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Atelier Nébéos, du sur-mesure sous tension économique

Yonne. Installé depuis un an dans son atelier de Champs-sur-Yonne, Guillaume Rousseau conçoit et fabrique du mobilier haut de gamme. Malgré un savoir-faire rare, son activité reste fragile : en 2024, son chiffre d’affaires a plafonné à 78.000 euros, loin des 100.000 euros d’objectif.

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(Crédits : JDP)

À première vue, son atelier respire la créativité. Établi depuis un an dans 130 m² qu’il loue pour 1.000 € par mois, Guillaume Rousseau y conçoit bibliothèques élégantes, dressings techniques et pièces uniques sur mesure. À 30 ans, cet ébéniste assume un parcours atypique : formé en région parisienne, lauréat de concours d’excellence en menuiserie, il a travaillé aux quatre coins de la France avant de poser ses valises dans l’Yonne « pour des raisons de coeur », confie-t-il en souriant. Mais derrière la précision des gestes et l’exigence des finitions, la réalité économique est moins poétique.

« Pour être à l’équilibre, il faudrait que je réalise 100.000 euros de chiffre d’affaires par an. En 2024, j’ai atteint 78.000 euros, mais ce n’est pas suffisant », admet-il. Avec 5.000 euros de charges mensuelles, entre matières premières, assurances, déplacements et location d’atelier, le seuil de rentabilité est élevé. « Je suis seul, donc tout repose sur moi : la conception, la fabrication, la pose, la communication… ».

Reste à savoir si ce volet financier de la résolution de la crise sera pris en compte. Malgré un emploi du temps chargé, les commandes ne tombent pas toujours au bon moment. Le printemps 2025 a été particulièrement critique. « En mai-juin, j’ai failli fermer. J’avais beaucoup de devis, mais avec le contexte économique et la prudence des particuliers, rien ne se signait. » Ses prestations oscillent généralement entre 3.000 et 10.000 €, mais les chantiers s’enchaînent par vagues, avec des creux qui fragilisent la trésorerie.

Concurrence accrue et consommateurs changeants

Le métier de menuisier-fabricant souffre d’un double phénomène : une baisse des compétences artisanales et une explosion des meubles industriels. « Aujourd’hui, il y a beaucoup de poseurs, mais moins de fabricants. Avec Internet, les gens trouvent des cuisines en kit à prix cassés. Mon atout, c’est la personnalisation, le haut de gamme et la durabilité », explique-t-il. Mais séduire cette clientèle exigeante implique du temps, du réseau et une présence digitale efficace.
Pour pérenniser son activité, Guillaume mise sur le bouche-à-oreille, des partenariats avec des architectes et des projets locaux. Il espère notamment décrocher des chantiers dans des domaines viticoles de la région. « Il y a du travail, mais par à-coups. J’aimerais que ce soit plus régulier », résume-t-il. En attendant, il multiplie les allers-retours entre Lyon et Paris, où il conserve une clientèle fidèle. Malgré les difficultés, pas question pour lui de renoncer.

« Ce que j’aime, c’est créer des pièces uniques. C’est technique, c’est beau, et ça reste », sourit-il. Mais pour que ce rêve d’artisan perdure, il devra transformer ses compétences en stabilité économique. Un défi de taille dans un secteur où l’excellence ne garantit pas toujours la rentabilité.