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La Cabrache, tout un fromage

Agroalimentaire. Dans le Morvan, la Cabrache est le premier fromage estampillé Made in Morvan, trainant derrière elle bien plus qu’une spécialité fromagère.

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Sous l’égide du Parc régional naturel du Morvan (PNRM), une demi-douzaine de producteurs laitiers se sont engagés dans la création d’une filière laitière pour produire une Tomme du Morvan, une première pour cette région pourtant fortement marquée par son identité. Derrière La Cabrache (contraction de cabri-brebis-vache), c’est son nom, qu’elle soit de chèvre, de brebis ou de vache, se cache bien plus qu’un fromage. Pour Sylvain Mathieu, président du PNRM et conseiller régional, c’est une visite dans le Haut-Jura, pays du Comté qui lui a mis : « une claque. Il y a une fierté du produit. Une activité dans chaque village. Je me suis dit : pourquoi pas nous ? Après tout, nous sommes la seule montagne de France à ne pas avoir du fromage ».

Avec une filière de Charolais maigre, le Morvan n’a pas attendu le Jura pour développer une activité propre. Mais pour Sylvain Mathieu, c’est insuffisant : « On vend de la matière première. On ne valorise pas des animaux pourtant élevés dans des pâturages naturels et sans intrants. Au final, ce sont les transformateurs qui bénéficient de la valeur ajoutée ». Après le succès du jambon du Morvan, initié il y a six ans, la Cabrache a donc une lourde mission : donner une nouvelle identité au Morvan, développer une nouvelle filière laitière, et dynamiser la région montagneuse la plus petite de France (qui fait partie du grand massif central) pour créer une nouvelle économie : « Dans les années 1980, on a misé sur le tourisme vert. Récemment sur le porc en plein-air qui est un véritable succès pour les agriculteurs : élever des porcs en parallèle de leur activité. On avait des fromages, mais aucun véritablement identifié. Et on doit soutenir une agriculture morvandelle en souffrance ».

Un territoire à agriculture positive

Alors un recensement commence. Sur 1.000 agriculteurs morvandiaux, 28 produisent du lait : « On a réuni tout le monde avec la chambre d’agriculture. On s’est posé la question de la faisabilité. On a pris exemple sur les Vosges qui ont inventé le Coeur de massif, exclusivement fait avec du lait de la race vosgienne. »

Le choix est fait d’un fromage à pâte cuite : « En évolution de 4 % par an et plus facilement exportable vers les pays anglo-saxons. C’est en plus un fromage de garde qui permet d’utiliser les stocks de lait. » Parmi les 28, cinq producteurs adhèrent au projet. La Fondation Avril soutient le projet dans le cadre de « Territoire à agriculture positive ».

Une chargée de mission, Coralie Jean-Abauzit est dédiée au développement. La recette du fromage est travaillée avec le Centre fromager de Bourgogne, dirigée par Guillemette Allut : « Un vrai scanner à fromages » qui a convaincu les producteurs. Il aura donc fallu deux ans et 120.000 euros pour créer La Cabrache, choisir sa forme, sa taille, son image : « Le succès est tel que les producteurs ne peuvent déjà plus répondre à la demande. L’investissement est largement rentabilisé », conclut Sylvain Mathieu.