

Ils ont en commun la passion des voyages, de la gastronomie, des bons vins et de leurs racines. Et tant de choses encore… Depuis que Julien Troch a rejoint Matthieu Chapuis sur le site historique de Festins à Chemilly-sur-Yonne, les cousins germains ont reformé leur duo inséparable à bien des égards, lorsqu’ils étaient plus jeunes. « Nous avons la chance d’appartenir à une grande famille, très soudée. Nous passions nos vacances et nos week-ends chez nos grand-parents, en Puisaye, à construire des cabanes dans les bois, à aller à la pêche et à jouer avec les copains », expliquent-ils dans un sourire radieux. L’adolescence n’a pas dérogé à la règle. Si le plus jeune faisait montre d’une aisance relationnelle certaine et un « goût du show », son aîné n’était pas, non plus, en reste pour faire les 400 coups. « Julien avait les moto-cross et les scooters les plus trafiqués du village… ». Ces deux-là s’entendaient ainsi comme larrons en foire, même si les études les ont éloignés quelque peu un temps. « Par la suite, tout au long de nos différentes expériences professionnelles à l’étranger, nous nous sommes toujours rendu visite. » Et c’est au cours de l’une d’entre elles, en mai 2023, à Singapour où Julien est chargé de développer des boulangeries pour la Maison Kayzer, que le numéro de duettiste va amorcer sa reformation. « J’étais venu passer des vacances chez lui et le dernier soir, autour d’une bonne bouteille de vin néo-zélandais, je lui ai proposé de venir me rejoindre chez Festins. Nous en avons discuté jusqu’à trois heures du matin… » se souvient Matthieu. « Nous l’avions évoqué à de nombreuses reprises sans vraiment y penser, mais pour moi, les planètes étaient alignées, c’était le bon moment… », explique Julien.
Huit ans auparavant, le groupe culinaire avait connu un premier tournant dans son existence. Et déjà, l’histoire s’était écrite en Asie du Sud-Est, loin de ses bases bourguignonnes. Les fondateurs - Didier et Évelyne Chapuis - passaient alors quelques jours auprès de leur fils aux Philippines, à Manille, où Matthieu occupe pour le compte du groupe Accor le poste de directeur adjoint des cuisines du plus grand Sofitel au Monde, doté de 609 chambres et d’une capacité de 2.000 couverts par jour. « Après toutes ces années, ils réfléchissaient à leur succession à la direction de l’entreprise et m’ont clairement demandé comment je me positionnais. » Titulaire d’un bac ES et d’un CAP effectué dans les cuisines familiales, enrichis d’un apprentissage au Georges V et de quatre années à l’École hôtelière de Lausanne, le jeune homme possède une solide expérience de la gestion et du management dans la restauration haut de gamme. Néanmoins, le challenge présenté est tout autre. « Reprendre Festins derrière Didier et Évelyne Chapuis, c’est comme reprendre l’AJ Auxerre derrière Guy Roux », souffle-t-il. Et pour cause. En à peine plus de 30 ans, Festins

s’est imposé comme l’une des références des traiteurs en Bourgogne et ailleurs, avec ses 350 collaborateurs répartis sur ses trois sites, de Chemilly-sur-Yonne, d’Appoigny et de la Motte-Beuvron (Maine-et-Loire), et ses trois boutiques dont l’une à Paris-Daumesnil dans le 12e arrondissement de Paris. Après quelques semaines de réflexion, il accepte la proposition et fait son retour sur ses terres de prédilection.
Commence alors un véritable parcours initiatique qui doit le mener, dans quelques années, à se saisir des rênes de l’entreprise familiale. Successivement responsable, puis directeur commercial, directeur grands comptes et enfin directeur d’exploitation du site d’Appoigny, il occupe désormais la direction générale déléguée du groupe auprès de son père. « Je connaissais très bien Festins mais en revenant dans le groupe, j’ai redécouvert l’entreprise et toutes ses imbrications », avoue-t-il.
Le Duo Se Reforme
D’autant qu’avec ses six divisions, dont l’une consacrée au catering ferroviaire, l’entreprise dépasse allègrement la sphère traditionnelle de l’activité de traiteurs. « J’avais une vision orientée vers l’événementiel et les boutiques. Jusqu’en 2015, je n’avais pas de recul sur la partie grands comptes », poursuit-il. Nous avons néanmoins la chance d’avoir su cultiver le côté local qui fait de nous des commerçants à part entière, soucieux de la qualité de nos produits, plutôt que des fabricants de plats cuisinés et de desserts. » Une vision partagée par Julien qui a, lui aussi, traîné ses guêtres une partie de sa jeunesse sur le site historique de Chemilly-sur-Yonne. La mayonnaise ne pouvait que prendre.
« Tout se fait naturellement. Nous regardons dans la même direction car nous avons les mêmes envies et les mêmes préoccupations. »
Depuis un an et demi, les deux cousins, chacun dans leur domaine respectif de compétences, travaillent de concert, sous le regard, « certes exigeant mais toujours bienveillant » de Didier et Évelyne Chapuis qui ont enclenché le processus de transmission de leur outil de travail. « Tout se fait naturellement. Nous regardons dans la même direction, car nous avons les mêmes envies et les mêmes préoccupations. » Parmi celles-ci, développer le réseau de boutiques « si l’opportunité se présente », soutenir la progression de la division foodtech « qui représente le premier segment aujourd’hui » et poursuivre les efforts engagés dans le développement durable. « Nous travaillons actuellement à l’optimisation de la gestion des déchets et projetons d’installer des panneaux photovoltaïques. Mais 75 % de notre impact carbone proviennent de nos approvisionnements, c’est pourquoi notre défi principal est de toujours mieux acheter. » Des défis que les deux compères, à la tête bien faite, entendent naturellement relever ensemble. « Au-delà de notre lien familial, nous avons tissé une relation d’amitié tout au long de ces années et nous avons aujourd’hui plaisir à travailler ensemble. » Évelyne et Didier Chapuis peuvent lever le pied en toute quiétude, Festins semble entre de bonnes mains.