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Marché de l’immobilier : résilient face à la crise

Immobilier. « La forte reprise de l’économie qui a suivi la pire récession enregistrée en France depuis la Seconde Guerre mondiale n’a pas été uniforme sur tout le territoire national. » C’est ce qui ressort de l’édition 2021 du Baromètre de l’attractivité des métropoles françaises Arthur Loyd publié le 29 novembre dernier.

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À cette disparité marquée entre la région parisienne et les métropoles de province, s’ajoutent des différences de résultats entre les trois typologies d’activités en immobilier d’entreprise : les bureaux, les commerces, les locaux d’activités et les entrepôts. En région Bourgogne Franche-Comté, les nombreux professionnels interrogés partagent ce constat.

« Nous avons réalisé une meilleure année qu’en 2020 qui, rappelons-le, a été amputée par deux confinements. Globalement, 2021 a été une bonne année pour l’immobilier d’entreprise même si d’un domaine d’activité à un autre, on note des différences. En ce qui concerne les locaux d’activité, le marché est très “pénurique”, c’est-à-dire que nous avons plus de demandes que d’offres. Nous avions déjà réalisé ce constat en 2020 mais ce phénomène s’est accentué cette année. Cela est à l’origine de deux phénomènes, d’une part, l’augmentation des prix dans le neuf comme dans le seconde main et d’autre part, un raccourci des délais de commercialisation. Les transactions vont très vite ce qui ne laisse pas de place aux négociations. Cette rapidité fait cependant courir le risque d’une surenchère des prix. En effet, comme l’offre est peu existante, certains prix sont exagérés à la hausse, d’où l’importance de bien se faire accompagner et conseiller, notamment par une agence. L’Observatoire de l’immobilier d’entreprise de Côte-d’Or, l’Imdex, est notamment un excellent outil de référence qui recense les valeurs de marchés », observe Florent Puchot, co-gérant et consultant Arthur Loyd Dijon et Besançon et membre du conseil de gérance Arthur Loyd France.

Il insiste : « une embellie de marché doit toujours être accompagnée d’une certaine prudence puisque ce phénomène a généralement tendance à provoquer une hausse des prix. De manière plus générale, nous constatons que peu de dépôts de bilan ont été réalisés du fait, notamment, des aides financières de l’État. Par conséquent, très peu de bâtiments se sont libérés, le marché est pour ainsi dire, figé. On remarque aussi un certain attentisme qui ralentit les investissements notamment pour le marché des bureaux où les volumes transactés en 2021 sont à la baisse. Enfin, contre toute attente, les commerces ont plutôt bien résisté même si là encore, le constat diffère d’un secteur à un autre : le prêt-à-porter souffre beaucoup contrairement aux boutiques liées à l’équipement de la maison, la décoration et le mobilier qui a battu des records l’année dernière ou encore la restauration et l’alimentation ».

Mikael Cretin, directeur adjoint de BNP Paribas Real Estate à Dijon, met lui en avant la résilience du marché de bureaux en 2021, comme en 2020. « Cette année s’est bien passée avec des commercialisations régulières et donc, un bon écoulement de l’offre existante. L’année 2021 s’inscrit dans la continuité de 2020 avec un marché résistant et moins impacté en régions que dans les grandes métropoles. Nous avons des programmes en précommercialisation avec des engagements pour l’horizon fin 2022 mi 2023, ce qui est un très bon signal qui montre que les entreprises se projettent et que les investisseurs se positionnent en amont. » Selon lui, l’activité n’a pas subi de ralentissement puisque le niveau de demande est resté conséquent.

