Charles du Dresnay
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Charles du Dresnay

Banquier et citoyen

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Photo de Charles du Dresnay
Charles du Dresnay : « Je ne suis pas quelqu’un qui aime trop nécessairement se mettre en avant. Donc je trouve que c’est bien comme positionnement. Je trouve qu’on accompagne bien la transformation du territoire et donc je suis très à l’aise avec ça et très satisfait de pouvoir y contribuer avec mes belles équipes à mon niveau. » (Crédit : Banque des Territoires BFC.)

Une banque oui, mais au service du développement local ; un banquier oui, mais au service de l’intérêt général : tels sont les moteurs de l’action de Charles du Dresnay, nommé le 1er septembre dernier à la tête de la Banque des territoires en Bourgogne Franche-Comté. Une conviction que l’on ne peut lui disputer puisqu’à 48 ans tout juste, il a fait toute carrière au sein du groupe Caisse des dépôts dont Banque des Territoires est un des « métiers ». « Je suis un bébé Caisse des Dépôts, même si je ne devrais pas le dire comme cela, confie-t-il tout sourire. Quand on parle de foi publique, de tiers de confiance ou d’accompagner le développement des territoires, c’est ancré. Peut-être parce que j’ai grandi à la campagne et que j’ai eu conscience tôt de ces problèmes d’aménagement du territoire. Je me sens très bien d’avoir fait ce choix du service public. Cela a du sens ; sinon, je n’y serais pas resté aussi longtemps, c’est certain ».

Une carrière en mobilité

Après une maîtrise d’histoire et Sciences-Po Paris, Charles du Dresnay intègre le 1er septembre 2005 le réseau Caisse des Dépôts à Orléans et va peu à peu gravir les échelons : il instruit les dossiers, puis est en charge des investissements. Il rejoint ensuite Châlons-en-Champagne, avant la fusion des régions, où il couvre la Haute-Marne. « Cela m’a amené à investir sur des projets très divers, du château de Sedan jusqu’à des bâtiments industriels comme LDR Medical par exemple », se souvient-il. Puis direction Strasbourg et la région Grand Est à la création des grandes régions où il est responsable des affaires régionales. En 2017, toujours à Strasbourg, il occupe des fonctions plus internes comme secrétaire général de la Banque des territoires, avant d’être nommé en 2020 en région PACA à Marseille comme directeur régional adjoint. « Je me suis occupé notamment des sujets d’investissement dans une très belle région que je connaissais pas mais que j’ai appris à découvrir, qui est vraiment magnifique. » Cinq ans plus tard, le voilà donc à la tête de la Banque des Territoires en BFC, où nous l’avons rencontré trois petites semaines après son entrée en fonction. « J’arrive dans une démarche de grande humilité parce que c’est un territoire que je ne connais pas bien. Je connais un petit peu l’ouest de la région comme touriste, mais pas très bien la région Bourgogne Franche-Comté ».

Mais si le décor change, pas les fondamentaux de la Banque des Territoires en cohérence avec la feuille de route émise par sa gouvernance nationale. « Olivier Sichel, qui est directeur général de la Caisse des dépôts depuis juin, et Antoine Saintoyant, directeur de la Banque des Territoires depuis juin également (et Jurassien d’origine soit dit en passant), ont réaffirmé nos trois priorités stratégiques : la transition écologique et énergétique ; la cohésion sociale et territoriale et les souverainetés. Je m’inscris évidemment dans cette logique-là : ces priorités stratégiques, je les décline en fonction des atouts et des besoins spécifiques de ce territoire. » Un territoire, la BFC, dont Charles du Dresnay a déjà pris la mesure des forces (un tissu industriel dynamique, une attractivité touristique affirmée…) mais aussi des handicaps : une vaste région à dominante rurale promise au vieillissement de sa population dans une démographie en déclin. Avec également, souligne-t-il, un avantage supplémentaire par rapport à d’autres régions : une insertion plus forte de la Banque des Territoires dans un écosystème où les sphères publiques et privées ont appris à travailler ensemble : « Il y a une présence très forte de l’économie mixte que j’identifie comme un atout. »

Accompagner le développement

Pour Charles du Dresnay, la question de la souveraineté industrielle « que l’on va accompagner avec nos outils : du prêt, de l’investissement et de l’ingénierie », lui apparaît comme un enjeu de premier plan, tout comme l’adaptation aux réalités humaines de la région, notamment en finançant des établissements dédiés au grand âge ou à l’enfance en difficulté : en 2024, l’établissement a par exemple accompagné la Nièvre (10 M€ de prêts pour sa Maison de l’enfance et de la famille de 79 places), ou la Côte-d’Or pour la réhabilitation de la Maison d’enfants à caractère social de Semur-en-Auxois qui accueille 46 enfants avec 4,7 M€ de prêts. Deux villages SOS d’Enfants verront le jour dans le Doubs pour accueillir au total 100 enfants dès 2026 : la Banque des Territoires a mobilisé 13,7 M€ de prêts pour ces deux projets... Un motif de fierté pour le directeur régional. « Nous accompagnons les politiques publiques, ce n’est pas nous qui les définissons, nuance Charles du Dresnay. Mais nous avons des priorités stratégiques qui correspondent sans doute à des priorités pour notre pays. Enfin c’est comme ça qu’on le perçoit. Que ce soit localement ou nationalement, on accompagne les collectivités qui ont une vision pour leur territoire et quel que soit le territoire. » Voilà pourquoi, à rebours d’une banque traditionnelle, la Banque des Territoires finance des projets et pas des budgets, en y appliquant sa propre grille de critères, incluant notamment une ambition environnementale forte qu’elle adosse dans ce cas à des bonifications sur les prêts accordés. Cela permet ainsi de traiter chaque projet avec sérénité et souci de justice, tout en jouant le rôle de tiers de confiance auprès des opérateurs privés, plus enclins à investir dans les métropoles que dans les bourgs ruraux. Et pourtant, c’est fondamental, insiste Charles du Dresnay. « Il y a là des enjeux d’égalité de droit, d’égalité d’accès aux services publics, d’accès à la mobilité pour avoir des conditions de vie dignes, qui permettent une cohésion sociale et de ne pas avoir le sentiment d’être déclassé. C’est un engagement citoyen et c’est une chose qui me parle - dans ma fonction, évidemment : accompagner les politiques publiques, les hommes et femmes politiques qui ont une vision pour leur territoire et qui transforment leur territoire au service des citoyens. Je trouve que ça a beaucoup de valeur. »