L’histoire de Justine Stevenot est celle d’une renaissance, celle d’une jeune femme à la vie toute tracée à qui elle a choisi, « pour se sauver » assure-t-elle de tourner le dos et de laisser libre cours à ses véritables envies. « Prédestinée à aider les autres », elle débute des études dans l’optique de décrocher un bac SST - sciences et techniques sanitaires et sociales.
Pas emballée par le volet scientifique de la filière, elle repart à zéro dans la voie littéraire avant d’enchaîner sur un BTS informatique... puis un BTS communication et une licence commerciale, ces deux derniers en alternance. L’idée est d’obtenir un emploi stable qui ferait plaisir à son entourage : « Ça me rassurait de les rassurer ».
Et c’est ainsi qu’elle finit par devenir successivement assistante communication à la SNCF, assistante commerciale, technico-commerciale, chargée de communication dans diverses sociétés... avant d’intégrer un immense réseau notarial de la région BFC. Marketing, communication, « SAV »... Justine Stevenot a une carrière sur les rails, un salaire confortable, mais au bout de quelques années, elle étouffe littéralement.
C’est lorsqu’elle célèbre ses 30 ans que lui vient le déclic : « J’étais enfermée dans un boulot où je ne me retrouvais pas. Il me fallait reprendre mon souffle et aller vers quelque chose qui était moi. » Pour faire quoi ? Elle n’en sait encore rien. Mais une chose est certaine : elle doit sauver sa peau.
Déguisée en buisson
Heureusement, les bonnes fées lui ont offert à la naissance un don qu’elle admet avec beaucoup d’humilité : celui de savoir créer. Photographie, dessin...sans avoir jamais appris de manière académique, Justine « sait » d’instinct. Et ce qu’elle ne sait pas, elle l’apprend avec acharnement, en autodidacte - ce qui, lorsqu’on voit son travail, laisse un peu pantois.
Et ses meilleurs professeurs sont... les oiseaux sauvages, auxquels elle voue une vraie passion. Ce sont eux qui lui ont enseigné, sans même le savoir, tout ce qui lui sert aujourd’hui : la patience, l’observation, le souci du détail.
Et pourtant tout avait bien mal commencé : « déguisée en buisson », avec tout le matériel de camouflage, ses premières tentatives de rencontre avec les messagers du ciel se soldent par de cuisants échecs. Sauf que ceux-ci, au lieu de la décourager, galvanisent au contraire son ardeur.
« Mes réussites proviennent de ce que j’ai raté, c’est là que j’ai le plus appris », avoue-t-elle dans un grand sourire. Et donc, « à force de ne rien voir passer », Justine potasse donc tout ce qu’elle peut et affine ses observations. « J’ai fini par savoir lesquels volettent, sautillent, ceux qui font leurs nids en hauteur, ceux qui aiment les buissons à fruits... »
« Ma vie d’avant était pour les autres. Ça me rassurait de les rassurer. Maintenant c’est : bienvenu moi ! »
Elle apprend - en autodicate comme toujours - les cris et les chants... « Comme ça, je savais lesquels seraient présents et comment il fallait que je me prépare ! Ça a aiguisé mes réflexes, m’appris à être fluide et à faire mes réglages. »
Car ses expéditions ont un but : la photographie de ces oiseaux sauvages. Puis, Justine passera des plumes aux poils et développe entre 2015 et 2019 - tout en ayant gardé ses activités disons, « classiques » - sa propre société de photographie professionnelle. Il faut dire qu’elle possède un modèle hors pair en la personne de Louxor, son chien berger blanc suisse, trouvé après huit ans de visites de tous les élevages de France.
« Il est mon reflet ! Je voulais un chien de cette race, je les trouvais mystérieux et fragiles. Et ce sont les seuls à rester aussi beaux de chiot à chien adulte ! » Et si en 2019 Justine raccroche, ce n’est pas faute de clients, bien au contraire, mais parce qu’elle n’arrive plus à suivre : « Je n’arrivais pas à dire non. C’est très compliqué ! Toujours ce besoin de faire plaisir... »
Créer de la beauté
L’histoire aurait pu s’arrêter là, mais son trentième anniversaire, et les mises en garde de son médecin sur son état de santé viennent lui rappeler que son destin, sur cette planète, n’est pas de mener une vie cadrée. En 2023, elle parvient enfin à quitter son employeur dans des conditions satisfaisantes.
Elle, qui ne dessinait plus depuis des mois, qui avait remisé l’appareil photo, retrouve le chemin de la créativité et surtout d’elle-même : « J’aime créer de la beauté, j’adore ça ! » Justine Stevenot photographie, mis en sommeil, devient Hellostevenot. Sous ce nom, la jeune femme propose plusieurs types de prestations : du graphisme, de l’illustration - elle a par exemple créé l’univers visuel de la blogueuse dijonnaise « Les carnets de Loubaska », travaille en ce moment pour la commune de Fontaine-lès-Dijon -...et de la photographie animalière qui lui ressemble : malicieuse, minutieuse et destinée non pas seulement à révéler la beauté de Médor, Minouche ou Bubulle, mais surtout leur vérité.
À une photo posée classique, Justine Stevenot préfèrera toujours la babine retroussée, l’attitude improbable ou le regard interloqué... même si elle laisse toujours le choix aux propriétaires qui font appel à elle pour tirer le portrait de leur compagnon.
Et c’est là que les leçons apprises des oiseaux font sens car plus que les animaux dont elle devine très vite ce qu’elle pourra en faire - avec accessoires sur mesure, décors et quelques friandises - ce sont bien les humains qu’il convient de lire en quelques minutes pour pouvoir faire une séance de pose réussie.
Justine travaille sur réservations lors de séances dans des lieux spécifiques, ou sur rendez-vous particuliers au domicile des chiens, chats, geckos ou autres dont les propriétaires souhaitent avoir la photographie. Et surtout, elle n’arrête pas de sourire, ce qui prouve que les changements de vie sont parfois ce qui arrivent de mieux...