Informations Juridiques

Prudence lors de l’utilisation d’une image dénichée sur internet !

Législation et digital. Lorsqu’on publie un contenu, il est facile de trouver sur internet l’image qui s’associera parfaitement avec son propos. Cette pratique est néanmoins risquée car les images sont rarement « libres de droit » et les réclamations fondées sur les droits d’auteurs ou la concurrence parasitaire de plus en plus courantes.

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Photo d'un homme d'affaires sur un ordinateur
(Crédit : FREEPIK)

Selon le Code de la propriété intellectuelle, l’auteur d’une oeuvre jouit, du seul fait de sa création et sans aucune formalité particulière, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous, et ce quels qu’en soient son genre, sa forme d’expression, son mérite ou sa destination. Toutefois, pour être éligible à la protection par le droit d’auteur, une oeuvre doit présenter un caractère original qui résulte traditionnellement de la démonstration du fait qu’elle porte « l’empreinte de la personnalité de son auteur » traduisant un effort créatif et un parti pris esthétique.

S’agissant d’une photographie, l’originalité pourra par exemple résulter de la mise en valeur du sujet, du choix délibéré des éclairages, de l’environnement, du cadrage ou de l’angle de vue. Or, l’utilisation d’une oeuvre protégée, sans le consentement du titulaire des droits, constitue une contrefaçon susceptible d’engager la responsabilité de l’utilisateur. À défaut d’originalité et donc de droits d’auteur, l’utilisation d’une photographie, sans autorisation, peut également constituer un acte de parasitisme, indemnisable sous l’égide de l’article 1240 du Code civil comme la concurrence déloyale. L’utilisateur va en effet réaliser une économie « injuste » en ne payant pas au propriétaire le droit d’utiliser la photographie alors que ce dernier a pu réaliser un investissement afin de l’acquérir (achat du matériel, rémunération du photographe, etc.).

Pour protéger leurs droits, de nombreuses banques d’images confient à des entreprises tierces le soin de surveiller leur utilisation sur Internet. Ces entreprises utilisent des logiciels qui scrutent les sites ou les réseaux sociaux afin de détecter la moindre utilisation. Dès qu’une utilisation illicite est détectée, elles émettent une réclamation sommant de payer une certaine somme d’argent à titre d’indemnisation de supposées atteintes aux droits d’auteur et/ou de concurrence parasitaire.

La pratique montre toutefois que ces photographies sont bien souvent banales et dénuées de toute originalité. Qu’il s’agisse de l’image d’un objet de la vie courante, d’une personnalité publique ou d’un lieu, les photographies dont les droits sont opposés traduisent que très rarement une réelle recherche esthétique. Il est souvent facile de trouver des photographies semblables, voire quasi- identiques, d’un même objet ou d’un même évènement pris par des photographes différents. Dépourvue de toute originalité, ces photographies ne peuvent pas bénéficier de la protection accordée par les droits d’auteur et aucune contrefaçon ne pourra alors être reprochée aux personnes qui les utilisent.

À titre d’exemple, nous pouvons noter un jugement du Tribunal judiciaire de Rennes du 6 mai 2024 qui s’est intéressé à une réclamation relative à une photographie représentant un bateau de croisière reproduite dans un journal de presse. S’agissant de l’originalité, les juges ont rappelé qu’elle doit se distinguer du savoir-faire technique, qui ne relève que de la compétence de l’artiste à réaliser une oeuvre, indépendamment de tout choix dicté par sa personnalité. C’est ainsi que lorsque l’artiste avançait un travail préparatoire d’étude du trajet du bateau pour avoir un temps d’avance, les juges ont répondu qu’à défaut, il aurait été bien en peine de photographier quoi que ce fut. Lorsqu’il avançait un choix d’une météo ensoleillée pour susciter l’envie d’une croisière, les juges ont répondu que ce choix était évident pour toute personne normalement diligente, car peu nombreux seraient les envieux d’une croisière sous la pluie. Aussi, si le cliché démontrait un savoir-faire certain, aucune originalité ne pouvait retenue et donc aucune contrefaçon reprochée.

En ce qui concerne les reproches fondés sur le parasitisme, les photographies peuvent en réalité ne représenter qu’un investissement très limité. Les réclamations émises portent donc très souvent, ou trop souvent, sur des photographies dont l’utilisation non autorisée ne cause en réalité aucun préjudice ou un préjudice extrêmement faible à leur propriétaire. Néanmoins, comme ont pu le souligner les juges rennois, un photographe professionnel peut réclamer, comme n’importe quel acteur économique, une rémunération de son travail. Aussi, si des moyens de défense existent en cas de réclamations, le risque de condamnation ne peut toutefois pas être exclu. C’est ainsi que le journal ayant reproduit le cliché du bateau s’est vu condamné à payer au photographe la somme de 1 500€ à titre de dommages et intérêts mais également à la somme de 3 000€ au titre de ses frais de procédure. Utiliser une image ou une photographie sans autorisation représente donc un risque financier certain, sans compter le fait d’être contraint d’engager des frais d’avocats, du temps et de l’énergie pour se défendre. Compte tenu de ce risque, la voie amiable est primordiale.

Voici nos conseils pour d’éviter de tomber dans ces embûches. Il est nécessaire de s’assurer, avant d’utiliser sur internet une photographie ou une image, que vous en disposez bien du droit. Pour ce faire, rien de plus simple. Il suffit de choisir la photographie sur une banque d’images qui propose des licences gratuites d’utilisation ou bien des licences payantes permettant par exemple une exploitation commerciale. Si c’est trop tard et que vous venez de recevoir une réclamation, vos premiers réflexes doivent être de ne pas l’ignorer et de supprimer immédiatement l’image ou la photographie. Nous vous invitons à prendre contact rapidement avec un avocat afin qu’il réalise une analyse de la réclamation et vous conseille sur les options qui s’offrent à vous.