Création d’entreprise : les points de vigilance pour bien la préparer
Formalités. Créer son entreprise est une opportunité qui ne s’improvise pas. Qu’il s’agisse d’une entreprise individuelle ou sous forme sociétaire, la création de son entreprise nécessite de s’entourer de conseils professionnels pour exercer les choix qui vont se présenter au nouvel entrepreneur, tant en termes de choix juridiques, fiscaux ou encore sociaux.

Les démarches sont nombreuses et il est recommandé tout autant que confortable de les confier à un spécialiste pour pouvoir, dès les premiers jours qui suivent la création, être totalement tourné vers son coeur de métier et assumer sereinement les contraintes propres à l’activité exercée. C’est pourquoi, à travers les propos qui vont suivre, nous avons voulu mettre en avant quelques exemples de points de vigilance pour le démarrage, lesquels sont autant de recommandations pour le nouvel entrepreneur.
Les statuts de l’entreprise
Le choix d’exercer son activité sous la forme d’une société n’est pas anodin. Et il y a, dès ce premier acte juridique de nombreuses questions à se poser. Si l’entrepreneur exerce seul, une société est-elle utile ? Car il est possible dans ce cas de rester en entreprise individuelle. Il faut donc comparer les situations de l’entreprise individuelle et de la société en fonction de l’évolution souhaitée pour choisir entre l’un ou l’autre des statuts. Si la création d’une société est retenue, c’est d’abord le choix de la forme qui va interroger (SARL, SAS, SA, etc.). Ce choix pourra être commandé par le nombre et la qualité des associés mais aussi par le statut juridique et social du dirigeant qui varie selon le type de société. La répartition des titres entre les associés est aussi une question importante car la répartition à 50/50 souvent souhaitée lorsque deux amis envisagent de créer ensemble leur entreprise est une source de blocage en cas de mésentente. D’où l’intérêt de prévoir des solutions à ce blocage dans un acte complémentaire aux statuts, le pacte d’associés.
Le pacte d’associés

Le pacte d’associés est en effet un contrat conclu entre les associés d’une société en complément des statuts. Il a vocation à parfaire les rapports entre eux, fixer leurs droits et anticiper le règlement des difficultés qui pourraient survenir au cours de la vie sociale. Cet acte présente l’intérêt d’être confidentiel contrairement aux statuts qui sont publiés. L’intérêt majeur de cet acte est qu’il constitue une anticipation sur les difficultés qui pourraient survenir entre les associés. Il prévoit les modalités de dénouement d’une situation conflictuelle éventuelle entre eux et permet donc d’éviter que les conséquences de celle-ci ne mette la société en difficulté. Ainsi, le pacte va pouvoir organiser les modalités de sortie d’un ou plusieurs associés. Différentes clauses vont régir les mouvements de titres de la société comme la clause de préemption, la clause d’inaliénabilité, le droit de suite lorsqu’un signataire reçoit une proposition d’acquisition, ou encore une clause de sortie conjointe qui offre à son bénéficiaire la faculté de céder ses titres dans les mêmes conditions que le premier cédant. Cet acte étant un contrat, le non-respect de ce dernier par un associé peut être sanctionné par des dommages et intérêts ou encore l’exécution forcée de l’obligation par l’associé défaillant. L’intérêt principal de ce contrat reste donc de déterminer en amont des conditions strictes et précises pour anticiper toute difficulté. Et pour couronner le tout, une clause de médiation obligatoire comme processus de solution amiable au conflit peut éviter de faire valoir le pacte devant un juge. La confidentialité ainsi demeure.
Le contrat de bail des locaux
Le contrat de bail des locaux d’une entreprise sera le plus souvent un bail commercial. La rédaction du bail commercial et sa négociation sont des étapes essentielles à la création de toute activité. Le bail commercial est par essence un contrat déterminant pour l’exercice d’une activité car les locaux dont il est l’objet vont, en principe, abriter l’exploitation de celle-ci pour un minimum de neuf années. Ce contrat qui fut parfois être assez déséquilibré au détriment du preneur, doit faire l’objet d’une attention particulière pour l’entrepreneur » qui doit être assisté par un conseil pour sa négociation et sa conclusion. Car même si la loi dite PINEL du 18 juin 2014 est venue rééquilibrer les relations entre le bailleur et le preneur, il n’en demeure pas moins que ce contrat est assez technique et doit être à tout le moins analysé par un praticien avant signature. Parmi les points d’attention, figure en premier lieu la description de l’activité autorisée dans les locaux qui doit être conforme à celle réellement exercée. Ensuite, il faut aussi être vigilant à titre d’exemple sur la répartition des charges et travaux entre le bailleur et le preneur, les modalités de révision et l’indexation du loyer, l’état des lieux d’entrée, la clause de solidarité entre cédant du fonds et le cessionnaire quant aux obligations du bail au moment de la reprise. Signalons encore les différentes clauses qu’un bailleur peut insérer dans le contrat pour réduire les modalités pratiques de cession du fonds de commerce ou du droit au bail telles une clause d’agrément ou une clause de droit de préemption. Le bail commercial, contrat essentiel de l’entreprise, doit donc être analysé avec rigueur car tout manquement ultérieur de l’entrepreneur qui pourrait donner lieu à un litige est susceptible d’aboutir à la résiliation du bail.
Les actes préparatoires à la création et la concurrence déloyale

Il est courant qu’une personne qui se trouve dans les liens d’un contrat de travail, qui est associé d’une société ou encore qui est titulaire d’un contrat de franchise envisage de cesser ces fonctions pour monter sa propre entreprise. Cette situation a toujours créé des difficultés avec l’ancien employeur, la société quittée ou le franchiseur délaissé lorsque le nouvel entrepreneur envisage de devenir un concurrent de la structure quittée. En effet, les entreprises délaissées ont actionné le levier de la concurrence déloyale pour reprocher à leur ancien salarié, associé ou partenaire de vouloir exercer une activité concurrente et de préparer ce projet de manière déloyale dès lors que les actes préparatoires (création de la société, dépôt de marques, signature d’un bail commercial, etc.) ont eu lieu alors que le lien juridique d’origine est toujours existant. Elles ont aussi utilisé le levier de la clause de non-concurrence quand elle est inscrite au contrat de travail ou au contrat de franchise ou la violation de l’obligation de loyauté pour l’associé. Pour échapper au risque d’une action en concurrence déloyale ou en violation de la clause de non-concurrence, il appartient alors au nouvel entrepreneur de respecter tout au long de son contrat de travail, de son statut d’associé ou de franchisé les principes de loyauté et de bonne foi contractuelle. C’est-à-dire qu’il doit exécuter ses engagements sérieusement et correctement jusqu’à leur terme. Est par exemple à bannir impérativement le recopïage du fichier clientèle avant de partir. Ou encore le débauchage des anciens collègues de façon à désorganiser l’entreprise quittée. Si les principes de loyauté et de bonne foi sont bien respectés, les préparatifs d’une activité concurrente seront ainsi exonérés de toute remise en cause. Bien entendu, il faudra encore que l’activité concurrente ne débute effectivement qu’à l’issue de la relation contractuelle et à l’expiration de la clause de non-concurrence (Cour de cassation, Chambre commerciale 19 mars 2025, n°23. 22-925). Ce qui signifie que le nouvel entrepreneur doit encore être patient avant de pouvoir lancer matériellement son entreprise.