À Dijon, dans le milieu économique, quand on évoque Bruno Duchesne, c’est sa fonction de directeur général de la Banque Populaire de Bourgogne Franche-Comté (BPBFC) qui vient de suite à l’esprit. Il faut dire qu’il a occupé ce poste presque une décennie avant de faire valoir son droit à la retraite en 2021. Dans un premier portrait réalisé en 2014, il nous confiait avoir enfilé le costume de banquier par le plus grand des hasards, n’ayant aucun ancêtre grand argentier, cambiste ou amateur de coffres-forts dans sa famille. Et si enfant, il n’aurait pas misé un centime sur une telle destinée professionnelle, c’est bien son appétence pour les études et un indéniable esprit d’ouverture qui l’amèneront à embrasser cette voie.
De même, c’est le besoin de transmettre les savoirs acquis et cette quasi “seconde peau” de pédagogue - si appréciée en conférence de presse - qui le place aujourd’hui à la présidence du conseil de surveillance de la Burgundy School of Business (BSB). Bruno Duchesne est diplômé de l’Essec, grande école de commerce parisienne, titulaire d’un DEA en Sciences de gestion et d’un Master en management de l’EM Lyon. « J’ai fait deux troisièmes cycles. Des études que j’ai alternées avec des périodes d’emploi à temps plein ou que j’ai suivies tout en travaillant : pouvoir faire des allers-retours entre l’entreprise et la formation, c’est une chance. C’est un peu comme apprendre à faire du vélo : tout en gérant petit à petit son équilibre et la dynamique de l’engin, on avance ».
Des liens précoces avec BSB
Au cours des années 1980, il évolue entre Paris et Lyon, multipliant les expériences professionnelles, intégrant notamment une société de service informatique. Un secteur d’activité qui sera son sésame pour le groupe Caisse d’Épargne où en 1989, il est recruté en tant que directeur général adjoint du GIE informatique de la banque à l’écureuil, le CT4R. Lui, qui avait fait ses débuts dans l’analyse financière chez Axa va alors enchaîner les postes de dirigeant au sein des Caisses d’Épargne de Franche-Comté (CEFC) et de Rhône-Alpes Lyon (CERA).
En 1997, il est ainsi membre du directoire, en charge des activités bancaires, de l’organisation et de l’informatique de la CEFC. En 2000, on le retrouve à la CERA en qualité de membre du directoire en charge de l’exploitation bancaire puis du pôle ressources. Sept ans plus tard, toujours à cette enseigne, il prend la responsabilité du pôle banque de détail et est nommé fin 2011 directeur général.
Enfin, un an après, il pose ses valises à Dijon et devient le directeur général de la BPBFC. À ce poste, son attrait jamais démenti pour l’enseignement l’amène à contribuer très tôt à un rapprochement entre la BPBFC et la BSB, soutenant, entre autres, la création dès son arrivée d’une chaire en microfinance et le lancement en 2017 de la salle des marchés Bloomberg : « avec ce dispositif innovant, l’école de commerce était mieux équipée que nos équipes internes à la banque », se souvient Bruno Duchesne avec le sourire. Il parrainera également sur trois ans une promotion d’étudiants et sera le premier président de la Fondation BSB.
C’est donc tout naturellement que l’on retrouve en 2021 le jeune retraité sous les atours d’un professeur au sein du campus lyonnais de BSB, mais également comme membre du comité stratégique de l’école qui compte entre quatre et cinq personnes. Bruno Duchesne enseigne logiquement l’économie et la gouvernance d’entreprise où il a toute légitimité par ses expériences passées notamment comme responsable de comités d’audit et ses différentes implications régionales et citoyennes au conseil des prud’hommes (5 ans) et au tribunal de commerce (15 ans).
