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Les microbes : champions de la résolution des défis de demain

Santé. Doté de 14 M€ sur dix ans, le projet Harmi, qui vise à mieux étudier l’activité des microbes pour faire face aux grands enjeux mondiaux, rassemble plus de 250 chercheurs issus de l’université de Bourgogne, de l’université de Franche-Comté, de l’Institut Agro Dijon, des organismes nationaux de recherche avec l’Inrae et le CNRS, des CHU de Besançon et de Dijon Bourgogne ainsi que des entreprises locales. Un premier appel à projets vient d’être lancé avec une enveloppe de plus d’1M€.

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Photo de Franck Robine, Laurent Philippot et Lamine Boubakar
Franck Robine, préfet de la région BFC et de Côte-d’Or, Laurent Philippot, coordinateur du projet Harmi et Lamine Boubakar, administrateur provisoire de l’UBFC. (Crédit : JDP)

En décembre 2021, l’UBFC remportait l’appel à projets national « ExcellenceS », riche d’une enveloppe de 14 M€, pour son projet Baptisé Harmi, acronyme anglais de « Harnessing microbiomes for sustainable development » soit littéralement : « exploiter les microbiomes pour le développement durable ». Depuis, L’Université de Bourgogne a décidé de sortir de L’UBFC et en janvier 2025, l’Établissement public expérimental (EPE) « Université de Bourgogne Europe » sera officiellement mis en place avec dix partenaires.

De même, en début d’année prochaine l’UBFC devient également un EPE. « Dans ce contexte en pleine évolution, il était important pour nous de maintenir au plus haut notre volonté d’accompagner des projets comme Harmi, tant ils sont structurants pour la région BFC, précise le professeur Lamine Boubakar, nommé en juin administrateur provisoire de la Comue UBFC, avec l’intégralité des pouvoirs attachés à la fonction de président. Nous avons ainsi monté une convention territoriale des établissements regroupant toutes les parties prenantes du projet Harmi au sein d’une gouvernance commune ».

Voulu comme un centre scientifique d’excellence international, Harmi rassemble plus de 250 chercheurs issus de laboratoires universitaires principalement de l’université de Bourgogne, de l’université de Franche-Comté et d’Agro Dijon, des organismes nationaux de recherche avec l’Inrae et le CNRS, et des CHU de Besançon et de Dijon ainsi que des entreprises locales. Coordonné par Laurent Philippot, microbiologiste et directeur de Recherche Inrae au sein du laboratoire « Agroécologie », Harmi doit permettre de mieux comprendre les microbes et leurs interactions avec d’autres organismes vivants et de mieux les utiliser pour faire face aux problématiques mondiales actuelles. En effet, les microbes constituent la forme première et prédominante de vie sur Terre.

De par leur implication dans de très nombreux processus biologiques et environnementaux, les microbes participent à la constitution et au fonctionnement de tous nos écosystèmes et de leurs composantes (sols, milieux aquatiques et zones humides, corps humains et animaux...). Ainsi, ils jouent un rôle clé dans la disponibilité des éléments nutritifs pour les végétaux, dans la transformation et la conservation des aliments (par exemple, lors de la fermentation : bière, yaourt, vin, charcuterie, fromage...), dans la santé humaine (certains microbes sont pathogènes pour l’homme et peuvent résister à la plupart des antibiotiques pour donner des infections très difficiles à traiter) et animale mais aussi dans la biodégradation ou décontamination de toutes sortes de contaminants issus d’activités industrielles, domestiques, agricoles, pharmaceutiques (hydrocarbures, métaux lourds, pesticides...). Ils contribuent également aux émissions de gaz à effet de serre, tout en pouvant intervenir dans leur atténuation. Les microbes sont des agents essentiels à la santé planétaire et aussi et surtout, à sa durabilité.

Casser les murs pour viser l’interdisciplinarité

De l’écologie à la science des sols, en passant par la médecine, la génétique et la paléontologie, le projet couvre un large panel de domaines scientifiques. « Au-delà de cette pluridisciplinarité, se trouve la volonté de porter l’impact de la recherche universitaire à un niveau supérieur via la création de ponts solides entre formation, recherche et industrie. Le projet ambitionne également de générer des retombées socio-économiques directes et positives sur le territoire de Bourgogne Franche-Comté, en développant son attractivité et en positionnant la région au rang d’experte dans des domaines de pointe comme celui promu par Harmi », affirme Laurent Philippot. « Nous avons en Bourgogne Franche-Comté un tissu de chercheurs excellent, notamment sur les questions d’alimentation et de santé, défend Franck Robine préfet de région et de la Côte-d’Or. Avec Harmi et sa promesse de faire émerger des technologies de rupture nous avons de quoi placer la France au plus au niveau international. J’en veux pour preuve le fait que les équipes régionales d’Harmi ont été récemment rejointes par des canadiens : Ici, c’est l’avenir de l’homme que l’on dessine ».

« Harmi doit donc être un élément unificateur pour une transformation rapide et tangible de la recherche en permettant aux chercheurs du site de Bourgogne Franche-Comté de collaborer entre disciplines et institutions pour libérer le potentiel inexploité des plus petits organismes afin de résoudre certains de nos plus grands défis. La force de notre projet est de réunir sur un même site trois axes de recherche en microbiologie : alimentaire, médicale et environnementale. C’est quelque chose que l’on ne retrouve pas ailleurs à l’étranger. Avec Harmi, l’idée c’est de casser les barrières », appuie Laurent Philippot.

Jeudi 5 septembre, tout l’environnement d’Harmi avait rendez-vous à Dole pour une entrée dans le vif du sujet avec le lancement du premier appel à projets dôté d’une enveloppe de 1,022 M€ articulée autour de quatre axes : comprendre l’écologie et la dynamique spatio-temporelle des communautés microbiennes, déchiffrer les interactions microbiote-hôte, gérer les communautés microbiennes pour améliorer la durabilité et la fourniture de services et développer les biotechnologies microbiennes. « Les laboratoires ont jusqu’à janvier pour y répondre, le temps de créer des partenariats et de nouvelles synergies », précise Laurent Philippot évoquant également le lien indispensable avec les entreprises « pour permettre d’aller jusqu’à l’appliquer. Notre objectif est de devenir la “silicon valley” de la microbiologie en Bourgogne Franche-Comté ».

Dole : capitale de la recherche microbienne

Fidèle aux valeurs du savant dolois, Louis Pasteur, la ville de Dole s’est associée au projet Harmi. Une convention a ainsi été passée entre la ville du père de la microbiologie, et ce centre scientifique d’excellence international pour l’accompagnement de ses projets de recherche. Dole a notamment proposé d’accueillir chaque année la journée de restitution des travaux scientifiques de l’ensemble de ces chercheurs. « À l’image de Louis Pasteur, connu pour ses travaux sur les vaccins mais aussi dans l’alimentation, l’agriculture, l’élevage... cet extraordinaire projet de recherche qui encourage les chercheurs à travailler ensemble va contribuer à renforce la place de Dole », avance Jean-Baptiste Gagnoux, maire de Dole, vice-président du conseil départemental du Jura et président de l’EPCC Terre de Louis-Pasteur.