Répondre à la demande des utilisateurs

« On enregistre des mouvements importants de grands utilisateurs sur Valmy et Beauregard, preuve que ces deux développements sont solides. Autre programme majeur, en cours de commercialisation, Dauphine Dijon pour lequel BNP Paribas Real Estate a été mandaté en exclusivité pour les bureaux. Ainsi, c’est 5.000 mètres carrés de bureaux neufs qui sont concernés avec un positionnement stratégique en centre-ville avec un environnement de commerces et de services, des places de stationnement souterraines et des transports en commun. C’est d’ailleurs la seule opération de bureaux neufs pour les années à venir au centre-ville dijonnais. Ce programme, disponible à la location et à l’acquisition, attire déjà très en amont, on note déjà des engagements de la part de futurs utilisateurs. Concernant les locaux d’activités, le marché en 2021 a été similaire au marché de bureaux avec une bonne résistance. On observe une bonne dynamique sur la commercialisation de locaux d’activité neufs sur Capnord et Longvic, celle des bâtiments de seconde main est correcte même si le niveau d’offres est restreint malgré une forte demande. Par ailleurs, Innovespace sur Capnord est encore en cours de développement. Le développement de parcs d’activité est un enjeu majeur pour répondre à la demande exprimée des utilisateurs », conclut-il.

« Le projet Dauphine Dijon, c’est 5.000 mètres carrés de bureaux neufs qui sont concernés avec un positionnement stratégique en centre-ville avec un environnement de commerces et de services, des places de stationnement souterraines et des transports en commun. »

De son côté, Visa Ingénierie fait état d’un « marché de l’immobilier d’entreprise très actif avec une multiplicité de projets très divers en termes de nature et de dimensions. Cela va du petit bâtiment de quelques centaines de mètres carrés de laboratoires de recherche, en passant par des salles de sport, ou de plus petites PME/PMI, à d’autres qui développement jusqu’à 6.000 mètres carrés entièrement neufs comme une base logistique en région lyonnaise, un projet de délocalisation d’une unité de production de plus de 5.000 mètres carrés en région dijonnaise ou encore, la reconstruction d’un stockage de 6.000 mètres carrés sinistrés après un incendie. Ce dynamisme se retrouve sur l’ensemble du secteur géographique couvert par Visa Ingénierie, c’est-à-dire de la région parisienne à la région lyonnaise et jusqu’à l’Alsace. »

D’après Jean-Pierre Lamy, gérant de Visa ingénierie, la demande a repris réellement depuis le printemps 2021, après une quasi interruption de l’activité chantier pendant six mois en 2020. « Beaucoup de projets datant de 2020 ont été reportés. L’activité économique n’a pas flanché puisque la demande en locaux est toujours bien présente car certaines entreprises, malgré le contexte sanitaire, ont vu leur chiffre d’affaires augmenter ainsi que leur marge, d’où la confirmation des projets. »

Un marché stabilisé

CBRE Impact à Dijon parle d’un marché stabilisé pour les locaux d’activité. Ce dernier repart même à la hausse : « nous sommes dans la continuité du dernier observatoire Imdex, nous n’avons pas connu de rupture d’activité liée à la crise sanitaire. L’année 2020 a été normale et 2021 a été plutôt positive. » Comme l’ensemble des acteurs de l’immobilier d’entreprise en région, CBRE Impact pointe un manque de foncier immédiatement disponible « aussi bien dans le neuf que dans le seconde main ».

Cushman & Wakefield Dijon partage ce constat : « paradoxalement, ces deux dernières années se sont très bien déroulées avec des marchés qui sont restés actifs. Pour Cushman & Wakefield, 2021 s’inscrit dans la même lignée que 2019 qui a été une année record pour l’immobilier d’entreprise. Depuis trois ans, les exercices sont très actifs pour notre société avec en moyenne, une centaine de transactions par an », notent Bruno Dormoy et Damien Voisenet, co-gérants de la société dijonnaise qui vient de fêter ses 30 ans.

L’activité freinée par un phénomène de pénurie

Si globalement, les deux années exceptionnelles qui viennent de s’écouler n’ont pas enregistré de baisse d’activité significative, les professionnels attirent l’attention sur le phénomène de pénurie de matières premières ayant pour effet de ralentir l’activité. « En effet, nous n’avons pas constaté de ralentissement dans les investissements immobiliers clients, 2021 a été une année pleine de surprises avec un réel essor économique. Néanmoins, nous avons rencontré des difficultés majeures au niveau des politiques tarifaires ; nous avons assisté à une explosion des coûts des matières premières tels que les aciers, isolants, menuiseries extérieures à laquelle se sont mêlées des difficultés d’approvisionnement à compter du second semestre 2021. Une situation d’autant plus complexe pour des sociétés telles que les nôtres : lorsqu’on s’engage sur un prix global et forfaitaire lors de la contractualisation et qu’il peut s’écouler un délai de plusieurs mois entre cette première date et les commandes auprès des différents partenaires… », témoigne Cristalead.

