Dans l’univers de l’évènementiel, impossible de la rater : la panthère bondissante aux ailes d’éphémère, emblème d’EMA Events est unique en son genre, une chimère inventée en 2001 par Sylvain Camos lorsqu’il (re)créé sa société. Ce qui mérite un flash-back...
Photographe, assistant de la prestigieuse Bettina Rheims, le jeune Sylvain Camos rêve de « faire prendre vie » à ses images de mode, de fête, de mariage et de joie qu’il fait depuis l’âge de 16 ans - car fâché, de son propre aveu, avec l’école. Le premier nid d’EMA (pour Évènement, Marketing, Action) sera place François-Rude, au-dessus du Comptoir des Colonies, parce que ce Dijonnais « aime foncièrement » sa ville.
Premier contrat pour la société d’évènementiel, un concept encore balbutiant à l’époque en France : Coca-Cola, et la mise en place des décors de la marque dans les CHR - Café, hôtel, restaurants. Suivront la Banque Populaire BFC qui lui confie la mise en place d’un stand, puis les centres commerciaux, « un marché de niche dans lequel je m’étais engouffré. Animations et créations de trafics par le biais d’évènements. Je voulais en faire ma spécialité, ce que j’ai fait jusqu’en 2001 ».
2001, Odyssée judiciaire
Les attentats qui frappent le World Trade Center s’accompagnent d’une sécurisation drastique des centres commerciaux : le début de « l’enfer » pour EMA qui perd son principal segment de clientèle et se voit placée en redressement judiciaire. « Ce qui signifie que vous êtes au tribunal de commerce tous les mardis matin, on vous met un mandataire judiciaire sur le dos qui gère avec vous votre boîte, vous n’êtes pas payé pendant des mois, vous n’avez plus le droit au découvert, plus le droit aux prêts... et que vous devez payer vos dettes. »
Sylvain Camos a pourtant une chance dans cette épreuve : « une mandataire judiciaire au top, Véronique Thiébaut, qui a cherché à me mettre la tête hors de l’eau et qui m’a accompagné pour sortir EMA de l’ornière ». Biens personnels saisis, 500.000 euros de dettes et un choix : « soit je recommence, soit je me mets une balle dans la tête. » C’est un ami - le désormais avocat Jérôme Deliry - qui va avoir « les mots justes, qui m’accompagnent encore. Il m’a dit : est-ce que c’est de ta faute ? - Non. Même les plus grands sportifs perdent des matches. Tu as perdu un combat, pas la bataille. Par contre, si tu t’arrêtes, tu as tout perdu. »
De cet épisode traumatique, Sylvain Camos tire une leçon de vie en citant Nelson Mandela : « Il n’y a pas d’échec. Soit j’aprends, soit je gagne. Et là, j’ai appris. Qu’il ne fallait pas mettre tous ses œufs dans le même panier, être mono-activité. » Il apprend aussi la relativité : au regard « d’un fils, d’une bonne santé, de parents... » une entreprise n’est qu’un moyen de s’exprimer. Et un entrepreneur a le droit de perdre...
« Le regard sur les chefs d’entreprise, c’est un peu ce que je regrette dans l’inconscient français. Quand vous réussissez on vous pointe du doigt. Quand vous perdez, aussi. Il faut apprendre aux jeunes que l’on peut perdre... mais qu’on a le droit de gagner. »
Sans les aides, les facilités et les droits à l’erreur administratifs actuels, avec une poignée de collaborateurs qui acceptent de raboter leurs salaires, Sylvain Camos réinvente EMA. « Je n’ai pas changé de nom, mais j’ai changé le logo. La panthère est arrivée, le format d’EMA a changé, on a cherché des clients ailleurs, diversifié notre offre... et on ne s’est jamais arrêté. »
Évènement haute couture
Aujourd’hui fort de 21 collaborateurs et d’une myriade de prestataires extérieurs (techniciens, intermittents du spectacle, intérimaires, auto-entrepreneurs, EMA propose plusieurs formules : organisation et même co-production d’évènements par la maison-mère EMA Events ; création et accompagnement d’évènements privés (EMA Private) et une filiale, Loc’Ambiance, qui propose à prix ultra-compétitifs la location de mobilier, objets de décoration, luminaires... à destination de professionnels comme de particuliers.
Mais ce qui fait la force de la panthère ailée, outre son équipe qui compte designers, graphiste, chefs de projets... ultra pointus, ce sont des techniciens qui savent tout faire ou presque et un atelier où sont fabriqués sur place des éléments sur-mesure - une scène en forme de nuage le jour de notre visite - et des dizaines de mètres carrés d’entrepôts où sont stockés avec une redoutable efficacité de quoi créer au choix des villages de Noël, des décors d’Halloween, des ambiances du bout du monde... de la haute-couture au service de l’éphèmère, immédiatement disponible et correspondant exactement aux désirs des clients et de l’expertise des équipes d’EMA, assortie de solutions énergétiques écologiques, du réemploi et du recyclage des matériaux.
Le résultat de ce nouveau positionnement est qu’en 2022, la société de Sylvain Camos affiche « son plus beau résultat », soit cinq millions d’euros de chiffre d’affaires. Le dirigeant a su s’entourer avec un trio d’associés (Anis Belgacem, Cindy Fabre, Adeline Schaller).
Et si Dijon représente encore 20% de ses activités, EMA Events rayonne bien au-delà de la capitale des Ducs et dans des secteurs aussi divers que les conventions d’entreprises, les congrès professionnels, les salons, le luxe, la fête et les évènements nationaux comme Miss France 2024, co-produit avec Dijon. Sylvain Camos lui, continuera à vendre du rêve, des souvenirs, mais aussi et surtout « de la confiance, du savoir-faire sur lequel la partie technique est aussi importante que la partie créative ».
Et après ? Celui que les Dijonnais croient connaître « le mec qui fait de l’évènementiel, le mec dans les soirées » aimerait bien qu’on voit aussi les coulisses du bosseur acharné, du type « qui aime les choses simples, même si dans mon métier c’est tout l’inverse ». Il se voit bien dans quelques années, tout arrêter et transmettre, à ses associés qui sait ? « Je ne me suis pas battu comme je me suis battu afin que cette panthère vive en liberté pour la voir disparaître. »