Exclusif : les bons chiffres de la lutte de l’Urssaf Bourgogne contre le travail dissimulé
Bourgogne. Lionel Matz, directeur de l’Urssaf Bourgogne, a dévoilé l’ampleur du redressement : entre les exercices 2023 et 2024, celui-ci dépasse 24 M€, soit 83% de ce qui avait été redressé entre 2018 et 2022. Et la tendance haussière du premier trimestre 2025 confirme cette progression.

Avec pas moins de 24,31 M€ redressés sur les deux exercices 2023 et 2024, les chiffres de la lutte contre le travail dissimulé (LCTD) en Bourgogne sont « bons », pour autant que l’on puisse se réjouir de voir ainsi dévoilée l’ampleur de la fraude aux cotisations sociales. En deux ans, l’Urssaf Bourgogne aura ainsi redressé 83% des sommes redressées sur cinq ans entre 2018 et 2022 (29,443 M€). Et les premiers chiffres de 2025 font apparaître une tendance encore haussière.
Caractérisé par la volonté manifeste du chef d’entreprise de s’exonérer, partiellement ou totalement, de ses cotisations sociales en minorant ou omettant certaines déclarations ou par le truchement de montages, le travail illégal concerne principalement les entreprises dans les secteurs de la construction (54% des entreprises redressées en 2024 en Bourgogne), des services (35%), suivies de très loin par le commerce (7%) et le secteur de l’hôtellerie-restauration et de l’industrie (2%). « Ces entreprises évoluent dans un cadre propice, analyse Lionel Matz : de l’argent liquide qui circule, de la main-d’oeuvre à niveau de qualification peu important et de forts besoins ponctuels ». Les travailleurs indépendants constituent 34% des entreprises redressées, un chiffre en augmentation (x 2,5 entre 2023 et 2024). Dans le détail, la Côte-d’Or représente presque 2,8 M€ redressés, suivie par la Saône-et-Loire (683.344 €), la Nièvre (465.911 €) et l’Yonne (40.285 €), ce dernier département ayant fait l’objet d’un redressement très conséquent en 2023. À noter enfin un peu plus de 3,4 M€ redressés hors Bourgogne sur des entreprises « immatriculées à dessein dans une autre région », soit un total de 7,4 M€ pour l’Urssaf Bourgogne.
Le taux de recouvrement (les sommes effectivement payées par les fraudeurs) est en hausse (de 6% en 2023 à 22% en 2024), même si le delta entre redressement et recouvrement demeure important, en raison, par exemple, de l’organisation d’insolvabilité : un travailleur indépendant qui a fraudé sur le montant de son assiette de cotisation, aura, par exemple, mis ses biens au nom d’autres personnes pour les protéger de la saisie... D’autres entreprises essaient de se jouer des déclarations administratives et pratiquent le « faux détachement » pour permettre à des travailleurs étrangers de travailler sur le sol français en étant taxés sur les bases de leur pays d’origine, bien souvent plus « avantageuses » du point de vue de l’employeur... jusqu’à ce qu’il soit dans le viseur des inspecteurs. Sans oublier que la révélation d’une fraude fait tomber l’intégralité des exonérations légales dont aurait pu bénéficier l’entreprise. Un redressement finit donc par coûter cher...
Garant de notre modèle social

Renforcé en moyens l’année dernière, portant le service dédié à la LCTD à huit agents à plein temps (dont sept inspecteurs spécialisés) en plus des 25 inspecteurs du recouvrement, l’Urssaf Bourgogne se présente comme « le banquier de la sécurité sociale », martèle Lionel Matz. La fraude aux cotisations sociales est en effet autant de manque à gagner pour l’organisme national de protection sociale (remboursement des soins médicaux, indemnités, paiement des retraites de base et des allocations familiales des bénéficiaires du régime général de la Sécurité sociale), un régime unique au monde. Mais ce n’est pas tout... « Au-delà du recouvrement, le redressement met fin à une situation illégale, tranche Lionel Matz. Il est en cela une préservation de notre modèle social, une préservation des droits du salarié et le garant d’une concurrence saine et loyale entre les entreprises ». Or en 2024 en France, 1,6 Md € a été redressé... alors que le Haut Conseil au financement de la protection sociale estime à 10 Mds € l’ampleur de la fraude sociale en France.