Humeur

Un peu de décence...

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Emmanuelle de Jesus.

Mardi 16 avril, jour de fête chez les Tavarès. Le Pdg de Stellantis voit les actionnaires du groupe approuver à 70% sa rémunération : 36 millions d’euros par an, soit 56% d’augmentation. Alors certes, Carlos Tavarès, arrivé à la tête de Stellantis en 2021, a permis au groupe d’afficher en 2023 des résultats étincelants : un chiffre d’affaires de 189,5 milliards, un bénéfice net de 18,6 milliards soit + 11% par rapport à 2022.

N’empêche que, comparé aux 6,7 millions d’euros annuels de moyenne des patrons du CAC 40, Carlos Tavarès s’en sort plutôt très bien. Même Bernard Arnault (groupe l’Oréal) par exemple n’a touché en 2023, selon les termes de l’assemblée générale du 26 janvier de la même année que 1.138.307 euros de rémunération brute et 2.200.000 euros de rémunération brute variable versée en 2023 au titre de l’année 2022 soit 3,3 millions. Une paille. Siglée LVMH certes, mais une paille néanmoins...

L’annonce de la rémunération de Carlos Tavarès qualifiée de « choquante » par le Premier ministre Gabriel Attal a permis à Florent Menegaux, Pdg du groupe Michelin, de se payer un joli buzz lorsqu’il a déclaré dans les colonnes de notre confrère Le Parisien que le Smic n’était pas « un salaire décent », avant d’assurer que les salariés de la célèbre marque de pneus toucheraient, en moyenne, un revenu brut environ 20% supérieur au Smic (fixé à 1.398 euros net mensuel au 1er janvier 2024, soit 16.784 euros net annuel).

Un salaire décent, qu’est-ce que c’est ? Contrairement au Smic (21.203 euros brut annuels en France) instauré par la législation, le « salaire décent », laissé à la liberté des entreprises, est défini par l’Organisation internationale du travail comme « le niveau de salaire nécessaire pour assurer un niveau de vie décent (alimentation, transport, éducation, frais de santé) aux travailleurs et à leurs familles, compte tenu de la situation du pays ».

Ce revenu doit aussi permettre de constituer une épargne de précaution. En requalifiant les salaires de ses employés, Florent Menegaux accrédite l’idée que le Smic ne suffit pas à assurer un niveau de vie décent. Avec son million d’euros de rémunération annuel, il sait de quoi il parle. Alors certes, on parlera du niveau de qualification, du stress, des responsabilités de ses supers dirigeants versus la paie qui tombe tous les mois et les aides sociales auxquels les smicards ont droit. Mais à ce niveau d’écart entre les salaires des uns et des autres, la moindre des décences serait, a minima, de ne pas claironner sa générosité dans les médias..