du réconfort même en plein milieu de sa déclaration d’impôts. Dieu merci (si l’on peut dire), cette même humanité est quand même traversée de suffisamment de pulsions mortifères pour s’éviter le torticolis et a donc choisi de transmuter ses aspirations au sublime en dogmatisme furieux et en bigoterie.
Voyez ces anti-IVG qui pleurent des larmes de sang pour protéger la Vie et souhaitent la mort des femmes avortées et des soignants qui les accompagnent ; voyez ces menaces de mort reçues ces jours-ci par la dessinatrice de presse Coco - une des rescapée de Charlie - après un dessin paru dans Libération, montrant un Palestinien émacié courant après un rat sous le soleil alors que le Ramadan vient de débuter ; voyez ces colons Juifs bloquant l’aide humanitaire dont les Gazaouis ont un besoin vital puisque « tous les Palestiniens sont des terroristes ».
Ces acharnés de toutes confessions professant une attirance particulièrement aiguë pour les activités de la Grande Faucheuse, assorties si possible de tortures, désespoir et autres joyeusetés, on leur suggère de se rassembler en un lieu où ils pourront s’entre-exterminer en toute impunité en laissant le reste de l’humanité tranquille. Sur ce, je vous laisse, j’ai rendez-vous avec mon expert-comptable : c’est dans pas si longtemps, la déclaration...