« La difficulté actuelle est liée à la planification des chantiers qui s’allonge en fonction de la non disponibilité des matériaux, essentiellement liée au marché de l’acier (charpente métallique, couverture, bardage…) et le manque récurrent de main d’oeuvre au sein des entreprises. »

Jean-Pierre Lamy (Visa Ingénierie) partage ce constat : « la difficulté actuelle est liée à la planification des chantiers qui s’allonge en fonction de la non disponibilité des matériaux, essentiellement liée au marché de l’acier (charpente métallique, couverture, bardage…) et le manque récurrent de main d’oeuvre au sein des entreprises. Cela provoque un gros surcroît de travail car il nous faut sans cesse jongler avec les plannings en fonction des approvisionnements de chacun puisque le matériel nécessaire au process client n’est pas fourni en temps et en heures. À cela s’ajoute la hausse des prix des matières premières, notamment de l’acier, depuis la fin 2019. Ces hausses sont mensuelles et exponentielles mais sans conséquences majeures pour les affaires en cours. A contrario, les affaires ayant été chiffrées il y a plus de six mois doivent être remises à jour. Dans certains cas, ces mises à jour peuvent représenter 10 % de l’investissement. D’une manière générale, ce phénomène est bien compris et accepté des clients qui sont eux-mêmes soumis, dans leurs activités, aux mêmes problématiques. »

Allongement des délais administratifs

Le gérant de Visa Ingénierie tire également la sonnette d’alarme sur l’allongement des délais administratifs : « il est à noter un dérapage notable des délais administratifs liés à la complexification des règlements et aussi, à une surcharge de travail des services concernés en raison de la demande qui, non seulement ne faiblit pas, mais se concentre sur la même période ». Clémence Moset et Romain Marilly, les deux associés à la tête de Master’s Construction installé à Chatenoy-le-Royal en Saône-et-Loire, font quant à eux état d’une année 2021 très compliquée en raison des pénuries et de la hausse des prix. « Cette crise des matériaux est loin d’être résorbée, on pense que ce n’est que le début et que ce phénomène peut se poursuivre au-delà d’un an. En matière de tarifs, la situation se complique car si jusqu’à maintenant nous parvenions à minimiser l’impact sur nos clients en absorbant notamment une partie de la hausse, nous n’aurons pas d’autre choix que de réajuster les prix si les hausses sont trop conséquentes en 2022. Ces difficultés ont pour effet de mettre en pause certains projets et nous poussent à une grande flexibilité. »

« Nous évoluons essentiellement sur le marché privé avec une large palette d’activités qui va des bureaux, au stockage, en passant par le commerce et même, plus récemment, une crèche pour jeunes enfants. »

Comme ses confrères, le duo se plaint également d’un manque de main d’oeuvre. « Nous manquons de candidatures sérieuses, l’enjeu de l’année à venir va être de valoriser l’attrait pour ces métiers et de travailler sur la formation des profils », annonce Romain Marilly. Auparavant salariés de l’entreprise, Clémence Moset et Romain Marilly ont décidé de reprendre l’activité en 2015 suite au décès du fondateur et ancien dirigeant. « Nous évoluons essentiellement sur le marché privé avec une large palette d’activités qui va des bureaux, au stockage, en passant par le commerce et même, plus récemment, une crèche pour jeunes enfants. » Spécialisée dans le « clé en main », Master’s Construction vient de fêter ses 20 ans d’existence.

