« Il faut sauver les entreprises pour sauver l’économie »
Entreprises. Si l’avalanche de défaillances annoncée au début de la crise sanitaire n’a finalement pas eu lieu, les professionnels de la prévention et du traitement des défaillances des entreprises alertent sur l’importance de la prévention auprès des chefs d’entreprise.
« On nous avait annoncé un mur de dépôts de bilan qui n’a jamais eu lieu et qui n’aura pas lieu », assure Jean-Joachim Bissieux, mandataire judiciaire à Dijon. Une situation qui trouve son explication dans l’ensemble des mesures mises en place par l’État pour subvenir aux besoins des entreprises et les protéger.
« En fait, on se rend compte que la phase de prévention, essentielle dans le traitement des défaillances des entreprises, a été prise en charge par l’État, à travers les aides, l’activité partielle, les prêts garantis par l’État, les instructions auprès des Urssaf et de la DGFiP pour accorder des moratoires... Tout cela est complètement sorti des tribunaux, ce qui fait que nous n’avons plus aucune visibilité sur tout ce qui est prévention notamment », confie Véronique Thiebaut, mandataire judiciaire à Dijon.
Pour Thibaud Poinsard, lui aussi mandataire judiciaire, « la difficulté que cela risque d’engendrer, c’est qu’avec toutes ces aides, les entreprises qui viendront nous voir dans six mois à un an arriveront dans des situations beaucoup plus dégradées parce qu’elles auront beaucoup plus d’endettemment... ce qui fait qu’il nous sera plus compliqué de sauver ces entreprises ».
Renforcer la prévention
« Pour cela, l’Urssaf est un bon tempo, affirme Marlène Loiseau, administratrice judiciaire. Entre les période de gel des remboursements des prêts et le gel des cotisations, on peut très bien imaginer que le déclencheur sera la reprise des paiements. Une échéance qui se retrouve continuellement reportée ».
Les quatre professionnels de la prévention et du traitement des défaillances s’accordent à dire que le risque est de voir les entreprises arriver en procédures collectives dans un état davantage dégradé, fermant les portes à certaines procédures. Face à ce constat, ils rappellent l’importance de la prévention.
« Le meilleur conseil et la meilleure entrée reste le président du tribunal de commerce. Il connaît toutes les procédures, il peut faire un premier diagnostic, c’est gratuit et confidentiel ! Il n’y a donc aucun danger pour le chef d’entreprise à pousser les portes du tribunal », confirme Marlène Loiseau, complétée par Véronique Thiebaut : « La profession des administrateurs et mandataires judiciaires propose aussi des diagnostics gratuits. Nous avons des outils très efficaces mais aussi malheureusement très méconnus ».
De nouvelles réformes
Si beaucoup de questions peuvent planer sur les modalités de remboursement des PGE, un arrêté du 8 juillet prévoit qu’en cas de procédure judiciaire, la garantie de l’État reste acquise. « Cela signifie qu’on peut imposer des délais en sauvegarde ou en redressement sur dix ans et en conciliation sur 15 ans et plus, selon la durée du contrat », détaille Thibaud Poinsard. Ces deux dernières procédures viennent d’ailleurs elles aussi de connaître une réforme, puisqu’à compter du 1er octobre, le chef d’entreprise, qu’il soit en sauvegarde ou en redressement judiciaire est maintenant protégé quant à ses cautions.