Gabriel Perronneau
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Gabriel Perronneau

Du miel dans les veines.

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Photo de Gabriel Perronneau
Gabriel Perronneau a dessiné le logo de son entreprise la Maison Perronneau en y intégrant un ours, une représentation de son père protecteur et gourmand de miel. (Crédit : Nadège Hubert)

Les diplômes ne font pas tout et Gabriel Perronneau en donne le parfait exemple. Après un Bac sciences et techniques de gestion obtenu au lycée Saint Bénigne, ce fils et petit-fils d’apiculteur se cherche un peu. Passionné de rap, il rejoint une école de musique lyonnaise avec l’ambition de devenir technicien du son.

Après deux ans, il finit son parcours sans obtenir son diplôme. Il opte ensuite pour un service civique chez Radio Dijon Campus où il travaille comme technicien son. « A côté, je faisais aussi de la livraison de pizzas le soir mais aussi des livraisons pour Apidis, l’entreprise familiale. Gamin, j’ai toujours trainé dans les pieds de mon père au milieu des ruches et il m’emmenait sur les routes avec lui pour livrer le miel » se souvient le trentenaire athlétique. Depuis 1890, la famille Perronneau produit, conditionne et commercialise du miel ainsi que des produits dérivés. D’ailleurs Gabriel Perronneau porte le prénom de son grand-père tandis que son père Pascal a fait grandir l’entreprise familiale aux côtés de ses frères.

De père en fils

En 2013, Gabriel Perronneau reprend ses études pour intégrer un BTS Gestion des PME – PMI au sein de la CCI de Côte-d’Or. « Je n’ai pas obtenu mon diplôme parce que, même si j’avais de bonnes notes, je manquais d’assiduité. J’étais en alternance mais je passais plus de temps à donner un coup de main à mon père chez Apidis, y compris pendant les cours. Les profs me disaient qu’ils savaient ce que c’était qu’une entreprise familiale mais ils ne connaissaient pas mon père ! » Au fil des ans, son père développe l’entreprise familiale sous l’œil de son fils. « Il a installé le miel mais aussi d’autres produits alimentaires dans les jardineries alors que cela ne se faisait pas. Il a commencé par proposer du miel à Noël puis d’autres produits du terroir comme les nonettes au miel. Aujourd’hui, ce rayon représente en moyenne 17 % de leur chiffre d’affaires. »

Ce grand blond ne cache pas la fierté qu’il a pour son père, l’homme qui lui a tout appris du métier d’apiculteur autant que de celui de commercial. « Un jour, mon père m’a donné les clés d’un véhicule et l’adresse d’un salon où je devais aller en Bretagne en me souhaitant bonne chance. Il m’a toujours dit que je me débrouillerais alors j’ai fait. » S’il reconnait que son père se montrait parfois dur avec lui, Gabriel Perronneau est reconnaissant de ce qu’il lui a transmis, tout naturellement, et de la confiance qu’il a eue en lui, faisant de lui l’homme qu’il est aujourd’hui. « Il m’a toujours traité comme son égal. Il n’a jamais fait dans la dentelle mais il m’a formé. »

La fin d’une époque

Sans son BTS, après sa période en alternance, Gabriel Perronneau intègre à temps complet l’entreprise familiale Apidis comme assistant commercial en 2015. Quand son père prend la présidence de l’entreprise après le décès de ses propres parents et la retraite de ses frères, Gabriel Perronneau prend la suite de son géniteur en tant que responsable grands comptes. « Je gérais alors 80 % du business d’Apidis. »

Malheureusement, en juillet 2022, Pascal Perronneau décède, emporté par une maladie fulgurante. Ses yeux bleus légèrement embués, Gabriel Perronneau revient sur les derniers moments partagés avec son père avant qu’il ne devienne lui-même père quelques semaines plus tard. En parallèle, sa tante et son cousin reprennent la direction de l’entreprise familiale. « J’ai continué à travailler chez Apidis sans mon père, avec une politique qui n’était plus en phase avec ce que j’avais connu. » En mars 2024, la nouvelle direction le licencie.

Même s’il est obligé de quitter l’entreprise familiale où il a tout appris de son mentor de père, Gabriel Perronneau n’en a pas perdu sa passion pour le métier d’apiculteur. « Je ne sais faire que ça et j’aime ce que je fais. Je voulais continuer en mémoire de mon père. » Amusé, il revient sur une anecdote marquante, parmi tant d’autres. « La ruche s’était renversée dans le camion. Entre 40 000 et 60 000 abeilles avaient envahi l’habitacle et tout le véhicule. J’ai attendu la nuit pour qu’elle retourne dans la ruche mais comme j’étais en plein bois de Boulogne, ma camionnette à l’arrêt à susciter la curiosité des gendarmes… »

Un nouveau départ au milieu des ruches

Fort de son expérience et du savoir-faire que lui a transmis son père, Gabriel Perronneau lance sa propre activité en avril 2024 avec la Maison Perronneau. A Marcellois, entre Sombernon et Vitteaux, il adapte une ferme des années 50 en ferme apicole dédiée à l’élevage d’abeilles reines. « J’ai aujourd’hui une centaine de colonies de 30 000 abeilles. Quand certains professionnels achètent leur reine, je fais du greffage pour les élever et obtenir une génétique adaptée à ma vision de l’apiculture douce et raisonnée. » En complément, l’apiculteur dispose de 200 ruches en production qu’il installe dans l’Auxois mais qu’il emmène également en transhumance dans toute la région pour obtenir des saveurs de miel aussi variées que la région comme le sapin du Morvan.

Photo de Gabriel Perronneau
Sur les traces de son père, Gabriel Perronneau a lancé son activité d’apiculteur, éleveur et producteur. (Crédit : Maison Perronneau)

Après avoir produit 3,2 tonnes de miel pour cette première année d’exploitation, victime de mauvaises conditions météorologiques, il espère faire mieux l’an prochain et élargir sa gamme de dix miels. En plus de ce nectar, il produit quelques dérivés comme des bougies ou de la pâte à tartiner qu’il fabrique lui-même tandis qu’il vend également des savons et des bonbons réalisés à partir de son miel, sur sa boutique en ligne. « Bientôt, je proposerai aussi de la moutarde au miel que je fais moi-même. » En 2024, l’apiculteur a été récompensé de la médaille d’argent du concours des miels de France. A termes, Gabriel Perronneau se fixe l’objectif d’atteindre 320 à 400 ruches en production et de développer la commercialisation de reines et d’essaims avec un élevage et une génétique maitrisée. D’ici là, il sera devenu père pour la seconde fois.