Le bâtiment, une filière d’avenir, oui mais…
BTP. À Meursault, Olivier Salleron, président de la Fédération Française du bâtiment (FFB), est venu porter les propositions pour une relance rapide et solide de la filière.
C’est en capitaine d’un navire qui pèse 1,5 million d’emplois en France qu’Oliver Salleron, président de la Fédération Française du bâtiment (FFB), et Eric Jouve, son délégué général, sont venus à Meursault le 1er juillet. Dans leur escarcelle, des constats, des inquiétudes mais aussi de nombreuses propositions qu’ils avaient soumises la veille aux ministres Bruno Le Maire (économie), Emmanuelle Wargon (logement) et Élisabeth Borne (travail), avec un objectif : consolider les entreprises du secteur. « Nos entreprises ne font que peu de marges. Du fait, elles sont fragilisées à la moindre crise et celle de la Covid a mis en avant de nombreuses difficultés pour lesquelles nous appelons l’État à réagir. » Si le secteur de la construction individuelle résiste (+ 4,7 % de mise en chantier, + 15,4 % de permis), il est cependant le seul à porter cette croissance : le logement collectif voit une chute de 10 % du nombre de permis et les ventes et mise en vente par les promoteurs ont respectivement baissé de 3,9 % et 9,4 %. Au global, par rapport aux trois premiers mois de 2019, les surfaces s’effondrent en moyenne de 18,5 %.
Changer l’image et développer l’emploi
Malgré cela, l’emploi se renforce (+ 48.100 postes sur le premier semestre 2021) et le vrai problème est de trouver de la main d’œuvre qualifiée. Même si 450.000 personnes sont inscrites à Pôle Emploi dans la filière bâtiment : « Un tiers pense savoir bricoler, un tiers se dit que ça ou autre chose… et le dernier tiers reste du personnel qualifié que nous devons former à nos métiers. » Outre la proposition d’un guichet unique dédié aux métiers du bâtiment et notamment au développement de l’apprentissage, la FFB lancera très prochainement sur les chaînes de télévision une grande campagne de promotion : « On a toujours une image faussée de nos métiers. Ce n’est pas le type à côté de sa bétonnière : nous avons des métiers de pointe, des ingénieurs, des techniciens et le bâtiment est un secteur d’avenir ! ».
Une mobilisation générale
D’avenir, oui, mais sous certaines conditions : réguler le marché en luttant contre les offres basses, les sous-traitances en cascade et le dumping économique. Derrière ces demandes, Olivier Salleron cible le travail dissimulé pour lequel il attend « plus de contrôles, aucune tolérance. La FFB a mis en place la carte professionnelle du bâtiment et elle sera bientôt dématérialisée. » Autre condition, une meilleure mobilisation des Fonds européens. Si Bernard Laborey, le président de la FFB Bourgogne Franche-Comté souligne « le travail main dans la main avec la région BFC », Olivier Salleron appelle les régions à mobiliser les enveloppes européennes (18,4 milliards d’euros) et du Plan de relance (trois milliards d’euros) sur la rénovation, et notamment du patrimoine historique. Dernière condition, plus polémique, celle de l’artificialisation des sols. Si Bernard Laborey reconnait que « la filière du bâtiment prend considérablement en compte les paramètres environnementaux dans les nouvelles techniques de construction ou de rénovation », la FFB de son côté milite pour un état des lieux à l’échelle locale de l’artificialisation et ne pas céder au « Totem de la zéro artificialisation des sols » pour ne pas pénaliser le développement entrepreneurial, pour lequel elle appelle d’ailleurs à « faciliter et encadrer la création ou la reprise d’entreprises » notamment par un soutien fort des régions : avec un tiers des dirigeants âgés de plus de 50 ans, 100.000 entreprises devront changer de mains d’ici 2030.
Un marché mondial en pleine tension
Alors, si Olivier Salleron se montre optimiste quant à l’avenir des métiers du bâtiment et sur la capacité de ses entreprises à se renouveler et s’adapter, une inconnue de poids pèse dans la balance : la crise de la Covid. Avec une flambée des cours des matériaux, mais aussi une pénurie à l’échelle mondiale, « certaines entreprises préfèrent mettre leurs chantiers en suspens ou simplement les annuler, compte-tenu que les pénalités sont moins importantes que le surcoût ». En attendant une perspective de sortie de crise début 2022 - « Si de nouvelles mesures sanitaires ne viennent pas rallonger le calendrier » - la FFB demande à l’État de s’engager : prise en charge du chômage partiel à hauteur de 100 % du salaire, mise en place d’un crédit d’impôt proportionnel au poste « achats de matériaux » et le gel des pénalités de retard sur tous les marchés privés et publics. Et plus technique, le mode de calcul de la déduction forfaitaire spécifique pour frais professionnels (DFS) modifié par le Projet de financement de la Sécurité sociale et qualifié « d’usine à gaz » et qui, selon Olivier Salleron, va inciter les entreprises à y renoncer et lourdement peser sur les salaires nets du secteur.
Au final, le président de la FFB est venu porter un message d’espoir : les métiers du bâtiment vont contribuer à sortir de la crise, mais il faut pour cela que l’État s’engage fermement dans cette relance.