Anticiper pour ne pas subir

Basé à Chevigny-Saint-Sauveur, le groupe Guiton & Cie fait figure de bon élève dans cette crise des matériaux. « Les hausses étaient à prévoir, nous avons donc essayé d’anticiper le plus possible les commandes. Cela n’a pas pour autant empêché de subir la hausse des prix. Sur l’année qui s’achève, nous avons tout de même perdu l’équivalent d’un mois de chiffre d’affaires en raison de ce phénomène. Si le premier trimestre 2020 nous a effrayé, de par le caractère inédit de la situation et l’arrêt brutal d’une grande majorité d’activités, on a pu noter un redémarrage important dès le printemps 2020 et la demande n’a pas cessé de s’accélérer depuis », se remémore Cyrille Guiton, créateur et gérant de l’entreprise éponyme.

L’émergence de nouveaux modèles

La pandémie de coronavirus a accentué et précipité des évolutions qui étaient déjà bien amorcées dans secteur de l’immobilier d’entreprise. Exit la rigidité des espaces de travail traditionnels, les entreprises recherchent davantage de flexibilité en matière d’espaces. Principal objectif : réduire les coûts fixes. En effet, après les salaires, l’immobilier représente le plus gros poste de dépenses pour les entreprises et, en moyenne, 40 % des espaces seraient inutilisés au quotidien en raison de nombreux facteurs comme les déplacements, les congés et de plus en plus, le télétravail. La démocratisation des techniques numériques ayant démontré que chacun pouvait accéder à ses outils de travail à distance, le modèle du flex office semble s’imposer de plus en plus.

Terme anglais désignant l’absence de poste de travail attitré à chaque salarié et l’absence de bureaux fermés, le flex office répond aussi au besoin de travailler différemment : des espaces sont spécialement aménagés pour les tâches qui nécessitent calme et concentration, d’autres sont prévus pour les échanges ou encore les moments conviviaux. Un peu comme le « desk sharing » (à traduire littéralement par « partage de bureau »), ces modèles émergents permettent l’optimisation des locaux de l’entreprise. Pas forcément très covid-compatibles, ces options sont pourtant de plus en plus plébiscitées par les entreprises. Une étude réalisée par Deskeo, spécialiste de la location de bureaux flexibles avec services, et publiée en mars met en évidence que 16 % des entreprises ont déjà mis en place une configuration flex office, 55 % l’envisagent sérieusement.

Analyser l’impact de la crise sanitaire

« Le concept du flex office n’est pas si nouveau qu’on pourrait le penser mais il est vrai que la crise sanitaire a propulsé ce phénomène. De plus en plus d’entreprises souhaitent réaménager les surfaces plutôt que les réduire. C’est notamment ce qui a été fait pour le siège de CBRE il y a deux ans, afin de favoriser les échanges », commente Cécile Bidault, chargée de la commercialisation de bureaux pour CBRE Impact à Dijon.

« Le concept du flex office n’est pas si nouveau qu’on pourrait le penser mais il est vrai que la crise sanitaire a propulsé ce phénomène. »

Si les locaux professionnels ne sont pas prêts de disparaître totalement puisque les entreprises nourriront toujours le désir de disposer de lieux d’échanges pour des réunions notamment, les stratégies immobilières doivent s’adapter à ces nouveaux enjeux et ces nouvelles formes de travail. « Le flex office et le télétravail ne sont pas applicables à tous les métiers. Certes, ces phénomènes se développent mais dans quelle mesure, c’est encore un peu trop tôt pour le savoir. De plus, les locaux professionnels répondent au droit de baux commerciaux qui sont valables pour trois ans au minimum et n’offrent pas forcément la souplesse juridique nécessaire pour mettre en oeuvre des configurations de type flex office. Je pense qu’il faudra attendre 2023 pour commencer à avoir un regard précis sur l’impact de la crise sanitaire. En outre, la réadaptation des surfaces tend à se développer davantage que la renégociation de baux », précise Damien Voisenet (Cushman & Wakefield Dijon).

