Panneaux photovoltaïques : zooms juridiques
Justice. Déjà bien présents dans le paysage, les panneaux photovoltaïques devraient se généraliser dès l’été, à la suite de l’adoption de la loi Climat et Résilience.
Les panneaux photovoltaïques qui transforment le rayonnement solaire en électricité grâce à des modules, peuvent être installés en toiture, en ombrière ou posés au sol. Ils sont déjà bien présents dans nos paysages, que ce soit en ville ou à la campagne, et vont se généraliser, dès juillet 2023, à la suite de l’adoption de la loi Climat et Résilience du 22 août 2021.
En effet, l’article 101 de cette loi insère un nouvel article L. 171-4 dans le Code de la construction et de l’habitation qui instaure, à compter du 1er juillet 2023, l’obligation d’installer un procédé de production d’énergies renouvelables ou des toits végétalisés lors de la construction, l’extension ou la rénovation lourde de tous les bâtiments à usage commercial, industriel ou artisanal de plus de 500 mètres carrés, et de plus de 1.000 mètres carrés pour les immeubles à usage de bureaux.
Les projets d’installation de panneaux photovoltaïques nécessitent une étude approfondie.
Ces installations posent, d’un point de vue juridique, toute une série de questions assez complexes relatives notamment à la maîtrise du foncier, aux autorisations d’urbanisme, environnementales et d’exploiter, aux raccordements aux réseaux publics d’électricité, au cadre légal de l’autoconsommation, au tarif de rachat de l’électricité, au contrôle des installations en cours d’exploitation, à la fiscalité, à la fin de l’exploitation.
Déclaration préalable ou permis de construire ?
L’installation de panneaux sur un bâtiment existant nécessite le dépôt d’une déclaration préalable au titre des travaux modifiant l’aspect extérieur d’un bâtiment existant (art. R 421-7 du Code de l’Urbanisme).
Si l’immeuble est inscrit au titre des monuments historiques, il conviendra de solliciter un permis de construire (art. R. 421-16 du même Code).
Et dans les copropriétés ?
L’installation de panneaux photovoltaïques est possible en copropriété. Le porteur du projet (un copropriétaire ou un groupe de copropriétaires) devra obtenir l’autorisation du Syndicat des copropriétaires par décision à la majorité des voix de tous les copropriétaires, conformément à l’art. 25 f) de la loi du 10/07/1965, fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.
S’il s’agit d’une installation collective, le coût de l’installation, ainsi que les charges de fonctionnement et d’entretien des équipements seront répartis entre les copropriétaires en fonction de l’utilité que présente l’installation pour chacun des lots de copropriété (Rép. Ministérielle n° 29982, JOAN 08/06/2021).
Responsabilité du prêteur de fonds en cas de déblocage actif
En cas de crédit affecté, le banquier qui finance une telle installation est susceptible de voir sa responsabilité engagée dans l’hypothèse où il débloque les fonds alors que le bon de commande ou l’attestation de fin de travaux présenté par l’entreprise comporte une anomalie manifeste.
Sont-ils soumis à la garantie décennale des constructeurs ?
Rappelons que la mise en jeu de la garantie décennale (art. 1792 du Code civil) nécessite de démontrer que : Les travaux portent sur la construction d’un ouvrage. Les dommages compromettent la solidité de l’ouvrage ou, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination.
La Cour de cassation, dans un arrêt du 21 septembre 2022 , s’est prononcée sur l’application de la garantie décennale aux panneaux photovoltaïques.
Dans cette affaire, les travaux consistaient dans l’installation, en toiture d’un bâtiment dont la couverture existante avait été préalablement déposée, de panneaux photovoltaïques fixés sur des bacs-aciers supportés par les pannes de la charpente.
La Cour affirme que les panneaux photovoltaïques participant de la réalisation de l’ouvrage de couverture dans son ensemble, en assurant une fonction de clos, de couvert et d’étanchéité du bâtiment, constituent la construction d’un ouvrage soumis à la garantie décennale.
Les panneaux photovoltaïques constituant en eux-mêmes des ouvrages, elle affirme que l’article 1792-7 du code civil, qui prévoit que « Ne sont pas considérés comme des éléments d’équipement d’un ouvrage au sens des articles 1792, 1792-2, 1792-3 et 1792-4 les éléments d’équipement, y compris leurs accessoires, dont la fonction exclusive est de permettre l’exercice d’une activité professionnelle dans l’ouvrage », ne leur est pas applicable (alors même que le Maître de l’ouvrage (BN SOLAIRE) exerçait l’activité de producteur d’électricité).
Dans un deuxième temps, la Cour de cassation retient que le risque avéré d’incendie de la couverture du bâtiment, en raison de la combustion interne des boîtiers de connexion des panneaux photovoltaïques, rendait l’ouvrage impropre à sa destination. La garantie décennale devait donc s’appliquer.
Il est toutefois intéressant de se demander quelle aurait été la décision de la Cour de cassation en présence de panneaux photovoltaïques simplement fixés sur la toiture qui aurait été conservée.
S’agissant d’un élément d’équipement simplement adjoint à un existant, seule la responsabilité contractuelle de l’installateur serait applicable. Ils seraient donc exclus du champ d’application de la Garantie décennale.
Sources : J. DUVAL, « Aspects juridiques du développement de projets d’installations photovoltaïques », Fasc. N° 151, JurisClasseur Construction – Urbanisme ; Civ. 3ème, 21 septembre 2022, pourvoi n°21-20433 publié au Bulletin Civil.