Dans le Talmud, livre fondamental de la religion juive il est dit que : « Le monde se maintient par trois choses ; par la vérité, par la justice et par la concorde [...] ». Cette dernière qualité qui se définit comme l’union des coeurs et des volontés, qui produit la paix et la bonne entente est, à n’en point douter, l’un des fils conducteurs de la vie de Dominique Grevey, président nouvellement élu de l’Université de Bourgogne Franche-Comté (UBFC). Depuis son plus jeune âge, notre homme est mû par le collectif et l’esprit d’ouverture.
Son appétence pour les sciences naît au lycée, de la rencontre avec un « professeur de physique-chimie extraordinaire ». Son doctorat obtenu, en 1988, à l’Institut national des sciences appliquées (INSA) de Lyon en Génie des procédés et sciences des matériaux et plus particulièrement sa thèse sur l’interaction laser-matière dans le cas d’impulsion de courte durée appliquée à la transformation structurale d’un alliage fer-nickel, le confortent dans son choix de carrière. « Je me suis éclaté ! », lâche-t-il. « Le passage de la caractérisation d’un phénomène à sa modélisation est un des aspects de la recherche qui me parle le plus. C’est cette notion de représentation d’un système complexe sous une forme plus facile à appréhender, et qui permet de fait sa mise en oeuvre dans le monde réel, qui m’ont amené à oeuvrer pour davantage de liens et d’ouverture entre les laboratoires de recherche et l’extérieur », explique Dominique Grevey.
De 1989 à 2004, ce professeur des universités a été directeur des études puis chef du département Mesures Physiques à l’Institut universitaire de technologie (IUT) du Creusot, où il a même été à l’origine de la création d’une licence professionnelle Laser, avant de devenir chef de projet pour la création de l’IUT de Chalon-sur-Saône. « Quand, je suis arrivé en 1989, le mur de Berlin venait de tomber. La science vivait un véritable changement de paradigme. Hier, c’était les premiers pas sur la lune, la recherche bombait le torse : vitrine de la puissance internationale d’une nation. Après 1989, les changements sociétaux font voler en éclats bien des repères. La science se redéfinit à l’aune des attentes sociétales et de la reconstruction de ces repères ».
Acteur de la valorisation de la recherche
Constructeur et fédérateur dans l’âme, Dominique Grevey développe son parcours dans la recherche en créant et dirigeant, de 1994 à 2007, le laboratoire « Laser et traitement des matériaux », aujourd’hui intégré au laboratoire interdisciplinaire Carnot de Bourgogne. En parallèle, il va s’investir pleinement dans le domaine de la valorisation de la recherche en occupant successivement les fonctions de directeur de la cellule de valorisation, de chargé de mission, d’animateur du réseau régional des plateformes technologiques et de vice-président chargé de la valorisation à l’université de Bourgogne.
« L’université n’est pas seulement ce lieu où l’on crée le savoir, c’est aussi un véritable canal de diffusion pour ce dernier. L’université par les relations fécondes qu’elle initie avec les jeunes, les entreprises, les politiques et autres décideurs dans des domaines aussi variés que la santé, l’alimentation, l’environnement, les sciences sociales... participe pleinement à la construction de l’avenir des territoires ». Acteur convaincu de l’importance de la valorisation de la recherche et du transfert de technologie, il prend la direction de l’incubateur régional de Bourgogne lors de sa transformation en 2004.
« Nous devons fédérer bien au-delà des frontières académiques : relancer la flamme de tout un territoire ».
Puis de 2006 à 2009, participe à la mise en place du dispositif de maturation et de mutualisation du transfert de technologie bourguignon, Synerjinov, labellisé par le ministère en charge de la Recherche. Enfin, de 2010 à 2012, Dominique Grevey coordonne la mise en place de la stratégie de candidature au Programme d’investissements d’avenir (PIA), en binôme avec le président de l’université de Franche-Comté Jacques Bahi, des établissements du Pôle de recherche et d’enseignement supérieur (PRES) Bourgogne Franche-Comté.
Jouer collectif pour gagner en visibilité internationale
Autant de missions qui donnent à Dominique Grevey une vision systémique du monde universitaire et qui amène - cet homme qui pense collectif, sans calcul, ni jeux, qui dit plus souvent “nous” que “je” - à prendre les fonctions d’administrateur provisoire de l’UBFC le 23 juillet 2020, avant d’en devenir son président le 2 décembre. Parmi ses objectifs prioritaires, Dominique Grevey ambitionne de renforcer les bases de l’université fédérale afin de lui permettre de passer avec succès l’évaluation du projet ISITE-BFC (Initiatives Science Innovation Territoire Économie en Bourgogne Franche-Comté) prévue début avril.
« Cette année s’annonce d’ores et déjà pour notre université fédérale UBFC et ses établissements membres fondateurs (université de Bourgogne, université de Franche-Comté, UTBM, ENSMM, AgroSup, BSB, Arts et Métiers) sous le signe du renouveau : avec la pérennisation d’ISITE que nous appelons de nos voeux, mais aussi avec une nouvelle présentation de notre offre de formation avec la mise en place de Graduate School. Cette école universitaire de recherche offre davantage de continuité entre le master et le doctorat. Initié par nos laboratoires mondialement reconnus : Femto-ST, ICB et IMB ainsi que leurs partenaires, ce projet vise à créer un environnement technologique hautement compétitif et à la pointe de la technologie, destiné aux étudiants de doctorat et de master en sciences venant du monde entier ».
Si Dominique Grevey, avoue qu’UBFC a connu un lancement et une “adolescence” compliqués, les voyants sont, pour lui, actuellement tous aux verts. « On a tâtonné, on s’est bagarré... Mais aujourd’hui on a gagné en maturité. On a un modèle fédéral solide, on avance, on construit, on dialogue... Nous sommes rentrés dans une phase normale de développement et je suis assez confiant quant à l’avenir, même si nous devons rester vigilant, être toujours vif et dynamique, sans cesse, faire nos preuves. Nous avons de belles réussites en BFC, des médailles nationales, des raisons d’être fiers. Nous avons un potentiel énorme, cependant nous restons tout petit face à la concurrence nationale et internationale. Pour améliorer notre attractivité, gagner en pertinence, nous devons porter la création des savoirs toujours plus haut, viser l’excellence, offrir à tous les chercheurs qui le veulent la possibilité de pouvoir faire plus », défend Dominique Grevey.
Viser l’excellence
Cette quête qui doit permettre à l’UBFC de figurer aux meilleures places dans les classements internationaux de type Shanghai, en atteignant la « masse critique » suffisante pour exister sur le plan mondial, doit notamment passer par un accompagnement des chercheurs dans leur démarche de réponse aux appels à projet. « Nous devons faire en sorte que ces procédures de recherches de financements soient, sur le terrain, les plus simples possibles pour ceux qui ont “les mains dans le moteur”. »
L’autre enjeux de la visibilité et de la notoriété de notre écosystème tient « à notre capacité à travailler ensemble et à fédérer bien au-delà des frontières académiques. À ne plus être dans la concurrence, mais dans l’enrichissement mutuelle, dans la spécialisation des site universitaires. À mettre en place des synergies qui vont bien, développer toutes les dynamiques collectives, relancer la flamme territoriale. Aujourd’hui je sens une vraie volonté nouvelle de travailler ensemble, de faire naître une authentique concorde ».