L’atelier de lutherie au diapason
Yonne. Coline Mauley et Denis Morana réparent et fabriquent des instruments du quatuor, violons, alto, violoncelle et contrebasse. Les luthiers auxerrois redonnent vie à des instruments, parfois centenaires, avec patience et exigence.

À une époque où tout semble voué à l’obsolescence, eux réparent l’irréparable. Violons, altos, violoncelles — instruments centenaires qui renaissent entre leurs mains. « Un instrument ancien, on peut le restaurer à l’infini. Il suffit de ramollir la colle à l’eau, sans abîmer le bois. C’est pour ça qu’un violoncelle peut durer 400 ans », explique Coline Mauley, luthière depuis plus de quinze ans.
Coline Maulay et Denis Morana sont violoncellistes de formation, artisans par vocation. Ensemble, ils ont fondé en 2008 un atelier qui conjugue avec finesse, restauration, fabrication, vente et entretien d’instruments à cordes. « On est installés ici depuis 2012, mais on a commencé en 2008, dans un autre local », précise Denis Morana. Leur modèle repose sur une rare polyvalence : 80 % de leur activité concerne la restauration d’instruments anciens. Ils les achètent, souvent en mauvais état, les restaurent, et les remettent sur le marché. « On ne fait quasiment pas de dépôt-vente. Si on vend un instrument, c’est qu’on s’en est occupé nous-mêmes », insiste Coline Maulay.
Un savoir-faire à l’unisson
Mais l’atelier est aussi un lieu de création. « J’ai un alto là, Denis a un violon sur le portant… Et je travaille sur un violoncelle destiné à un musicien professionnel », détaille Coline Maulay. Leurs instruments neufs, haut de gamme, sont vendus entre 8.000 et 20.000 €. « Quand on fabrique un instrument, tout compte : la qualité du bois, le soin apporté à chaque étape. Et ça s’entend dans le son », souligne Denis. Un violon leur demande un mois et demi de travail, un violoncelle, le double. En 2022, Coline a présenté l’un de ses violoncelles à un concours organisé par la Philharmonie de Paris. Elle a été finaliste et en est sortie avec la quatrième place dans un concours international. « Il y avait une première sélection sur la lutherie, puis des écoutes à l’aveugle. C’était un bon concours. L’instrument a été vendu juste après », annonce-t-elle.
Malgré les incertitudes du marché, l’atelier réalise un chiffre d’affaires compris entre 100.000 et 120.000 € par an, selon les années. Un équilibre fragile, mais précieux. Dans l’Yonne, ils ne sont plus que quatre ateliers de lutherie mais les seuls à savoir restaurer les archets. « On a une clientèle sur tout le département, et même au-delà. On est clairement l’atelier le plus actif dans l’Yonne », estime Denis Morana. L’offre s’étend des instruments anciens aux modèles d’étude chinois, rigoureusement sélectionnés, en passant par la location pour enfants, indispensable dans un marché où un violoncelle d’entrée de gamme peut coûter 5.500 €. « On ne vend quasiment pas de violons chinois, parce qu’on trouve de très bons anciens à 1.000 € », ajoute-t-il.