La région prête à passer le rabot sur des compétences non obligatoires
Région BFC. Lors de la traditionnelle conférence de presse d’avant assemblée plénière, Marie-Guite Dufay, présidente de la région BFC, a présenté les orientations budgétaires 2025 pour la collectivité dans un contexte d’instabilité inédit.

« Le plus dur, c’est le gel de la TVA. Nous avions travaillé sur un budget avec une augmentation des recettes liées à la TVA de 2 % et au final nous sommes obligés de partir sur les mêmes montants qu’en 2024 », lâche Marie-Guite Dufay, présidente de la région BFC en introduction de sa présentation des orientations budgétaires 2025 à la presse jeudi 20 février. Une présentation réalisée avec un calendrier bousculé par le contexte de crise institutionnelle que traverse le pays depuis la dissolution de l’Assemblée nationale en juin.
30 M€ de dépenses en moins sur deux ans
C’est dans une logique de réduction de la dépense publique, liée au poids de la dette publique dépassant les 3.300 Mds€, dont plus de 1.000 Mds€ depuis 2017 et imposée par le précédent gouvernement Barnier que se sont construites ces orientations budgétaires. « Même si aujourd’hui la nouvelle loi de finances du gouvernement Bayrou réduit la contrainte imposée aux collectivités, faisant passer la baisse des recettes pour la région BFC de 60 à 30 M€, nous avons fait le choix de conserver le cap plus sévère imposé par le gouvernement Barnier, pour nous obliger aux efforts », annonce Marie-Guite Dufay. Dans ces conditions particulières, la région BFC possède de nombreux atouts, elle a notamment conservé une situation budgétaire maîtrisée et nettement moins altérée que dans d’autres régions : « On fait partie des régions qui ont le meilleur ratio financier, ce qui ne nous obligera pas, à l’instar d’autres, à opérer des coupes drastiques, brutales et irréversibles dans des pans entiers de nos politiques publiques. Cette bonne santé financière nous permettra, à l’inverse, de puiser dans les capacités budgétaires pour amortir le choc. » Mais choc il y aura tout de même, prévient la présidente qui entend agir à la fois sur la réduction des dépenses, sur le levier de la fiscalité pour accroître les recettes et sur une dégradation des ratios financiers. « La règle imposée aux régions, c’est de ne pas dépasser les neuf ans d’endettement. Jusqu’ici, nous étions à cinq ans. Ce que nous envisageons, c’est de passer d’abord à sept ans puis à neuf ans en 2028, voire 2029 si l’on prend en compte la contrainte Bayrou », développe la présidente.
Des compétences sanctuarisées
Dans le détail, les défenses de fonctionnement « qui je le rappelle, ne sont pas celles des petits fours », précise Marie-Guite Dufay, seront revues à la baisse « dans une logique d’économie progressive, avec une réduction des dépenses étalée sur deux ans à hauteur de 30 M€ en autorisations d’engagement par rapport au prévisionnel, dont un premier palier de 10 M€ en 2025. Ces économies viseront en priorité dans nos politiques publiques les actions hors compétences ainsi que les actions n’ayant qu’un faible effet levier ou un mauvais taux d’exécution au regard des exercices précédents ». Et l’élue de prendre des exemples : « Nous sommes la seule région à avoir mis en place une aide à la formation des salariés du tissu associatif de l’aide à domicile. Cela a permis la montée en gamme de ces salariés qui ont pu ainsi obtenir de meilleures rémunérations. Cette action n’entre pas dans le champ de nos compétences légales, nous allons donc regarder au cas par cas avec chaque association comment diminuer ce soutien sans mettre en péril ces dernières. Dans les lycées, le programme pédagogique Éveil sera remis en cause, seule la compétence obligatoire portant sur les bâtiments sera maintenue, avec toutefois un ralentissement dans les travaux. Les crédits d’investissement baisseront ainsi de 87 M€ dans le Plan pluriannuel d’investissement (PPI) 2024-2030, portant celui-ci à 609 M€, soit 85 M€ / an en moyenne : un effort qui reste supérieur à celui de chaque ancienne région avant fusion. » À l’inverse, certaines compétences seront sanctuarisées : les investissements en lien avec la transition écologique et énergétique, « car si l’urgence climatique tend à passer au second plan un peu partout face à une situation internationale très dégradée, cela reste pour autant un enjeu majeur d’une action publique qui se veut tournée vers l’avenir. Ainsi contrairement à l’État qui entend baisser le montant du fonds vert de 2,5 Mds€ à 1 Md€, la région, elle, va poursuivre son investissement sur son programme d’aide à la rénovation énergétique des bâtiments Effilogis », la formation des demandeurs d’emploi, « car c’est une compétence majeure de la région en direction des plus fragiles, qui plus est dans un contexte de reprise de la progression du chômage » et le soutien au fonctionnement des structures culturelles « car dans une société où beaucoup de repères semblent se brouiller, la culture reste un facteur de lien et de transmission de valeurs essentielles à la cohésion de notre société ».
