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Feu vert donné à la première station hydrogène de Dijon

Environnement. Du 25 au 27 juin, Dijon Métropole accueillait la 11e édition des journées hydrogène dans les territoires. L’occasion pour la collectivité, qui a fait le pari de développer une filière complète d’hydrogène vert en circuit court, d’inaugurer, la veille de la manifestation, sa première station de production et de distribution dédiée à ce gaz.

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  • Photo de Marie-Guite Dufay, Marion Deridder Blondel, Dominique Darne et François Rebsamen
    Marie-Guite Dufay, présidente de la région BFC, Marion Deridder Blondel, présidente d’Engie Solutions hydrogène, Dominique Darne, président d’Inthy et François Rebsamen, président de Dijon Métropole et maire de la ville donnent le coup d’envoi à la première station de production et de distribution d’hydrogène vert de la métropole. (Crédit : JDP)
  • Photo d'un bus à hydrogène
    (Crédit : JDP)
  • Marie-Photo de Guite Dufay, Marion Deridder Blondel, Dominique Darne et François Rebsamen
    (Crédit : JDP)
  • Photo d'une benne à ordures ménagères
    (Crédit : JDP)

Depuis dix ans, les Journées hydrogène dans les territoires (JH2T) rassemblent les acteurs de la filière et tous les partenaires qui souhaitent s’informer ou engager une démarche hydrogène. Après les éditions récentes de Rouen en 2022 et Pau en 2023, c’était au tour de Dijon Métropole et de la région Bourgogne Franche-Comté d’être retenue par France Hydrogène pour l’organisation de cette onzième édition qui a accueilli près de 800 congressistes sur trois jours.

La veille de l’ouverture, le lundi 24 juin, Dijon Métropole inaugurait sa première station de production, de stockage et de distribution d’hydrogène vert située au nord de Dijon en face de l’Unité de valorisation énergétique (UVE) qui traite les déchets ménagers de 92 % de la population de la Côte-d’Or. Un emplacement qui ne doit rien au hasard puisque la métropole prévoit à terme la production locale d’hydrogène vert en circuit court, alimentée en électricité verte, via la combustion des déchets (la turbine de l’UVE produit 37 GWh d’électricité et 140 GWh de chaleur chaque année).

Cette station est également située non loin de la centrale photovoltaïque de 17 hectares construite sur le site de l’ancienne décharge de la ville. Là encore, source potentielle d’une électricité décarbonée pour alimenter les électrolyseurs du site de production chargés de séparer l’hydrogène et l’oxygène de l’eau. « La mise en service de cette station constitue la première étape d’un projet pionnier en France de 100 M€ qui repose sur un modèle d’économie circulaire, affirme François Rebsamen, président de Dijon Métropole et maire de la ville. Avec ce projet, Dijon poursuit sa politique ambitieuse de décarbonation du territoire, après avoir déjà réduit de 23 % ses émissions de gaz à effet de serre entre 2010 et 2020 et construit un système énergétique d’avenir qui renforce l’indépendance de notre territoire, tout en réduisant les émissions CO2 ».

Vers un modèle d’économie locale et circulaire

Opérationnelle, la station est en mesure d’alimenter en hydrogène vert les quatre bennes à ordures ménagères fonctionnant avec ce gaz, déjà en circulation dans la ville. Quatre autres bennes sont attendues pour 2026 afin d’atteindre 22 bennes en 2035, soit la moitié du parc actuel. Côté bus, après la faillite de la société belge Van Hool qui avait contractualisé avec la métropole, cette dernière est contrainte de relancer un nouvel appel d’offres. Les sociétés Solaris, Mercedes et le portugais CaetanoBus font partie des principaux constructeurs cités par François Rebsamen.

Dijon Métropole espère toujours compter sur 38 bus hydrogène pour 2026 et entre 50 à 60 en 2035. Ainsi, à cette date, la totalité de sa flotte de bus et 73 % des bennes devraient circuler à l’énergie décarbonée, avec des véhicules à hydrogène ou électriques. « La station permet de réduire de 1 200 tonnes par an les émissions de CO2, soit l’équivalent de 10 M de kilomètres en voitures citadines. Il s’agit du premier projet hydrogène français qui intègre un parc aussi important de véhicules lourds d’une collectivité », appuie l’édile.