« En 2021, les volumes transactés sur le marché de bureaux sont à la baisse, cela s’explique par un certain attentisme et aussi par la pénurie d’offres. À ce phénomène s’ajoute une nouvelle réglementation, le décret tertiaire prévu par la loi Élan (voir encadré page précédente), qui pourrait avoir des conséquences lourdes et durables sur l’organisation du travail et des entreprises. Si les flex offices et les bureaux partagés ne sont pas encore la norme, ils pourraient en effet vite le devenir au vu des coûts et des contraintes liées à l’entretien et à la mise en conformité des plateformes de travail. La question est de savoir si les entreprises vont être amenées à opter pour des espaces plus restreints, plus pratiques, moins coûteux et surtout, exemplaires du point de vue énergétique. Malgré cela, plus de 40.000 mètres carrés de bureaux vont être développés par la métropole dijonnaise dont 40 % sont livrables dans les 24 mois à venir. Un projet ambitieux pour la taille de Dijon », insiste Florent Puchot (Arthur Loyd).

L’atout des villes moyennes

La crise sanitaire a projeté les régions sur le devant de la scène, confirmant un certain dynamisme sur ces territoires. Si parler de décentralisation serait exagéré, les spécialistes de l’immobilier d’entreprise en Bourgogne Franche-Comté observent une hausse des demandes de la part d’investisseurs nationaux. En effet, d’après eux, depuis le début de la pandémie de coronavirus, l’immobilier de bureaux en région résiste mieux qu’en Île-de-France ou dans la région lyonnaise. La récente parution du dernier baromètre Arthur Loyd sur l’attractivité des métropoles françaises, confirme cette tendance : « l’appel des régions est le thème central de l’édition 2021 du baromètre. Les grands territoires urbains sont bien au rendez-vous de la sortie de crise en affichant les plus fortes créations d’emplois. Mais, l’Île-de-France, moteur économique du pays et région la plus peuplée d’Europe, n’a toujours pas retrouvé son niveau d’emploi d’avant-crise. Une situation inédite, qui démontre que les clés de compréhension habituelles de la résilience des territoires ont volé en éclats avec la pandémie de Covid-19. »

« En effet, cette crise sanitaire, qui semble s’installer dans la durée à travers le monde, a bousculé nos habitudes et parfois remis en cause nos certitudes. Après de longs mois de restrictions sanitaires, les Français ont réévalué ce qui comptait réellement à leurs yeux et ont entamé un changement de vie : qu’il s’agisse d’un divorce, d’une réorientation professionnelle, de l’achat d’une résidence secondaire ou encore d’un déménagement, nombreux sont celles et ceux pour qui la crise Covid a entraîné l’émergence de nouvelles aspirations. Évidemment, l’incursion du numérique dans les interactions professionnelles est l’une des pierres angulaires de ces évolutions. Le déploiement du télétravail notamment, au départ contraint pendant les pics épidémiques, a démontré aux salariés comme aux employeurs qu’il était possible de travailler à distance. Cette prise de conscience et l’installation progressive d’une hybridation des temps de travail ont aussi ouvert le champ des possibles : certains y voient désormais une occasion unique de découpler lieu de vie et lieu de travail, confirmant alors l’émergence du ”deuxième bureau”, notion chère au sociologue Jean Viard, qui a été interrogé dans le cadre de ce baromètre. »

Redistribution des cartes

« D’autres se demandent encore : travaille où l’on veut vivre, plutôt que vivre où l’on doit travailler, ne s’agit-il pas là d’une réponse à la quête de sens qui s’est installée parmi la population ? Ainsi, dans ce monde en mouvement où rien ne semble encore écrit, on assiste à une redistribution des cartes de l’attractivité des territoires. À l’heure de la prise en compte des enjeux liés à la responsabilité sociétale d’entreprise (RSE), les entreprises ont l’opportunité aujourd’hui, d’intégrer la question de la qualité de vie et de leurs collaborateurs dans leur ”raison d’être” et de répondre aux nouvelles attentes qui se sont exprimées pendant cette pandémie, en déconcentrant une partie de leurs activités en régions. C’est peut-être par ce nouveau contrat social plus que par des politiques publiques que chacun pourra alors trouver son équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle », exprime Cevan Torossian, directeur associé Études et recherche pour Arthur Loyd.

