Un marché auto à la baisse
Marché. Un mauvais mois de juin a conclu un premier semestre catastrophique, avec des immatriculations en baisse de plus de 16% pour les voitures particulières.
Le chiffre 13 porte-t-il bonheur ou malheur ? Les points de vue et les superstitions varient sur le sujet. Pour ce qui concerne le marché automobile national, on aurait plutôt tendance à considérer qu’il constitue un mauvais augure car cela fait treize mois de suite que les immatriculations plongent avec constance. Une situation inédite depuis que les statistiques existent sous leur forme actuelle. Le mois de juin est habituellement un mois faste pour les ventes automobiles. C’est même souvent le meilleur de l’année. Une tradition non respectée en 2022 avec un recul de 14,2% pour les seules voitures particulières (-15,7% si on y ajoute les utilitaires légers). Pire qu’en 2020 et 2021, deux années noires marquées par la crise sanitaire et plusieurs périodes de confinements.
Le bilan semestriel est à l’unisson. Seulement 771 979 voitures ont été vendues. Une chute de 16,3% et un retour en arrière qui impose de remonter plus de 40 ans en arrière pour retrouver des statistiques aussi peu élevées. Par rapport à 2019, dernier exercice « normal », la perte dépasse 394 000 unités. Ce n’est pas du coté des utilitaires légers qu’on trouve des motifs de consolation. C’est même le contraire. Fin juin, seulement 183 262 petits utilitaires ont été mis sur la route : un repli de 24,4%.
On connait la raison majeure de cette situation catastrophique : la pénurie de composants électroniques qui perturbe depuis de longs mois les chaines de montage de la majorité des constructeurs et génère des délais de livraison invraisemblables, jusqu’à plus d’un an pour certains modèles. Les distributeurs des principales marques du marché affirment que leurs carnets de commandes sont plein mais ils sont contraints de faire patienter leurs clients et de rester prudents vis à vis des acheteurs potentiels. Il y aurait plus de 800 000 commandes en attente. Le Groupe Volkswagen France en compte 100 000 à lui seul. Cette crise ne semble pas en voie de solution à court ou à moyen terme, l’échéance de 2024 étant désormais avancée pour espérer un retour à la normale.
Le marché de l’occasion en souffrance
La situation est dramatique pour une partie de la filière automobile où des réductions d’effectifs sont annoncées et paradoxalement faste pour les constructeurs automobiles. Ces derniers ont opportunément changé de modèle économique, délaissant la course au volume au profit de la rentabilité. Ménage opéré dans les gammes pour délaisser les modèles les moins rémunérateurs, substantielles augmentations tarifaires : les communiqués triomphants des principales marques du marché expriment la réussite de cette mutation expresse. Reste à savoir s’il s’agit d’un effet d’aubaine lié à la conjoncture ou d’une évolution en profondeur, appelée à se pérenniser. Au bout de la chaine, le client n’est plus le roi.
Par ricochet, le marché de l’occasion est lui aussi en souffrance. Faute de voitures neuves à vendre, les acheteurs se sont tournés vers les occasions dans un premier temps mais la source d’approvisionnement s’est tarie. Près de 18% en moins en juin avec seulement 453.583 transactions et un recul de 12,4% au bilan du premier semestre. Si les immatriculations n’ont pas plongé davantage, c’est grâce aux clients particuliers avec un recul limité en juin (-3,2%) mais elles pèsent seulement 45% du marché total. De même, les ventes aux sociétés (-4,5%), et les locations longue durée (-3,1%) ont permis de freiner la chute alors que les locations courte durée ont presque été divisées par deux. Ceux qui loueront une voiture lors de leurs vacances en mesureront concrètement les effets avec des tarifs devenus fous.
Les observateurs spécialisés n’attendent pas de redressement du marché français au deuxième semestre : mêmes causes, mêmes effets. La pénurie de semi-conducteurs sera toujours d’actualité et les délais de livraison risquent de s’allonger encore. Les incertitudes politiques, en France comme au niveau international, et les nuages économiques qui s’annoncent ne sont pas de nature à inciter les clients à acheter une nouvelle voiture. Surtout pour en disposer à une date lointaine. Les nouveautés arrivant dans les show-room n’ont jamais été aussi attractives mais là n’est plus l’essentiel...