Viticulture : le modèle bourguignon sauvé par la Loi de finances 2025
Région BFC. Le relèvement, désormais voté, des plafonds d’exonération fiscale sur la transmission des terres agricoles va soulager les vignerons, souvent contraints de vendre les parcelles familiales faute de pouvoir faire face aux droits de mutation dans un contexte de pression foncière délirant.
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« C’est une énorme victoire ! » En cette matinée du 6 février où le Sénat clôt définitivement les débats et entérine la Loi de finances 2025, Thiebaut Huber ne cache pas sa joie. Le président de la Confédération des appellations et des vignerons de Bourgogne (CAVB) également trésorier de la Confédération nationale des producteurs de vins et eaux de vie de vin à Appellations d’origine contrôlées (CNAOC) a de quoi être content : en révisant en profondeur les plafonds d’exonération fiscale sur la transmission des terres agricoles, le législateur vient en effet d’exaucer une demande de longue date des viticulteurs qui, assure Thiebaut Huber, va impacter « 85 à 90% des exploitations bourguignonnes ».
Concrètement, le texte - niché dans les dispositions dont a accouché le vendredi 31 janvier la Commision mixte paritaire (CMP) qui a précédé l’adoption par 49.3 à l’Assemblée nationale du budget 2025 - augmente les plafonds de l’exonération fiscale à 75% pour la transmission à titre gratuit de terres agricoles. Il est ainsi doublé de 300.000 à 600.000 € « à la condition que le bien reste la propriété du donataire, héritier et légataire pendant cinq ans » et passe de 500.000 € à 20 M€ dans le cas d’une propriété conservée pendant 18 ans. L’exonération est ensuite de 50% au-delà.
Pour Thiebaut Huber, ce n’est pas moins que le modèle de transmission intra-familiale des vignobles qui vient ainsi d’être préservé ; tout particulièrement en Côte-d’Or et aussi dans le Chablisien, dont le foncier viticole est soumis à une pression de plus en plus insupportable.
Le Cas LVMH
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Le chemin législatif a été long (voir encadré), mais il faut bien avoir conscience que ce texte est une véritable révolution et un soulagement pour les familles de viticulteurs dont certaines étaient contraintes de se séparer de ses parcelles, parfois acquises au fil des générations, faute de pouvoir s’acquitter des droits de mutation. Le vignoble bourguignon (et au-delà) avait été secoué en fin d’année 2024 lorsque le domaine Poisot Père & Fils a, dans ce contexte, dû vendre une partie du domaine (1,3 ha) pour 15,5 M€ au groupe de luxe LVMH. L’exploitant avait à l’époque témoigné dans le Bien Public qui avait révélé la transaction : « Nous restons exploitants de l’ensemble des vignes, le domaine n’a pas été racheté. Nous continuons à travailler sans aucune interférence, LVMH a juste acheté les terres qui appartenaient à ma famille, à cause des problèmes de succession. »
Cette affaire a été la goutte de Grand cru qui a fait déborder le vase et rappelé l’urgence de revoir la législation. Le sénateur de la Côte-d’Or François Patriat, à l’origine d’un amendement (voir ci-contre) qui a été repris quasiment terme pour terme par la CMP l’a reconfirmé lors d’un point presse à la Cité des Climats et des vins ce 6 février : « Il fallait vraiment que soit prise en compte la réalité économique de ce que représente la vigne aujourd’hui et les risques que notre pays perde ses plus beaux joyaux parce que la contrainte fiscale est trop élevée. Donc l’idée était de dire il faut à tout prix que le verrou fiscal saute. Il faut revoir le régime des successions, je crois qu’on pourrait le revoir globalement dans ce pays ! Mais il y avait particulièrement urgence dans le monde de la vigne. »