Une rentrée dans un contexte économique inédit
Bilan. Lors de la rentrée solennelle du Tribunal de Commerce vendredi 20 janvier, Jérôme Prince, président de la juridiction et Cyrille de Crépy, vice-président, ont retracé l’année écoulée.
Si l’on constate une hausse réelle des procédures collectives en 2022 par rapport à l’année 2021 avec + 46 % d’ouvertures de procédures collectives, ce chiffre est à mettre en perspective avec la hausse de + 61 % de jugements de liquidations judiciaires qui confirme que les entreprises se sont présentées trop tardivement devant le tribunal.
Ainsi que l’a précisé Monsieur le vice-président Cyrille de Crépy, ces « liquidations judiciaires sont le revers du “quoi qu’il en coûte” qui a heureusement permis à l’économie française de traverser la crise Covid » mais « toutes les entreprises françaises ont été indistinctement aidées, permettant à celle dont les résultats apparaissaient déjà trop fragiles pour perdurer de proroger de quelques mois leurs activités. »
Le cadre étant posé, le tsunami de faillites tant redouté depuis mars 2020 ne s’est pas produit tant au niveau de la juridiction dijonnaise qu’au niveau national.
Si l’on constate 39.278 ouvertures de procédures collectives en 2022, le nombre d’ouvertures reste en baisse de 28 % par rapport à 2019 et 24,2 % par rapport à 2018. De plus 94 % des procédures collectives ouvertes en 2022 concernent des entreprises de moins de dix salariés. Dijon suit par ailleurs la tendance nationale concernant les secteurs impactés savoir commerce, construction et hébergement/restauration.
Un contexte économique inédit depuis plusieurs années
Après avoir rappelé le dévouement que la fonction de juges-consulaires impose à ces bénévoles, Monsieur Prince a évoqué la situation économique inédite de ces dernières années qu’ont été la crise des gilets jaunes, la Covid, la pénurie des matières premières, et la pénurie de main d’œuvre entre-autre.
Il poursuit en indiquant que « face à tant de difficultés, les chefs d’entreprises ont démontré leur force de résilience. » Monsieur le Président Prince pour suit son intervention en précisant que « le niveau d’endettement des entreprises n’a jamais été aussi élevé. »
Les entreprises se sont endettées pour réaliser des investissements productifs et créer de la valeur ajoutée mais la masse des prêts garantis par l’état (PGE) est venu s’ajouter à l’endettement en cours. Aujourd’hui les entreprises doivent faire face au remboursement des PGE, au remboursement des décalages de charges obtenus en 2020 et 2021.
Les trésoreries des entreprises sont mises à mal. Si le « quoiqu’il en coûte » a été nécessaire, des aides plus ciblées seraient désormais préférables. Aujourd’hui, la recherche d’emploi au sein des entreprises est une difficulté grandissante. « Ce problème devient structurel, sociétal, la Covid a bouleversé la vie des gens et la valeur travail n’a jamais été aussi malmenée » précise-t-il.
Les procédures de prévention sont confidentielles
Une fois encore, le Président de la juridiction commerciale rappelle que « la solution efficace réside dans les procédures de prévention amiables […]. » En effet, les procédures de mandat ad’hoc ont augmenté en 2022 de 142 % par rapport à 2021 et les conciliations de 500 % sur la même période de comparaison.
Cela signifie que « la communication et l’information circulent mieux auprès des chefs d’entreprises grâce à tous les partenaires de ces dernières notamment CCI, Banque de France, syndicats professionnels, experts-comptables, et avocats notamment ». Monsieur Prince se « félicite de la création du Groupement de prévention Agréé – GPA – qui a pour vocation d’aider bénévolement les chefs d’entreprises en difficulté très en amont, et l’association 60.000 REBONDS dont le travail remarquable permet à de nombreux dirigeants de rebondir après une liquidation judiciaire. »
Il est incontestable que les chefs d’entreprise ont besoin d’être et Monsieur Prince souligne « qu’il est peut-être urgent et de notre responsabilité morale de créer une antenne APESA à Dijon pour offrir un soutien psychologique […]. »
Vers un tribunal des activités économiques
Dans le cadre des états généraux de la justice, Monsieur le Garde des Sceaux a renouvelé sa confiance en la juridiction commerciale. Parmi les mesures annoncées, il y a celle de la création du Tribunal des Activités Économiques (TAE) qui sera compétent pour connaître de toutes les procédures amiables et collectives, quels que soient le statut et le domaine d’activité des opérateurs économiques concernés.
Cela concernerait donc les agriculteurs, certaines professions libérales, les SCI et les associations.
- Nous remercions Monsieur le Président Jérôme Prince et Monsieur le Vice-Président Cyrille de Crépy pour leur contribution au présent article grâce à leur discours de rentrée. Source statistiques nationales : CNAJMJ.