Les collectivités ont aussi leur part dans leur problème d’assurabilité
Côte-d’Or. Le 11 décembre, la Chambre régionale des comptes de BFC présentait les résultats de son enquête sur l’assurabilité des collectivités territoriales.
Dans un contexte de dégradation brutale des conditions d’assurance des collectivités locales, qui se traduit notamment par un renchérissement du coût de l’assurance, la Chambre régionale des comptes (CRC) de Bourgogne-Franche-Comté a souhaité compléter les travaux déjà entrepris par le Sénat, l’association des maires de France (AMF) et le gouvernement, « afin de trouver des leviers d’amélioration pour que les collectivités puissent assurer leurs risques à un coût maîtrisé », précise Emmanuel Roux, président de la CRC BFC. Dix-sept collectivités et organismes locaux (13 communes, deux intercommunalités, un département et un syndicat de traitement des déchets) ont ainsi été audités. Vladimir Dolique, président de section de la CRC BFC, a commencé par rappeler qu’il y avait d’abord une crise générale du marché de l’assurance des collectivités. « Ce marché est historiquement très concentré avec deux acteurs dominants (SMACL et Groupama), c’est un marché de niche (2 % du CA de l’assurance), moins rentable que l’assurance du secteur privé, ce qui explique pourquoi les grands groupes de l’assurance se sont progressivement retirés de ce marché, d’autant que les risques augmentaient fortement (indemnisation des sinistres climatiques multipliée par trois, impact des émeutes urbaines...). »
Vers un effet "bon élève"
Sur 2023, il y a eu 10 milliards d’euros d’indemnisation. C’est cette même année qu’une vague de résiliations massives de contrats a été opérée, liée notamment à la fragilisation de la SMACL, qui a maintenu des prix bas malgré l’augmentation des risques. Ce qui a conduit à son rachat par la Macif. « Cette déstabilisation du secteur s’est traduite par une augmentation des primes par un facteur deux entre 2022 et 2024 (multipliée par 5 à Monceau-les-Mines), le plus souvent sans lien avec la sinistralité, conduisant à un effet d’autoassurance imposé pour les collectivités ». Et même si le poids budgétaire des assurances reste limité (1,7 % du compte rendu financier des collectivités), cette augmentation des frais intervient dans un contexte inflationniste (énergie, coût de la construction, charges de personnels...). Le phénomène de hausse des primes (qui se concentre surtout sur l’assurance dommage aux biens, l’assurance statutaire et la responsabilité civile) s’est également accompagné d’un durcissement des conditions de garanties (forte hausse des franchises, plafonnement des garanties, extension des exclusions), facteur de vulnérabilité pour les collectivités, qui, pour certaines, vont jusqu’à remettre en cause la pertinence même d’une assurance dans de telles conditions : « C’est notamment le cas de Pontarlier qui a fait le choix de ne plus prendre en charge les absences de ses agents pour maladie ordinaire », relate Emmanuel Roux qui évoque également des collectivités restées sans certaines assurances pendant plusieurs mois.
L’audit flash de la CRC BFC ne se contente pas de seulement « mettre le doigt là où ça fait mal », mais entend bien identifier les leviers pour améliorer la situation. En la matière, si la chambre évoque de « nécessaires décisions nationales pour permettre de conforter les mécanismes de réassurance (risques climatiques, sociétaux) », elle pointe également une obligation pour les collectivités de monter en compétence et en expertise sur la gestion de leur assurabilité. « Elles doivent mieux préparer leurs contrats avec une analyse plus fine de leurs besoins, dans un rapport coût/avantage. Elles doivent également tendre vers une standardisation des contrats, plus adaptée aux pratiques des assureurs, tout en engageant des démarches systématiques de prévention des risques. C’est par cet effet “bon élève” qu’elles gagneront la confiance des assurances et déclencheront au final le “juste prix” », affirme Emmanuel Roux.