Même si à l’heure de cette inauguration en grande pompe, la production d’hydrogène n’a rien de locale, ni de circuit court, selon la collectivité : « l’ambition et la volonté d’innovation pour développer une offre locale alternative aux énergies fossiles restent prégnantes ». En attendant le raccordement à l’UVE et au parc photovoltaïque, l’hydrogène, garanti 100 % vert par des certificats d’origine, provient actuellement du réseau Enedis.

« Face à l’urgence climatique, nous avons fait le choix de mettre en service la station avant même que notre modèle circulaire soit pleinement opérationnel. Nous sommes sur une filière nouvelle qui se construit au fur et à mesure des avancées scientifiques et technologiques et qui nécessite encore quelques ajustements. Nous avons ainsi connu des difficultés de corrosion avec les membranes des électrolyseurs McPhy (l’entreprise originaire de l’Isère vient d’inaugurer à Belfort une gigafactory d’électrolyseurs, ndlr), mais aujourd’hui, de nouvelles solutions techniques ont permis de résoudre ces problèmes. Les choses avancent dans le bon sens même si ça peut paraître parfois long, d’où cette inauguration aujourd’hui, pour montrer qu’on avance, que nous sommes dans le concret ». Dijon Métropole s’est engagée à tendre vers l’objectif d’une métropole climatiquement neutre en 2050 avec comme palier intermédiaire : -40 % des émissions de gaz à effet de serre et -30 % de la consommation d’énergies fossiles d’ici à 2030.

100 M€, deux stations et une alliance

Pour remporter ce pari, la collectivité a notamment conçu une alliance d’acteurs publics privés inédite et la création d’une co-entreprise baptisée Dijon métropole Smart EnergHy (DMSE), détenue par Engie Solutions (40,55 %), Inthy (25,22 %), Dijon métropole (24,23 %) et Ademe Investissement (10 %). DMSE porte les investissements de l’infrastructure hydrogène, c’est-à-dire la station de production et de distribution, et se rémunère en fournissant de l’hydrogène vert aux véhicules.

En complément et de manière indissociable pour permettre l’émergence d’un modèle économique vertueux, Dijon métropole porte les investissements liés aux véhicules à hydrogène et aux aménagements des ateliers. « L’alliance de la collectivité avec des acteurs institutionnels et industriels de premier plan permet d’installer une filière hydrogène pérenne », défend François Rebsamen. Concernant le volet opérationnel, Inthy, filiale à 100 % d’EDF, spécialiste d’infrastructures de production et de distribution d’énergies renouvelables, est le maître d’oeuvre de la station Nord et assure la mission d’assistant maître d’ouvrage au sein de DMSE pour la gestion du site. Engie assure l’exploitation, l’entretien et le suivi de la performance de cette première station d’hydrogène vert de Dijon. Une seconde station d’hydrogène vert, située au sud de Dijon, à côté du site de maintenance de bus et de tramway, doit également voir le jour en 2026.

Côté chiffres, sur les 100 M€ projetés, 30 % sont dédiés à la construction des deux stations d’hydrogène et 70 % pour le renouvellement des bennes et des bus à hydrogène. À juin de cette année, les subventions totales mobilisées sur le projet représentent plus de 24 M€, dont 13,6 M€ pour la construction des deux stations. Ces aides sont portées par : l’Ademe (11,6 M€, dont 4 M€ pour les stations, 1,5 M€ pour les bennes et 6,1 M€ pour les bus), la région BFC (2,6 M€ pour les stations), l’Union européenne (9 M€, dont 7 M€ pour les stations et 2 M€ pour les bus), la Banque des Territoires (prêts à hauteur de 7 M€ pour les deux stations) et la Banque européenne d’investissement pour l’acquisition des bus.