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Reprise de Metalliance : le dossier en détail

Reprise. Le dossier de reprise du chaudronnier Metalliance (tunnelerie et manutention électrique), déposé par Steve Filipov et un consortium de partenaires industriels franco-américain a été approuvé par le tribunal de commerce de Dijon le 31 juillet dernier.

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Photo d'une chaudronnerie
(Crédit : Freepik)

Au dernier jour de juillet, le tribunal de commerce de Dijon mettait fin à l’attente des salariés de Metalliance, le chaudronnier saône-et-loirien placé en redressement judiciaire depuis le 17 mai 2024, en acceptant l’unique offre de reprise déposée par Steve Filipov et Corail-SM, (filiale française du fonds américain Coral Reef, regroupant un autre fonds américain, Sandton Capital, ainsi que deux industriels : le français Novium - engins de travaux ferroviaires - et l’américain Mining Equipment). Dans sa première version, cette offre permettait la sauvegarde de 130 emplois qualifiés, offre améliorée dans un second temps avec 145 postes préservés.

Interrogé, le cabinet August Debouzy, qui a accompagné Steve Filipov dans la procédure, précise : « le prix de cession est de 1,25 M€, ventilé comme suit : 1,15 M€ pour l’ensemble des stocks, y compris, le cas échéant en application de l’article 6 (de l’offre de reprise qui en précise le périmètre, Ndlr), les éléments de stocks faisant l’objet d’une clause de réserve de propriété. 50.000 € sont dévolus à la reprise des actifs corporels (dont matériels d’exploitation et outillage, fichier client et archives, Ndlr) ; 50.000 € sont mobilisés pour l’ensemble des actifs incorporels », dont les éléments de savoir-faire, technologies, secrets commerciaux et tous documents techniques nécessaires à l’exploitation de l’activité reprise, comme le précise l’offre déposée le 17 juin. En 2023, les comptes de Metalliance faisaient état d’un chiffre d’affaires de 39,8 M€ (44,20 M€ en 2022).

Génelard en sursis

Les sites Metalliance de Saône-et-Loire connaissent un destin divergent. À Saint-Vallier, le repreneur sollicite le transfert des baux commerciaux pour les immeubles, industriels ou non, sis dans l’enceinte de la Zone industrielle de La Saule ; le site de Génelard en revanche n’est repris qu’à court terme, « par le biais d’une convention d’occupation précaire », souligne le cabinet August Debouzy.

Le point 118 de l’offre de reprise précise en effet que le repreneur souhaite conserver la jouissance des lieux loués le temps « d’assurer le déménagement de la totalité des équipements et autres actifs présents sur le site de Génelard et appartenant à la société Metalliance ; et d’achever l’ensemble des travaux des clients actuellement en cours sur le site de Génelard et ne pouvant être réalisés sur un autre site du repreneur ».

10 M€ pour Metalliance

L’offre initiale de reprise comportait également l’éventuelle mobilisation de 54,51 M€ par le repreneur. Ce sont finalement 10 M€ qui vont être injectés pour la restructuration de Metalliance à trois ans. « L’offre initiale, – qui faisait l’objet de conditions liées à la nécessité d’un audit - correspondait à l’objectif de réaliser un plan de sauvegarde sur l’ensemble du groupe Gaussin, alors propriétaire de Metalliance, étant précisé que Gaussin SA fait face à un fort endettement donc à un besoin important, explique le cabinet August Debouzy. Faute d’avoir pu trouver un accord avec les actionnaires de Gaussin SA, les repreneurs se sont concentrés sur la reprise de Metalliance. Cette reprise n’a finalement pu aboutir qu’en plan de cession en raison du contexte actionnarial tendu du dossier de sorte que l’engagement, adapté au besoin des activités de Metalliance seule, s’élève à 10 M€ ».

Gaussin très inquiet

La décision du tribunal de commerce de Dijon viendra-t-elle apaiser les relations plus que venimeuses entre Metalliance et son ex-maison-mère Gaussin SA installée en Haute-Saône à Héricourt ? On en doute. Lorsque Metalliance se place en sauvegarde, début janvier, cela se passe sans en informer la maison-mère, assure alors Gaussin SA (la décision avait été ensuite annulée par le tribunal). Mais l’enjeu est ailleurs : en 2022, Gaussin SA avait transféré à Metalliance sa production d’ATM, des tracteurs électriques de manutention dédiés à la logistique. En 2023, Metalliance devait livrer une commande d’Amazon de 355 de ces véhicules ; seulement 14 l’avaient effectivement été au 31 décembre 2023, chacun se renvoyant la responsabilité de ce fiasco. Et c’est bien cette technologie qui est au coeur des tensions.

Lorsque, le 10 juillet dernier, Gaussin SA annonçait l’offre de reprise de Metalliance formulée par Steve Filipov (éphémère directeur général délégué de... Gaussin !), c’est pour alerter le tribunal de commerce du risque de voir Corail-SM faire couler Gaussin SA en poursuivant la fabrication de ces tracteurs électriques logistiques : « C’est clairement une imitation de l’ATM de Gaussin en contournant les droits de propriété intellectuelle de notre entreprise et en prenant à son compte l’ensemble de notre savoir-faire et de nos nombreuses heures de développement », dénonçait Gaussin SA dans un communiqué, réclamant au tribunal que « la cession du stock de pièces de véhicules ATM soit impérativement isolée du plan de cession ». Demande retoquée, en définitive. Seul l’avenir dira si les promesses des uns et les craintes des autres vont ou non se révéler au grand jour...