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TER : le maire de Sens monte au créneau

Yonne. Chaque jour, les 5.000 navetteurs de la ligne Sens-Paris sont confrontés à des difficultés : manque de places, retards récurrents et conditions de voyage souvent déplorables. Dès 2023, le maire de Sens, Paul-Antoine de Carville, se fait l’écho de leur mécontentement auprès de la Région Bourgogne Franche-Comté. Aujourd’hui, l’élu revient sur les initiatives engagées par la municipalité pour défendre leurs intérêts.

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Photo de Paul-Antoine de Carville
Paul-Antoine de Carville, maire de Sens. Crédit : JDP.

Le Journal du palais. Avez-vous eu des suites de votre lettre adressée au Conseil régional en 2023 ?

Paul-Antoine de Carville. Il y a une colère qui gronde en 2023, très forte. Et donc on a alerté à plusieurs reprises la région. On a eu des réponses assez laconiques au départ. C’est là où on a décidé de mettre en place un système où on a invité les gens à pointer les retards. On a demandé aux gens de scanner un QR code pour nous signaler tous les retards qu’ilsavaient. Et après, on a fait une compilation de tous les retards. On a envoyé un courrier à la SNCF pour résumer tout ce qu’on avait relevé pendant plusieurs mois, de février 2023, à peu près, jusqu’en septembre, je crois. On est ensuite monté en puissance avec des relevés hebdomadaires de tous les retards.

Quel est l’impact de cette démarche aujourd’hui ?

On constate qu’il y a vraiment une amélioration du système, puisque la région a pris conscience, je pense, du service très dégradé. Ce qu’a fait la région, bon c’était prévu, mais je pense que ça a pu aider : elle a changé tous ses trains. Tous les trains sont neufs, ou c’est les anciens trains, vous savez, les bombardiers. Il n’y a plus les anciens trains TER sur deux étages. Et surtout, elle a sanctuarisé des trains le matin et des trains l’après-midi pour se concentrer sur les trains de navetteurs pour être sûr qu’ils partent à l’heure et qu’ils arrivent à l’heure.

Hormis les retards, avez-vous lancé un sondage concernant les conditions de transport ?

On a aussi relevé tous les trains qui étaient bondés ou annulés. Il y a plusieurs problèmes sur les trains. Il y a les trains qui partent en retard ou qui arrivent en retard. C’est moins le cas. Il y a les trains qui sont bloqués en pleine voie. Ce qui arrive de plus en plus, malheureusement, c’est les trains blindés, c’est-à-dire que les gens n’ont pas de place. Ils ne peuvent même pas rentrer dans le train. Et ça, c’est un nouveau problème.

À quoi est-ce dû ?

C’est dû à plusieurs phénomènes. Déjà, le fait que les gens rentrent le week-end à Sens. Donc il y a les navetteurs du vendredi soir, plus tous ceux qui habitent à Paris, qui viennent voir leur famille, étudiants ou autre, donc qui rajoutent à ça le vendredi soir. Et il y a un autre phénomène, c’est qu’en fait, dans toutes les lignes qui vont à Lyon, il y a énormément de gens : plus de 50%. Donc le train est blindé.

Est-ce un problème qui se posait déjà avant ?

Oui, mais je pense que l’augmentation des prix des TGV, plus la difficulté financière des gens, fait que de plus en plus de gens se reportent sur le TER et donc viennent saturer la ligne qui amène jusqu’à Sens. C’est quand même un vrai problème parce qu’il n’y a pas de solution à court terme.

La ville de Sens est-elle la seule desserte confrontée à ce problème-là ?

Que ce soit les retards ou la surpopulation des wagons, tous les maires qui visent la ligne s’en plaignent. Mais on va dire que ceux qui s’en plaignent le plus, c’est plutôt les gens de Joigny, les gens de Sens, parce que maintenant, tout ne s’arrête pas à Pont-sur-Yonne. Avant, il y avait beaucoup de trains qui s’arrêtaient à Pont-sur-Yonne. Maintenant, ils partent de Montereau. Donc finalement, on est vraiment les plus concernés par ce problème de gestion, puisque la plupart des gens descendent à Sens.

Est-ce que vous attendez d’autres mesures concrètes de la part de la région ou de la SNCF pour améliorer la situation ?

Oui. Maintenant, on a deux réunions par an avec la SNCF où elle nous présente ses chiffres : les retards, etc. Donc nous, on regarde avec eux tous les retards et on regarde tout ce qu’on peut faire pour les faire baisser. Il y a plusieurs types de problèmes. Vous avez soit les problèmes de matériel du train, des problèmes de personnel ou des problèmes de voyage, des problèmes de saturation en arrivant en Île-de-France. Ils ont progressé en termes de fiabilité en deux ans mais ils peuvent toujours s’améliorer parce qu’ils ont encore malheureusement trop de retard : moins de 20% des trains. Mais là, je pense qu’ils ont bien en tête Sens, que la présidente de région a bien en tête Sens, que ça l’a bien énervée d’ailleurs, parce qu’elle a reçu des dizaines de courriers de notre part, à un moment donné.

Est-ce que ça impactait la ville elle-même en termes d’attractivité, par exemple ?

Le problème, c’est toujours que vous avez des gens qui nous disaient : « Moi, je vais arrêter d’aller travailler à Paris ou je vais arrêter d’inviter à Sens. Parce que le train, ça devient impossible ». Mais dire combien de personnes ont vraiment arrêté, ça, je ne sais pas. Au niveau touristique, non. Parce que je pense que la plupart des gens ne venaient pas faire du tourisme à Sens en train. Par contre, c’est sûr que ça peut vite décourager.