« Il est évident que les villes moyennes comme Dijon ont moins souffert que Paris, qui reste la ville la plus pénalisée, ou encore Lyon qui manque de foncier et subit une certaine envolée des prix », confirme CBRE Impact à Dijon. « La métropole a énormément d’atouts à mettre en avant, d’abord de par sa situation géographique, à proximité de Paris et Lyon, et par le cadre de vie qu’elle propose. Dijon a toutes les qualités pour séduire les entreprises qui souhaitent s’implanter ou redéployer une activité », affirme Cushman & Wakefiled Dijon. « De manière globale, nous remarquons que le bassin dijonnais séduit des sociétés basées en Île-de-France ou en région lyonnaise. La qualité de vie que Dijon, métropole à taille humaine, a à offrir ainsi que les économies qu’elle peut permettre, en fait un territoire très intéressant pour les implantations », ajoute Cyrille Guiton. « On enregistre beaucoup de demandes en logistique. L’installation d’Amazon Logistics à Longvic est un bel exemple », note la CCI de Côte-d’Or.

Des implantations synonymes d’emplois

En effet, prévue pour le printemps 2022, l’ouverture d’une agence de livraison Amazon Logistics à Longvic doit permettre une livraison plus rapide, plus fiable et optimisée des colis en provenance des centres de distribution et des centres de tri d’Amazon, aux clients du territoire. D’après l’agence de développement économique, Dijon métropole développement, « ce nouveau site, opéré en partenariat avec des entreprises de livraison indépendantes, contribue au développement de l’emploi local puisque Amazon va recruter 50 personnes en CDI, et les entreprises de livraison partenaires prévoient de faire appel à 200 agents pour livrer les clients sur Dijon et sa région ». Cette agence de livraison de proximité, située sur un ancien site industriel, est l’aboutissement d’une étroite collaboration entre Amazon et Dijon métropole, son agence de développement économique et ses partenaires publics et privés.

« Cette implantation s’est officialisée sur un tout autre process qui met également en avant la place centrale de Dijon métropole pour rayonner au-delà du bassin d’emplois. Amazon avait d’emblée fléché Dijon métropole pour mailler le territoire avec les sites de Sevrey, Belfort ou encore Metz. Amazon a choisi de mettre à contribution un ancien site industriel délaissé au coeur de la zone industrielle de Longvic, en quai voisin de la plateforme industrielle de La Poste, de Géodis et autres prestataires des métiers du transport et de la logistique. Nous avons été sensibles à cette opération immobilière 100 % privée dans la mesure où elle revient à quasiment recréer du neuf avec un site ancien, tout en visant la certification Breeam Very Good (pour Building research establishment environnemental assessment method, un standard de certification britannique relatif à l’évaluation environnementale des bâtiments. C’est la certification la plus répandue à l’international, Ndlr) que des mises en chantier en cours à vocation industrielle ne visent pas encore. Pour la restructuration à neuf de l’ensemble du AMAZON bâtiment, une attention particulière a ainsi été portée lllà l’intégration harmonieuse du site dans l’environnement local, notamment en termes d’aménagement urbain et d’utilisation de solutions de transport à faible émission carbone », fait savoir Danielle Juban, vice-présidente de Dijon métropole, déléguée au développement économique, à l’attractivité et aux foires et salons. Autre exemple fort d’implantation à venir, le centre logistique de distribution de produits pharmaceutiques et de dispositifs de maintien à domicile Giphar sur le parc d’activité Beauregard à Longvic.

Concentration d’activité

« Une plateforme logistique de 10.000 mètres carrés va être construite et pourra s’étendre, à moyen terme, sur un terrain de 40.000 mètres carrés. Un projet d’envergure conduit en partenariat avec l’État, la région, Dijon métropole, la ville de Dijon et Pôle Emploi. Cet investissement supérieur à 12 millions d’euros génèrera la création de 70 emplois directs dès l’ouverture, mi-2022, de la plateforme. Est prévue la création d’une trentaine d’emplois supplémentaires liés à la sous-traitance en matière de transport », précise-t-elle. « La concentration à Dijon métropole de ces activités en relation directe avec les groupes pharmaceutiques et les grands laboratoires est à notre avantage. Elle permet de nous identifier un peu plus comme une destination de premier choix en France pour de nouvelles activités industrielles et productives. »

