Dans les années 1990, l’Auxerroise faisait un rêve : construire un château fort au milieu de la Puisaye. Près de trente ans plus tard, Guédelon est devenu un projet économique, culturel, social et touristique unique au monde qui force l’admiration. À 63 ans, Maryline Martin croit, plus que quiconque, en la force des rêves et en la volonté de les accomplir. Il faut dire que dans la famille Martin, on est bâtisseur de père en fille.
« Mon père Émile Martin était avec Guy Roux, Jean-Pierre Soisson et Jean-Claude Hamel ceux qui ont construit ce grand club qu’est l’AJ Auxerre. J’ai grandi avec cette idée que tout était possible quand on rêvait ensemble », précise l’Auxerroise. Après une scolarité au collège Denfert-Rochereau et au lycée Jacques-Amyot « aux grandes heures de l’école laïque où les élèves suivaient les cours de professeurs exceptionnels », elle étudie les langues orientales et l’histoire de l’art à Paris, avant d’intégrer le groupe Pier Import.
« J’ai eu la chance d’avoir un patron fabuleux, François Lemarchand, qui m’a fait confiance à seulement 21 ans » et qui reste, aujourd’hui encore, l’un de ses mentors. Elle restera 12 ans dans la grande distribution. « J’étais une des rares femmes et on me confiait souvent les dossiers les plus épineux mais j’adorais déjà relever les défis. »
« Les pieds sur terre, la tête dans les étoiles. Je ne pourrais pas me définir comme une intellectuelle alors que j’ai une collection innombrable de bottes pour marcher dans la boue. »
De retour dans l’Yonne, elle croise Jean-Pierre Soisson alors ministre du Travail qui l’oriente vers l’insertion sociale et la protection de l’environnement. Elle crée alors l’association Émeraude qui propose des chantiers de nettoyage des rivières dans la Puisaye, l’Auxerrois et le Tonnerrois à destination des bénéficiaires des minima sociaux. « J’ai énormément appris au contact de ces gars de la campagne, parfois en difficulté, qui me révèlent de façon spontanée leur bon sens paysan et font de l’écologie avant l’heure. »
C’est encore à l’ancien homme fort d’Auxerre devenu président du conseil régional de Bourgogne, que « la femme de gauche » fait part de son projet « un peu fou » d’implanter un chantier médiéval dans la forêt poyaudine sur lequel « on prendrait le temps de refaire les gestes d’autrefois ». « C’était, à l’époque une sorte de provocation », sourit cette bosseuse qui avoue volontiers avoir l’esprit clanique. « J’ai la même équipe depuis 27 ans. » Une provocation, certes, transformée depuis en véritable consécration. Encensé tant par le monde universitaire que politique, Guédelon emploie aujourd’hui 110 collaborateurs et accueille 300.000 visiteurs par an, dont près de 70.000 enfants. « Nous avons encore du travail pour les prochaines décennies. »