Moissons : un bilan 2024 mitigé
Agriculture. Les moissons touchent à leur fin, les derniers agriculteurs oeuvrant encore dans le nord de la Côte-d’Or. Après un début d’année très humide, les cultures de céréales ont pâti tout comme les animaux qui subiront la faible qualité des fourrages.
« Les rendements sont mauvais en orge et il faudra un gros travail dans les silos pour garantir la qualité attendue en raison d’un taux de protéines élevées », constate Bertrand Combemorel, directeur général de Bourgogne du Sud, la coopérative qui réunit des agriculteurs de Saône-et-Loire et de Côte-d’Or. Les résultats des membres avoisinent les 54 quintaux/ha en 2024 contre 65 à 70 pour une année normale. Du côté des blés, le bilan n’est pas meilleur. « Nous enregistrons 15 à 20 % de quantité en moins par rapport à ces dernières années. Les silos permettront d’honorer les meuniers en apportant la qualité attendue. »
La quantité semble être plus problématique comme l’explique Benjamin Boyet, directeur du pôle agricole Dijon Céréales : « L’excès d’eau et le manque de luminosité ont clairement impacté la mise en place du potentiel, les parcelles sensibles à l’humidité, les terres profondes, sont les plus touchées. Ce climat exceptionnel a visiblement impacté le nombre de grains par épis, et également le poids de mille grains, facteur important dans les composantes de rendement avec le poids spécifique. »
Le représentant de Dijon Céréales complète son analyse : « À noter qu’en France, on va enregistrer cette année la plus mauvaise récolte de blé depuis 41 ans : 25 Mt contre 36 en 2023 soit -30%. » Dans l’Yonne, la situation n’est pas meilleure. « Le moral n’est pas très bon que l’on soit en grandes cultures ou en élevage », résume Arnaud Delestre, président de la chambre départementale.
Un constat partagé par Vincent Lavier, président de la chambre d’agriculture de Côte-d’Or qui voit quand même une lumière dans l’obscurité : « Les terres les plus séchantes en nord Côte-d’Or, qui ont souffert en 2022 et 2023, s’en sortent mieux avec cette année plus humide. » La moisson de colza semble quant à elle plus positive. « Le colza constitue la bonne surprise de l’année avec des rendements qui s’inscrivent dans une fourchette moyenne de 30 à 40 quintaux/ha sur le secteur de la coopérative », souligne Benjamin Boyet.
La situation géopolitique à prendre en compte
En plus de la météo, Bertrand Combemorel rappelle que les agriculteurs français doivent composer avec une concurrence internationale. « Des pays comme le Pakistan, l’Iran ou la Turquie ont fait une bonne récolte et vont donc moins importer de Russie. En conséquence, les vendeurs russes vont se montrer très agressifs. » Le représentant de Bourgogne du Sud met également dans la balance les céréales venues d’Ukraine, qui bénéficient d’une suspension des taxes extérieures et des droits d’import. « Cela se justifie par le contexte de guerre mais est-ce à notre monde agricole de payer l’addition de cette aide ? »
La mauvaise surprise des fourrages
Outre les céréales, les moissons permettent de réaliser le fourrage qui alimentera les animaux dans les élevages.
Mais en cette année particulièrement humide, les foins sont ramassés avec un mois et demi de retard et affichent une moindre qualité nutritionnelle, interrogeant l’avenir pour les éleveurs. « Ils vont devoir apporter des compléments alimentaires », insiste Bertrand Combemorel tandis que Vincent Lavier poursuit : « La qualité dégradée ne va pas permettre de nourrir les bêtes correctement. » Les agriculteurs espèrent de meilleurs rendements et une qualité supérieure pour les moissons d’automne comme les tournesols, maïs et autre soja. « Cela pourra soulager les finances mais si pour l’heure, c’est joli, il n’est pas garanti que cela dure. Planter les pieds dans l’eau rend les cultures plus sensibles aux aléas climatiques. » Et déjà dans l’Yonne, Arnaud Delestre voit les agriculteurs se préparer au pire. « Ils sentent arriver les difficultés et commencent à solliciter un accompagnement, un report de charge et d’annuité. »