Quand la luzerne devient énergie et protège l’eau
Yonne. Inaugurée en septembre 2025, l’unité de méthanisation de Pont-sur-Vanne a été pensée par Dominique Goffart dans le cadre de la conversion de ses cultures au bio. Elle produit du gaz de ville tout en contribuant à la protection des captages d’eau potable.

Exploitant avec son frère 350 hectares de terres agricoles dans le Pays d’Othe, Dominique Goffart a trouvé une solution originale pour recycler ses surplus de luzerne semence : un méthaniseur. Comme beaucoup d’agriculteurs du secteur, il s’est converti au bio sous l’impulsion d’Eau de Paris, soucieuse de protéger les captages dont ceux de la Forêt d’Othe qui fournissent 20 % de l’eau potable de la capitale.
L’agence Eau de Paris encourage en effet le développement de l’agriculture biologique depuis le début des années 2000 avec un programme pilote dans la vallée de la Vanne en 2008. Lancé officiellement en 2010, le dispositif est renforcé en 2020. Deux ans plus tard, 115 agriculteurs rejoignaient le programme. Dominique Goffart indique avoir bénéficié d’une aide financière nationale pendant cinq ans (environ 300 € par hectare), puis de l’agence de l’eau Seine Normandie (environ 200 € par hectare).
Le projet de méthaniseur représente un investissement d’environ 6,5 M€, soutenu par cinq autres agriculteurs du territoire (environ 10 % du capital chacun) et à hauteur de 20 % par le Syndicat départemental d’énergies de l’Yonne. Il est subventionné à hauteur d’1M€ par l’Ademe - l’Agence de transition énergétique - et le Feder (Fondseuropéen de développement régional). Lancé en 2016, lechantier avait cependant prisdu retard : la première pierre n’a été posée qu’en septembre 2022 en raison d’oppositionslocales. Malgré ces obstacles, Dominique Goffart est restédéterminé.
Des déchets organiques à la production de gaz

Les cultures de l’exploitation sont vendues à la Cocebi (Coopérative céréalière biologique de Bourgogne). En revanche, la luzerne semence cultivée sur 25 à 30 % de la surface agricole ne bénéficie pas encore de contrat. À défaut d’avoir un élevage personnel de bovins pour la consommer, la solution du méthaniseur semblait la plus simple et surtout la plus sécurisante financièrement. Dominique Goffart est sous contrat de 15 ans avec GRDF « avec un prix minimum. Je ne dis pas que je vais m’enrichir avec ça, mais quand je viens une heure, c’est une heure payée », précise l’agriculteur.
D’un hectare et demi, ce site de méthanisation dispose de quatre silos dont un de 6.000 tonnes et deux de 3.000 tonnes afin de stocker les déchets organiques : de la luzerne, mais également du fumier amené par les éleveurs (20 %) et de la paille (20 %). Un total de 10.900 tonnes de matières par an, soit 30 tonnes par jour, nourrissent la machine, traitées par un digesteur d’une capacité de 1.800 m3, tout bonnement digérées comme le ferait une vache. Le digestat est ensuite répandu sur les cultures. Tandis que le méthane (55 % du gaz brut), une fois épuré, repart dans les canalisations souterraines de GRDF pour alimenter le réseau de gaz de la ville de Sens, à raison de 120 m3 par heure.