TotalEnergies investit 150 M€, à 100% sur les EnR en BFC
Bourgogne Franche-Comté. Isabelle Patrier, directrice de TotalEnergies France était à Dijon le 30 mai pour évoquer la stratégie du groupe, notamment en BFC sur les énergies renouvelables.
Isabelle Patrier, directrice France du groupe TotalEnergies était le 30 juin à Dijon pour y évoquer la stratégie du groupe, dont les métiers historiques s’articulent autour des énergies fossiles, et qui souhaite s’illustrer dans celui des énergies décarbonées.
Le groupe TotalEnergies (102.000 collaborateurs monde, 35.000 en France), représente 338 collaborateurs en BFC : une partie sur les métiers historiques, c’est-à-dire les 166 stations et la distribution de GNR agricole et BTP et du fioul (domestique ou professionnel), avec les aspects de mutation de ces métiers vers les bio-carburants ; et les nouvelles activités autour des mobilités électriques (bornes de recharge), avec « cet enjeu que nous avons d’être dans le Top 5 mondial des producteurs d’électricité renouvelables en 2030 ».
Faciliter la transition
Localement, TotalEnergies possède une agence de production d’électricité renouvelable basée à Dijon qui a déjà développé et mis en service 41 MW en solaire et en éolien, ce qui représente à peu près la consommation de plus de 20.000 habitants. 1.700 MW sont en projet, soit l’équivalent de la consommation d’une ville comme Lyon. « Notre objectif, souligne Isabelle Patrier, est de réduire l’intensité carbone des produits que l’on distribue et d’accompagner les citoyens, les professionnels, les collectivités dans la transition énergétique. Nous allons faire dans les deux ans 150 M€ d’investissement dans les EnR en BFC qui vont permettre d’irriguer tout un territoire ».
Le groupe finance aussi un programme de soutien avec des prêts à taux zéro pour les entreprises qui créent de l’emploi : « on en a accompagné une quinzaine sur la BFC qui représente 500 emplois et 600.000 €, et on a aussi des programmes d’accompagnement des écosystèmes, avec un incubateur à la station F qui s’appelle TotalEnergies avec des start-up de l’électricité, pour repérer les innovations et les faire monter à l’échelle industrielle. En BFC, le groupe est aussi impliqué dans cinq écoles de production et deux en projets par le biais de son soutien financier (60 M€ en dix ans) à la Fondation des écoles de production ».
TotalEnergies se targue d’avoir monté la première station 100% électrique à Dijon, à côté de la gare, 17 stations sont équipées de bornes, 19 sont solarisées. Le groupe y a déployé 120 bornes de recharge haute puissance en France et 700 bornes de recharge classiques. « Nous sommes leaders de ces super-chargeurs sur le territoire français », assure Isabelle Patrier, alors que le groupe affiche l’ambition de faciliter le passage du moteur thermique à l’électrique. « Si vous pouvez en 20 mn avoir rechargé 80% de votre batterie, vous ne voyez plus les choses de la même manière. Il faut rassurer le consommateur, citoyen ou entrepreneur et lui dire : l’offre est là, vous pouvez basculer sur des usages décarbonés et quand cette demande va basculer, cela va nous permettre de réduire notre offre d’énergies fossiles. Il faut continuer d’alimenter ce dernier mais accompagner sa décroissance, en faisant la preuve que l’offre décarbonée existe déjà ».
Le fossile, pas mort...
TotalEnergies (1,5% de la production mondiale de pétrole et de gaz) fait partie avec Chevron, Shell, BP, Exxon des cinq majors mondiales soit...10% de cette production. Les 90% restants sont le fait de sociétés nationales et des pays de l’Opep. TotalEnergies a fait le choix de transformer son mix énergétique : 65% provenait du pétrole en 2015, c’est 43% aujourd’hui en faisant monter la part du gaz et la part des ventes d’électricité et des molécules bas carbone. « Nous sommes en 2024, à 8% des ventes d’électricité bas carbone dans notre mix, on sera à 20% en 2030 et on atteindra 0 émission nette en 2050 en ayant 50% d’électricité, 25% de molécules bas carbone et le reste sera des énergies fossiles, que l’on ne sait pas encore remplacer, notamment en pétrochimie », détaille Isabelle Patrier.
