En absence de neuf, l’ancien récent à la cote
Immobilier. L’immobilier professionnel vit une période compliquée avec des affaires difficiles à concrétiser et une baisse des volumes. La frilosité bancaire, l’attentisme des clients et la lenteur des processus administratifs constituent les principaux freins.

Damien Voisenet co-gérant chez Cushman & Wakefield l’affirme : « 2025 ne sera pas le meilleur cru ! Les volumes transactionnels sont en baisse significative et cela quel que soit le type de topologie ». De son côté, Carine Provost, directrice de l’agence dijonnaise Arthur Loyd, anticipe un résultat, pour l’année 2024, marqué par une baisse de l’activité des volumes transactés d’au moins 30 %, constatant également un allongement marqué des délais entre le premier contact et la remise des clés au client. « Le traitement des dossiers est ainsi passés d’environ six mois à dix, voire douze mois. Un allongement qui ne tient pas nécessairement aux difficultés de financement, notamment sur les dossiers de qualité, mais plutôt à la lenteur des processus administratifs (permis de construire et d’urbanisme…) ». « La frilosité des systèmes bancaires et le durcissement des conditions d’octroi des emprunts pour les PME forment un goulot d’étranglement critique qui fait systématiquement décaler les opérations, d’autant plus que les projets de construction professionnelle sont financés à 99 % par des emprunts », argue, pour sa part, Cyrille Guiton, président du groupe Guiton.
L’élément le plus frappant de cette conjoncture est la paralysie complète du marché de la construction neuve. « Le neuf est à l’arrêt depuis environ un an et devrait le rester encore pendant de nombreux mois voire de nombreuses années », pronostique Damien Voisenet. « La période économique compliquée et la frilosité des banques conduisent à des exigences accrues en promotions immobilières », complète Carine Provost. « Les promoteurs ne lancent plus aucun programme sans un degré de pré-commercialisation très important, souvent supérieur à 50 %, voire 60 % des surfaces, renchérit Damien Voisenet. « Un seuil difficile à atteindre car le marché est essentiellement tenu par de petites demandes », complète Carine Provost. « L’offre neuve actuelle apparaît aujourd’hui comme une offre papier, non palpable et non mesurable en termes de délai de livraison, ce qui n’attire pas les clients en quête de solutions immédiates », ajoute Damien Voisenet.
Le neuf en berne
Le neuf est également grevé par l’inflation sur les matériaux et les nouvelles contraintes réglementaires (RSE, loi sur l’eau, décret tertiaire…) générant un « surcoût impressionnant ». Ces exigences conduisent notamment les locaux d’activité à atteindre « des prix de marché comparables à ceux des bureaux, remettant en question la logique économique traditionnelle », précise Patrick et Adrien Mestanier de CBRE. L’arrêt quasi total de la construction neuve force le marché à se concentrer sur le stock existant, créant une dichotomie de valeur entre les actifs récents (moins de 10 ans) et fonctionnels, « dont les valeurs pourraient connaître une tendance légèrement haussière car devenue la nouvelle offre premium », selon Damien Voisenet, et les biens vieillissants qui subissent une dévalorisation, car nécessitant beaucoup de travaux pour répondre aux exigences réglementaires. « Cela conduit à la création d’un marché à deux vitesses fortement polarisé », avance Damien Voisenet. Dans ce contexte d’instabilité, l’existant retient l’attention des utilisateurs principalement pour des raisons de chronologie et de disponibilité. La prise de décision se fait dans l’urgence ou à court terme, et seul l’existant peut y répondre. « De manière générale, le fait qu’il n’y ait plus de production neuve rend le parc existant encore plus stable en volume, ce qui doit rassurer le marché », tient à préciser Damien Voisenet.
: « Le neuf est à l’arrêt depuis environ un an et devrait le rester encore pendant de nombreux mois voire de nombreuses années », pronostique Damien Voisenet de Cushman & Wakefield.
Par ailleurs, la location tire son épingle du jeu, car elle offre la souplesse et l’agilité nécessaires aux entreprises. En la matière, l’option du crédit-bail, notamment proposée par Batifranc est un atout : « Les loyers sont déduits du bénéfice imposable. Ni l’immeuble, ni les ressources de financement ne pèsent dans le bilan. Côté financement justement, il se fait sans apport initial et le crédit-bailleur avance également la TVA. Ceci allège de facto le besoin de trésorerie et permet de prioriser l’affectation des fonds propres au financement des autres besoins des entreprises », argumente Hubert Cusenier, directeur général de Batifranc.
Autre marqueur tendanciel, « l’essor des centres de coworking qui attirent de petites entreprises en quête d’économies et d’émulation », évoque Carine Provost. Une tendance s’inscrivant dans un marché des bureaux dijonnais attendu « très en dessous d’une année moyenne ». Le secteur commercial à Dijon s’avère également « hyper dynamique, affichant un taux de vacance très faible, y compris sur les emplacements secondaires ». Enfin, les acteurs notent une amorce de baisse des taux d’intérêt, suggérant qu’une détente, bien que lente, pourrait se profiler.