« France 2030 révèle les territoires »
France. 54 Mds € d’ici à 2030 pour rattraper le retard industriel de la France, investir dans les technologies innovantes et soutenir la transition écologique : le plan d’investissement France 2030 est en marche mais manque encore de candidats. Rencontre avec Bruno Bonnell, secrétaire général pour l’investissement au service du Premier ministre.

Quel bilan tirez-vous du plan d’investissement France 2030 ?
Bruno Bonnell.Sur le plan initial de 54 Mds € à trois ans, nous en avons engagé 40 dans 100 % des départements français. 55 % de cette somme s’est destiné à des PME, 20 % à de grandes entreprises, le reste concerne des centres de recherche. France 2030 a également consacré 1,3 Mds € à la formation avec 160 nouveaux centres qui ont conduit à la création de 200.000 places ouvrées, mais l’objectif est d’atteindre un million de places d’ici 2030.
Comment se positionne la Bourgogne Franche-Comté face au plan d’investissement France 2030 ?
La région a reçu 550 M€ de soutien et le tissu représente celui de la France avec 48 % de PME, 16 % de grandes entreprises et 13 % d’établissements publics. Les financements concernent 263 projets, dont 59 en Côte-d’Or, 81 dans le Doubs ou encore 41 en Saône-et-Loire. Dans la région, nous n’avons connu aucune défection, aucune entreprise n’affiche de décalage ou d’arrêt. La Bourgogne-Franche-Comté fait par ailleurs partie des territoires inattendus dans le sens où on ne pense pas spontanément à Besançon pour réaliser de l’assemblage de composants microscopiques mais plutôt à Taïwan notamment. Cet exemple prouve que France 2030 révèle les territoires. La Bourgogne-Franche-Comté est petite par rapport à d’autres régions comme la Nouvelle-Aquitaine ou Auvergne-Rhône-Alpes, mais, en visite à Besançon, j’y ai constaté une dynamique qui s’y installe assez bluffante. Pendant ma venue, j’ai aussi été épaté par l’école de micromécanique ou le travail en oncologie du CHU voisin. À Dijon, c’est le travail sur les sciences de la vie qui m’a marqué. Je pourrai aussi évoquer le projet de construction alliant le lin et le chanvre. On ne lance pas une fusée sur la Lune tous les jours, mais si on fait du bien à la planète et que l’on crée de l’emploi, la mission est accomplie. En Bourgogne-Franche-Comté, il y a le pragmatisme de l’innovation. J’ai toutefois regretté cette opposition entre la Bourgogne et la Franche-Comté. C’est une situation que l’on retrouve dans d’autres régions mais certains dossiers nécessitent d’avoir une taille critique et donc des collaborations entre les territoires de la région. Quand on s’unit, ça marche tandis que nos déchirements nous affaiblissent. Et puis, le vin et le fromage s’accordent plutôt bien.
Qu’en est-il des projets liés à l’hydrogène ?
Les projets associés à l’hydrogène connaissent un décalage pour cause d’usage. Les évolutions sont plus lentes car Airbus a reporté son projet d’avion à hydrogène et Alstom, ses trains à hydrogène. Pour autant, ils ne sont pas remis en question. Nous ne laissons pas tomber l’hydrogène, mais puisque les usages se révèlent plus lents, nous lissons les investissements au-delà de 2030.
Peut-on déjà mesurer les résultats du plan ?
Il est encore trop tôt. Il faut cinq ans pour construire une usine et dix ans pour les programmes de recherche. Au début, les candidatures des territoires restaient rares mais nous avons convaincu les entreprises d’oser et cela a payé car nous avons reçu 7.500 projets. Nous avons mobilisé les talents et les capitaux pour parier sur des projets. France 2030 permet de « dérisquer » les investissements privés et de fixer un cap pour plusieurs années.
réer une usine, c’est bien, mais trouver les compétences pour y travailler, c’est mieux...

Au niveau national, on estime que France 2030 a directement créé 110.000 postes tandis que les projections visent un taux d’emploi annuel de 300.000 personnes, notamment grâce à de nouveaux secteurs. Les centres de formation créés viennent s’ajouter aux formations existantes pour trouver les compétences. Je crois que ce sera d’ailleurs un élément d’attractivité différenciateur pour la France à l’international de montrer que nous avons les hommes et les femmes formés. Pour maintenir les talents français sur le territoire, France 2030 peut aider à la création d’entreprise en France et ainsi encourager l’emploi local.
Comment articuler les besoins de financement de l’innovation et de la réindustrialisation en région avec les impératifs de restriction budgétaire de l’État ?
La dette, c’est comme le cholestérol, il y a le bon et le mauvais ! Un État comme une entreprise peuvent avoir une bonne dette pour financer les investissements de demain car cela implique des profits qui en découleront. Le budget de France 2030, fixé début 2022 pour une durée minimum de cinq ans - mais d’expérience, je sais que cela pourra durer le double puisqu’il faut trouver les projets - ne sera pas remis en cause.
Quelles sont les prochaines attentes du plan France 2030 ?
Les appels sont toujours ouverts et des dossiers sont en instruction mais pas encore assez. Nous allons également lancer un nouvel appel, « Pionniers de l’IA », autour de l’application de l’intelligence artificielle dans les process industriels ou la vie des entreprises. C’est une chance de proposer des choses intelligentes, d’améliorer notre compétitivité. C’est une opportunité à saisir pour les entreprises.