« À l’époque, je trouvais déjà que détenir ce type de mandats était un bon moyen pour un banquier de toucher du doigt le réel, de vivre l’envers du décor de la vie des entreprises, raconte-t-il. Au tribunal de commerce j’ai ainsi participé à entre 3.000 et 4.000 décisions de justice. Cela m’a ouvert à d’autres réalités et c’est, à mon sens, quelque chose de vital, sinon on finit par rester coincé dans sa propre spécialisation. Encore aujourd’hui, en cours, je me sers de ma “première vie” pour donner du sens aux chiffres, raccrocher des notions économiques parfois absconses à la réalité. Par exemple, quand j’évoque l’endettement de la France, les chiffres sont si stratosphériques que les étudiants peinent à en comprendre la portée. À l’inverse, si je leur dis : c’est comme si vous aviez 30.000 euros de salaire annuel brut et que vous dépensiez 50.000 euros par an, alors que vous avez déjà 300.000 euros de découvert, là, ça leur parle ». Plus inattendu, l’ancien homme de la finance enseigne également la philosophie, « des cours d’humanité » comme il se plaît à les décrire.
« S’ouvrir à d’autres réalités, c’est quelque chose de vital, sinon on reste coincé dans sa propre spécialisation. »
Un éclectisme et une curiosité fils rouges de son parcours, qui ne sont pas sans rappeler son choix de seconde langue aux épreuves du Bac : l’occitan. Un dialecte qu’il aime encore pratiquer. « J’ai toujours eu cette envie de transmettre, de partager, avoue-t-il. C’est un vrai plaisir d’être au contact des jeunes, de comprendre leurs préoccupations actuelles, leur relation au travail… C’est à la fois s’inscrire dans le réel, dans le présent et se projeter dans l’avenir : c’est hautement stimulant ». Le 27 mars, Bruno Duchesne est élu président du conseil de surveillance de la BSB. Il succède alors à Gérard Desbois resté dix années à cette fonction.
« Je souhaite avec ce mandat assurer la poursuite du développement de la BSB. Il y a d’abord ce statut d’Établissement d’enseignement supérieur consulaire (EESC) que je m’attacherai à préserver, tant il offre d’atouts. Il cumule la transparence et la facilité de gestion d’une société anonyme sans la distribution de dividendes. Ici, tous les bénéfices vont au profit des étudiants et de l’établissement. Souvent les grandes écoles intègrent à leur capital des fonds d’investissements. Je ne suis pas pour cette solution qui ne peut que conduire à terme à des conflits d’intérêt, face à des investisseurs motivés par la seule quête de rentabilité ».
Réitérer à Lyon le succès dijonnais
Bruno Duchesne entend également soutenir l’excellence académie de BSB. « Notre école est triplement accréditée : AACSB, Equis et AMBA. Elle fait ainsi partie du cercle très fermé (moins de 1% dans le monde) des grandes écoles de management détentrices de ces trois labels internationaux de référence. C’est quelque chose que l’on doit conserver et sur lequel nous devons rester vigilant, car si de loin le classement des grandes écoles semble assez figé, il n’en est rien : il y a des écoles qui régressent, voire qui disparaissent », alerte celui qui est également attaché à l’ancrage bourguignon de la BSB. « De mon expérience de mobilité, j’ai constaté qu’il y avait des marqueurs dans les territoires : ce peut être une gare, un aéroport ou une grande école. À ma connaissance, il n’y a qu’une métropole régionale qui n’a pas d’École supérieure en France. À Dijon, la BSB, c’est 3.000 étudiants, c’est une vraie PME avec des professeurs qui viennent d’un peu partout dans le monde, c’est fascinant : on est dans la création intellectuelle ! » S’enthousiasme Bruno Duchesne.
« Notre projet pédagogique UP2027 va dans ce sens avec deux éléments auxquels je suis particulièrement attaché : le parcours d’accompagnement des étudiants, personnalisé en fonction des besoins uniques de chacun. Baptisé Pathfinder, il a ce slogan que j’apprécie : “Nous accompagnons l’étudiant jusqu’à son premier job pas seulement vers son diplôme” et, bien sûr, le projet de nouveau campus lyonnais, avec cette idée que là où tout le monde va à Paris, nous nous choisissons d’être plus originaux avec l’ambition d’être la deuxième école de commerce de Lyon ». Situé dans le huitième arrondissement, le projet de 8.200 mètres carrés devrait permettre d’accueillir 2.500 étudiants à partir de septembre 2025. Il représente un investissement total de plus de 40 millions d’euros.