Un millésime 2023 réjouissant
Viticulture. Le bureau interprofessionnel des Vins de Bourgogne a présenté un premier bilan de la récolte 2023, un millésime généreux en quantité et très prometteur en qualité. Après une année 2022 exceptionnelle, cela va permettre de reconstituer les stocks et d’approvisionner un marché toujours friand de nos vins.
Cité des Climats et vins de Bourgogne, site de Beaune, 10 octobre. C’est avec « des mines réjouies et on ne peut s’en cacher » que François Labet et Laurent Delaunay, respectivement président et président-délégué du Bureau interprofessionnel des vins de Bourgogne (BIVB) débutent la conférence d’après vendanges de ce millésime 2023.
Et pourtant, « jusqu’au 15 août le pessimisme était de rigueur », rappelle François Labet. Après un hiver doux, un printemps surprenant car très hétérogène et la constatation d’un fort déficit hydrique, le début de l’été est instable : orages, pics de chaleur, hygrométrie importante, maladies à surveiller et même un épisode de grêle... les vignerons ont dû en permanence s’adapter.
Et puis « le miracle bourguignon a eu lieu », se réjouit encore le président du BIVB et les vendanges en attestent : les blancs Chardonnay et Aligotés sont « magnifiques », le Pinot noir fort généreux mais sensible à la chaleur subit un tri sévère avant d’être admis en cave... et les « jus sont savoureux » se délecte encore François Labet.
Reconstitution des stocks...
Après une désastreuse année 2021, ce millésime 2023, qui vient lui-même après une année 2022 exceptionnelle en qualité comme en quantité (1,75 million d’hectolitres, environ 233 millions de bouteilles), est une bonne nouvelle puisqu’il va permettre à la fois « de reconstituer les stocks et de reprendre des parts de marché », énonce Laurent Delaunay alors que le commerce des vins, très dégradé durant la crise de la Covid, explosif ensuite, a secoué les vignerons. « Nous sommes sortis d’un long fleuve tranquille, d’un train-train », s’amuse Laurent Delaunay. La campagne 2022-2023 marque ainsi « un certain retour à la normale ».
Les sorties de propriété atteignent +24% par rapport à la campagne 2021-2022, principalement portées par les transactions intrarégionales. « Cette forte demande de millésime 2022 indique un réel besoin de reconstituer les stocks, après plus d’un an à vider les caves », indique le BIVB dans un document remis lors de la conférence de presse. Par conséquent, dès 2022, les volumes de transaction (vrac) pour la campagne 2022-2023 (897.084 hectolitres) ont été dynamisés : + 14 % en volume pour les transactions ; 95,3% des volumes de transactions concernent le millésime 2022 tout juste récolté, « un record de ces vingt dernières années », précise encore le BIVB, preuve de l’engouement du marché pour les vins bourguignons.
Les sorties en vrac ont représenté plus de 60% des sorties de propriété, alors que les sorties en bouteilles sont logiquement en baisse (-9% par rapport à la campagne 2021-2022). Enfin les stocks à la propriété en fin de campagne 2022-2023 (fin juillet 2023) progressent de +17%. « Nous avons 14 mois de stocks avant d’intégrer 2023 », précise François Labet.
...mais consommation nationale en berne
La relative tranquillité sur les stocks pourra-t-elle permettre un geste sur les prix ? Là-dessus, le BIVB n’est en aucun cas prescripteur, et peut tout au plus souhaiter que grâce à cette marge de manœuvre, « les entreprises qui le peuvent seront mieux à même d’envisager une légère détente sur les prix ». Sur le marché national, qui représente encore plus de 50% du commerce des vins bourguignons, le contexte n’est pas des plus réjouissants.
L’inflation, qui se positionne aux alentours de 4,5%, une croissance molle (0,5% au deuxième trimestre), et les arbitrages que de plus en plus de ménages sont obligés de faire concernant leurs dépenses alimentaires se font sentir sur la consommation des Français.
Le BIVB a ainsi répertorié les chiffres de la grande distribution. Si le volume total pour les produits de grande consommation est globalement en baisse (-3,3%), le segment du vin, notamment celui des non effervescents, marque aussi le pas avec une chute de - 4,8% en volume par rapport à 2022 sur la même période. Plus spécifiquement, les vins de Bourgogne subissent sur les huit premiers mois de 2023 une baisse de - 14,6% en volume et - 5,2% en chiffre d’affaires par rapport à la même période en 2022. Ces chiffres sont toutefois à nuancer du fait de la raréfaction des vins disponibles eu égard à la faiblesse de la récolte 2021, « alors que, jusqu’à il y a un an, la Bourgogne caracolait en tête », rappelle Laurent Delaunay.
Pourtant, note le BIVB, « certaines AOC de Bourgogne poursuivent leur croissance en grande distribution » et de citer Saint-Bris (environ 110 hectares en cépage sauvignon sur les communes de Saint-Bris-le-Vineux, Chitry, Irancy, Quenne, Vincelottes dans l’Yonne), avec + 10,7% en volume et + 18,3% en chiffre d’affaires et l’AOC Pouilly-Vinzelles (environ 60 hectares en cépage chardonnay sur les communes de Vinzelles et Loché, Saône-et-Loire), qui affiche +11% en volume et +19,8% en chiffre d’affaires).
Le « Club des 5 », toujours fidèle
Sur le plan international, l’engouement pour les vins bourguignons, vins de terroirs à l’identité forte et inimitable, reste intact. Et si la profession note un repli en volume des ventes sur le premier semestre 2023 ( -7%), le chiffre d’affaires est lui en légère hausse de + 5,5 %. « Ce résultat reste toutefois à relativiser, nuance le BIVB. Avec 43 millions de bouteilles, ce niveau d’exportation reste parmi les plus élevés de ces trente dernières années, alors même que la Bourgogne n’a pas entièrement refait ses stocks ».
Les principaux marchés de la Bourgogne (États-Unis, Royaume-Uni, Canada, Japon et Belgique) formant un groupe fidèle baptisé « Club des 5 » par la profession, a ainsi légèrement ralenti ses achats, même si un frémissement se fait sentir au second trimestre 2023. Leurs vins de prédilection ? Les Grands Crus de Côte-d’Or et l’AOC régionale Mâcon qui fait une percée dès le premier semestre 2023, avec + 10,8% en volume un effet de la montée en gamme de l’AOC.