Le groupe Bordet passe à l’échelle
Région BFC. Le Côte-d’Orien est lauréat de la 7e vague du dispositif « Première Usine » de France 2030. Il recevra jusqu’à 14,1 M€ d’aides Bpifrance, d’ici à 2027, pour son projet de construction dans la Nièvre d’une usine de production, sur 13 hectares, de carbone végétal et de biohuiles.

Tout nouveau lauréat du dispositif « Première Usine » de France 2030 pour son projet Pyroboil 4.0, le groupe Bordet (6,4 M€ de chiffre d’affaires en 2024 pour une cinquantaine de salariés), pionnier de la production de charbon végétal depuis 165 ans, membre des pôles de compétitivité Vitagora et Xylofutur, mène depuis de nombreuses années des programmes de recherche et développement qui l’ont conduit notamment à mettre au point un charbon « vertueux » Carboépuré (R), engagé dans la production en circuit fermé et engendrant un faible impact sur l’environnement. En 2021, le groupe lançait également sur le marché le premier charbon de bois bio. Derrière ce label, une méthode de fabrication unique, à base de bois produit en France (dans un rayon inférieur à 100 kilomètres), s’appuyant sur la réintégration des jus de pyrolyse et des gaz dans les circuits pour ne rejeter que de la vapeur d’eau dans l’atmosphère : « Nous avons travaillé très dur pour obtenir cette certification et c’est vraiment une très grande fierté », expliquait en octobre 2021, au Journal du Palais, Cyril Flores président du groupe Bordet.
Plus de 14 M€ de financement
Cette production à haute performance environnementale permet à Bordet de produire des charbons purs à 90 % et d’une grande stabilité dans le temps. Des qualités qui font de ce produit une ressource à fort potentiel pour des usages humains et environnementaux : pharmacie, cosmétique, alimentaire, industrie, agriculture…

Outre l’aspect environnemental, cette innovation a surtout permis au groupe Bordet de coopérer à des projets internationaux grâce notamment à un acteur majeur de la distribution d’extraits végétaux, Exinnov. Un marché évalué à 1,5 million de tonnes, dont 43 % est issu du charbon végétal et dont la majeure partie est produite en Asie. « Notre objectif est de travailler à des projets stratégiques qui s’inscrivent dans le cadre d’une décarbonisation durable, défend Cyril Flores. Notre ambition est de trouver de nouveaux débouchés : produits qui intégreront le charbon végétal en remplacement de ressources à plus faible qualité environnementale, d’innover sur nos processus, sur les produits existants et ceux à venir en lien avec nos programmes et partenaires de R&D ». C’est dans cette perspective qu’est né, en 2022, le projet Pyroboil 4.0, qui vient d’être choisi comme lauréat de la 7e édition de l’appel à projets « Première Usine ». Ce dispositif s’inscrit dans la dynamique de reconquête industrielle engagée par l’État avec le plan France 2030 et la stratégie « Start-ups industrielles », qui vise à convertir l’excellence de la recherche et de l’entrepreneuriat français en réussites industrielles et productives.
Une usine sur 13 ha à Decize
Pour le Côte-d’Orien, installé à Leuglay, cela se traduira par la construction dans la Nièvre, à Decize, sur la ZAC du Four à Chaux, d’une usine de production de carbone végétal à grande échelle destinée à remplacer les matières fossiles dans divers secteurs industriels. Grâce à un procédé de pyrolyse à faible empreinte environnementale, l’usine produira également des biohuiles pyrolytiques et des charbons actifs, offrant des solutions biosourcées innovantes pour les industries de la chimie et de la cimenterie. Le futur site du groupe Bordet devrait permettre à l’entreprise de passer à l’échelle avec une production attendue de 15.000 tonnes contre 4.000 tonnes aujourd’hui. « Ce gain de productivité a été pensé pour n’avoir qu’un faible impact en termes d’artificialisation des sols, puisque nous passons de 8 à 13 hectares de surface au sol en dupliquant notre modèle industriel de Leuglay, autonome en énergie grâce à la présence d’une unité de cogénération depuis 1970 », appuie Cyril Flores. L’aide du dispositif « Première Usine », d’un montant maximal de 14,1 M€ - sur budget global associant plusieurs partenaires acteurs de la filière, non dévoilé à ce jour - assurera la continuité du projet jusqu’en 2027, pour un démarrage de l’activité estimé au premier trimestre 2027. « Pyroboil 4.0 répondra aux objectifs de santé et décarbonation visés par la France notamment en matière de substitution de matière fossile, de séquestration de carbone dans le béton, de déploiement de solutions de charbon actif végétal pour le développement des supercondensateurs, offrant une alternative plus durable aux batteries lithium-io, de purification de l’eau et de dépollution des biogaz par du charbon actif ». L’installation nivernaise associera à la production de charbon végétal celle de biohuiles, ce qui sera une première sur un même site. Ces biohuiles pourront être intégrées dans la composition de revêtements de sol et de bitume ou servir de biocarburants pour décarboner le maritime et l’aviation. Le groupe Bordet, qui connaît depuis plusieurs années une croissance de 30 % par an de son chiffre d’affaires, devrait franchir un cap supplémentaire à la mise en route de cette nouvelle usine. Celui-ci s’accompagnera de la création de 30 à 40 nouveaux postes et devrait également permettre de pérenniser la filière bois local avec la signature de contrats longs et l’utilisation de déchets, de bois abîmés ou d’éléments de bois comme les « têtes » de chênes difficilement commercialisables dans les filières classiques de valorisation.