De son côté, le maire de Dijon, président de Dijon métropole et ancien ministre, François Rebsamen a salué « le travail des équipes pour mener à bien cette implantation qui va permettre 70 emplois. Nous avons enregistré récemment de nombreuses décisions d’investissements sur le parc de Beauregard avec Savoye, Ciblex Eurotranspharma, Oogarden… Malgré un contexte économique et sanitaire des plus complexes, l’attractivité économique de Dijon est réelle. La collectivité continuera d’investir pour l’innovation, pour le rayonnement de notre métropole et pour l’emploi ». Par ailleurs, Dijon métropole développement insiste sur la visibilité offerte par le lancement officiel de Santenov : « cela nous permet d’attirer de nouveaux investisseurs extérieurs », ajoute Danielle Juban.

Une attractivité à développer

« Nous sommes en train de rapprocher l’art de vivre, et l’art de produire », affirme Jean Viard, sociologue. D’où l’importance de promouvoir son territoire à travers le marketing territorial. « La crise sanitaire, dans tous les bouleversements qu’elle a apportés, a permis de catalyser et d’accentuer des tendances à l’oeuvre. Dans le cas du marketing territorial, l’enjeu n’est plus de consommer un territoire mais d’envisager ses caractéristiques de manière globale en réduisant les impacts négatifs (par exemple, le tourisme de masse pouvant mettre en danger des sites naturels) et en proposant des alternatives plus qualitatives et durables. Les villes qui choisissent une marque territoriale (c’est notamment le cas de Besançon avec Besançon booster de bonheur, et de Dijon avec Just Dijon), bénéficient d’une identité reconnue. La marque permet aux métropoles d’affirmer leur position dans le contexte concurrentiel. Par ailleurs, l’utilisation fréquente de l’anglais dans les logos participe à rendre visible ces métropoles sur la scène internationale », présente le baromètre Arthur Loyd.

Si, la ville de Dijon a chuté cette année après avoir été positionnée en première place en 2018 puis cinquième en 2020, la ville conserve de nombreux atouts. « C’est le jeu des classements qui livrent une photographie à un moment donné, nous devons composer avec cette compétition de chaque instant. Nous visons avec optimisme une remontée au classement l’année prochaine avec des décisions récentes comme l’arrivée de l’Organisation internationale de la vigne et du vin (OIV) à Dijon », déclare Danielle Juban.

SIMI : vitrine incontestable

Faire connaître un territoire et vanter son dynamisme, c’est d’ailleurs tout l’enjeu du Salon de l’immobilier d’entreprise (SIMI) qui s’est tenu à Paris du 8 au 10 décembre dernier. « La métropole dijonnaise applique un modèle d’urbanisme et d’aménagement du territoire vertueux. Dijon, c’est une métropole à taille humaine, à vivre pour tous, dynamique, écologique et solidaire. Nous avons fait de la métropole un terrain d’expérimentation pour des solutions locales innovantes en faveur notamment de la transition énergétique. C’est la raison pour laquelle nous souhaitions marquer notre présence au CITY by SIMI qui questionne la filière immobilière sur les dynamiques des métropoles et les mutations de la ville d’un point de vue sociétal, environnemental et technologique », a déclaré François Rebsamen lors de ce salon.

Cet évènement a aussi été l’occasion, pour la métropole, de mettre en avant plusieurs actualités liées à la métropole : « à travers son projet Response, du programme européen ”H2020, Villes et communautés intelligentes”, Dijon métropole se positionne comme une ville pilote à l’échelle de l’Europe pour construire des quartiers à énergie positive grâce à des solutions innovantes. Au total, des dizaines d’innovations seront testées pour faire du territoire dijonnais un véritable laboratoire pour l’expérimentation et la mise en oeuvre de solutions visant à atteindre la neutralité carbone. Dijona pour objectif, sur une période de cinq ans, de bâtir la plus grande opération d’auto-consommation collective de France ».