Clients en hausse, salariés en panne
Hôtellerie-restauration. L’Umih 21 tenait son assemblée générale mercredi 10 avril à l’École des métiers. La dernière comme président pour Patrick Jacquier, à la tête de l’organisation professionnelle depuis 2008. Le secteur de l’hôtellerie, de la restauration et des bars connaît certes une reprise de la fréquentation, mais fait toujours face à des problèmes d’attractivité, alors que la législation ne le protège pas assez selon ses représentants qui font notamment face à la concurrence déloyale des loueurs privés et des plateformes de réservation.
« Nous avons été rigoureux, quelquefois difficiles, en tous cas je pense qu’au cours de ces 28 ans nous avons servi avec beaucoup d’honneur tous les membres (600 en 2024, Ndlr) de notre syndicat. » Président depuis 2008 de l’Umih (Union des métiers et des industries de l’hôtellerie) de Côte-d’Or, Patrick Jacquier passera la main l’année prochaine et c’est donc avec émotion mais aussi beaucoup de lucidité qu’il a fait le bilan du secteur, qui se relève de la période Covid.
« Notre secteur d’activité semble bénéficier d’une reprise économique, même si on peut déplorer beaucoup de redressements ou de liquidations judiciaires surtout dans notre filière en ce début d’année 2024 », regrette Patrick Jacquier qui a contrario se félicite de la naissance d’un véritable écosystème touristique local propice au dynamisme du secteur : « La Cité internationale de la gastronomie et du vin, la Cité des Climats et des vins de Bourgogne à Beaune, Dijon Bourgogne Events (l’agence d’attractivité évènementielle de Dijon Métropole, Ndlr), le Bureau des Congrès contribuent à faire rayonner la Côte-d’Or et vont nous apporter encore plus de touristes : tel est notre souhait et telle est la réalité ». Pour l’année 2023, le nombre total de nuitées dans les hôtels s’élève à 2.551.000 (+1% par rapport à 2022).
Des chiffres à la hausse
Les nuitées hôtelières françaises sont en hausse de janvier à juin et reste stable par rapport à 2022 (1.564.000 nuitées). Les nuitées hôtelières étrangères (987.000 au total) sont en hausse toute l’année 2023 par rapport à 2022 (+2,6%), sauf et c’est notable, durant l’été (la fréquentation baisse en effet de 10,8 % en juillet-août). Les Belges, les Pays-Bas, le Royaume-Uni forment le podium des nationalités des visiteurs.
Les Chinois reviennent en Côte-d’Or : le nombre de visiteurs est en forte augmentation représentant 19.334 nuitées contre 4.247 en 2022. « Je rappelle que la clientèle asiatique était notre première clientèle avant le Covid, souligne Patrick Jacquier. Normalement, ces clients-là reviendront dans le futur dans nos établissements ».
L’attractivité toujours en panne
Si les usagers ont repris le chemin des terrasses, tables de restaurant et chambres d’hôtels, le secteur souffre en revanche toujours d’une pénurie de candidats pour ses différents métiers, comme le souligne Patrick Jacquier : « Notre combat actuel pour lequel nous devons travailler d’arrache-pied tous ensemble est la revalorisation de nos filières car beaucoup de nos salariés sont partis vers d’autres horizons, alors que nous sommes l’industrie qui recrute le plus actuellement. »
Et le patron de l’Umih 21 de plaider pour les métiers du secteur de la filière CHRD (hôtel, restaurant, traiteur, café, établissement de nuit, bowling et loisirs indoor et thalasso), « nombreux, variés, passionnants, dynamiques... malheureusement méconnus alors qu’ils sont porteurs d’avenir, sans délocalisation d’entreprise, sans chômage. Ils sont non pas un ascenseur mais un “escalier” social : on monte au fur et à mesure quand on fait l’effort de vouloir le faire, et on peut devenir par la suite son propre patron. »
Aux dirigeants de ces établissements d’être proactifs, plaide Patrick Jacquier : « Il nous faut maintenant aller de l’avant, nous réinventer pour retrouver ces collaborateurs qui sont indispensables à nos équipes. Le salaire n’est plus l’unique question : le travail en coupure se révèle être une lourde contrainte, or la majorité des petits hôtels, cafés, restaurants ne pourront faire face à cette difficulté. C’est un gros problème que nous devons tenter de résoudre en y réfléchissant. »
Refonte du label fait maison
Cauchemar du secteur de l’hôtellerie-restauration, les plateformes de réservation permettant la location touristique de particulier à particulier (voir encadré), a aussi pour des conséquences quant à l’attractivité du secteur. « Il nous faut pouvoir désormais loger notre personnel, confirme Patrick Jacquier, ce qui devient une nouvelle contrainte. Or la multiplication des locations Airbnb sont un frein au logement de nos salariés. »
L’Umih bataille également au niveau régional comme national pour la défense de la filière et notamment sur le point spécifique du label « Fait Maison » que l’on trouve à la carte de nombreux restaurants. Le gouvernement était en effet en faveur de la mention « Non Fait Maison », pour distinguer les plats qui ne sont pas cuisinés sur place avec des produits bruts à partir de 2025. « L’Umih national et d’autres acteurs ont réussi à faire abandonner par les parlementaires la proposition de loi initiale, s’est réjoui Patrick Jacquier. Une mention “Non Fait Maison”, était une formule complètement improductive. Nous sommes évidemment tout à fait favorables à une transparence sur nos cartes vis-à-vis du consommateur. Mais nous souhaitons une communication positive et non stigmatisante sur les plats. Reporter à l’automne ce projet de texte permettra de continuer à travailler afin de proposer un dispositif qui non seulement informera davantage nos clients mais aussi valorisera le savoir-faire et le travail des professionnels. » La présentation des comptes ayant fait apparaître un résultat positif pour l’Umih 21, Patrick Jacquier s’est félicité de transmettre, avec le bureau sortant, une comptabilité de bon père de famille aux futurs dirigeants de l’Umih 21.