À fin 2023, le groupe produisait 23 GW de production d’électricité renouvelable, ce sera 100 GW en 2030 (le parc nucléaire français a une puissance théorique de 61 GW). « Nous sommes, des cinq majors pétrolières mondiales, celle qui investit le plus dans la transition, qui atteint ses objectifs par rapport aux autres et qui prouve que le modèle est durable : on a montré en 2023 que notre activité de production et distribution d’électricité était rentable puisque nous avons dégagé 2Mds de cash flow, ce qui tend à prouver que notre modèle est résilient. Le résultat dégagé par la production de pétrole et de gaz nous permet de financer la production énergétique et on investit chaque année 5 Mds dans cette transition ».
Mais, selon l’AIE (agence mondiale de l’énergie, ndlr), la demande de 100 millions par jour de barils de pétrole et d’énergies fossiles il y a deux ans, passera à 108 millions par jour en 2028. La demande globale mondiale continue d’augmenter, au rythme de la démographie. « Au fond, constate Isabelle Patrier, tout ce que l’on produit d’énergies renouvelables est absorbé par cette augmentation de la demande. On pense que 40% de ces EnR qui livre l’augmentation de la demande, le reste est une augmentation des produits fossiles ».
Le groupe poursuit donc ses activités historiques autour de ces dernières, « d’abord parce qu’il faut répondre à cette augmentation de la demande. Il faut savoir qu’un champ pétrolier ou un champ gazier perd, géologiquement, 4% de son volume. Il faudrait pour, demain, que l’ensemble des acteurs du pétrole et du gaz arrêtent de produire, que la planète diminue ses besoins de 4% par an. Or il y a 20 ans, l’énergie consommée sur la planète était dépendant à 82% du fossile, c’est 80% en 2023 alors que dans l’intervalle on a énormément produit de renouvelables ». Selon Isabelle Patrier, l’AIE estime que la courbe commencera à s’inverser à la fin de la décennie…
Il faut donc, assure-t-elle, « qu’on accélère dans la transition et la production d’électricité décarbonée, même dans notre pays déjà plus performant grâce à son parc nucléaire. Ce qu’on essaye est d’utiliser d’abord des zones déjà artificialisées : délaissées d’autoroutes, zones de stockage de déchets, parkings, comme à l’hôpital de Chalon-sur-Saône, où une ombrière TotalEnergies produit de l’énergie renouvelable qui alimente des bornes de recharge. Il y a aussi un certain nombre de projets éoliens, solaires ou agrivoltaïques. À Channay, c’est le premier parc avec des panneaux bifaces verticaux qui permettent d’améliorer le rendement des productions agricoles. On progresse aussi dans le retour d’expérience sur ces sujets ».
Pertinence de l’échelle régionale
L’échelle régionale est-elle la mieux à même d’expérimenter concrètement la transition ? Isabelle Patrier le croit, et salue la trajectoire impulsée par les exécutifs régionaux. « La région BFC a des ambitions importantes en 2030, c’est une région motivée à déployer les renouvelables, à faire sa transition des mobilités et des bâtiments pour réduire son empreinte énergétique. Les citoyens de cette région ont acheté 10.000 véhicules électriques, il faudrait que ce soit 30.000 par an, je pense que c’est faisable, malgré l’arrêt des aides, j’ai l’impression que la dynamique est là. C’est notre rôle aussi de rassurer les consommateurs en disant : vous avez une offre, qui est en train de se déployer, qui est en train d’augmenter, avec une électricité locale qui alimente vos nouvelles mobilités ou vos contrats d’électricité locaux, cela vous permet vous-même de faire votre transition ».