Un nécessaire recours à l’outil fiscal
Côté dépenses d’investissement, la région avait voté en décembre 2023 un PPI d’un montant de 2,343 Mds € pour la période 2024-2030. Le besoin d’investissement croissant de certains secteurs, notamment celui des mobilités, avait projeté ce PPI à 2,6 Mds €. Dans le contexte actuel, la collectivité s’oblige à revenir à son budget initial de 2,3 Mds € « en conservant tout de même un niveau d’investissement ambitieux pour 2025 estimé à 575 M€ ».
Sur l’évolution des recettes, « nous procéderons à l’augmentation de la taxe sur l’immatriculation des véhicules jusqu’à son plafond de 60 € par cheval fiscal à compter du 1er juillet, ce qui devrait apporter 10 M€ de nouvelles recettes à la région à partir de 2026 ». Sur le volet mobilité, la collectivité entend prendre en compte la récente ouverture faite par le gouvernement aux régions du versement mobilité, avec la capacité d’envisager le prélèvement de cette contribution sur leur territoire, dans la limite de 0,15 % de la masse salariale des entreprises publiques et privées de plus de 11 salariés. Ce qui représenterait 35 M€ pour la BFC. Cette recette potentielle serait destinée exclusivement à améliorer l’offre de mobilité, tant en matière de fonctionnement que d’investissement sur les compétences régionales. Elle permettrait aussi d’appuyer les territoires, notamment ruraux, dans leurs politiques de mobilité puisque la loi prévoit qu’une part de ce versement mobilité soit reversée aux EPCI qui ont pris la compétence. « Mais une fois qu’on a dit tout cela, il y a les entreprises, dont je n’ignore pas les difficultés dans un contexte incertain… J’entends le ras-le-bol fiscal, cela dit, je n’oublie pas non plus que la politique de l’offre mise en oeuvre par les gouvernements successifs au cours des années passées leur a plutôt été favorable ! J’ai échangé avec la présidente du Medef BFC, et entendu ses arguments sur le contexte économique. Elle m’a par ailleurs fait part des positions exprimées nationalement par le Medef, sur l’existence d’hypothèses alternatives de recettes pour la région, reposant notamment sur l’affectation d’une fraction du produit de la mise aux enchères des quotas d’émission de gaz à effet de serre… Ces propositions ont déjà été auditées par Région de France il y a plusieurs mois, et n’apparaissent pas pleinement convaincantes tant pour leur rendement, leur dynamisme et surtout leur pérennité... Toutefois, je ne suis pas hostile à un débat. C’est pourquoi, je propose d’élargir les contours du comité des partenaires mis en place par la loi LOM autour des mobilités régionales, en y laissant une place plus importante aux employeurs, tel que prévu par la loi de finances. Ce comité devra se réunir rapidement dans l’objectif de travailler d’une part sur les besoins existants en termes d’offres, et d’autre part sur les financements envisageables à la mise en oeuvre de ces nouveaux services ». Toujours sur les mobilités, la région souhaite rejoindre le mouvement engagé par la région Sud et réintégrer à son budget les recettes et dépenses liées au TER et ainsi récupérer la TVA : « Aujourd’hui, quand vous achetez un billet TER la recette part directement à la SNCF et c’est elle qui récupère la TVA. Nous allons travailler avec l’administration fiscale pour que dès 2025, nous puissions mettre en place ce changement et ainsi récupérer 15 M€ ».