Humeur

Dans « conscience », il y a... science

Décidément, la première semaine de mars devient celle de tous les combats contre les obscurantismes.

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Emmanuelle de Jesus.

Décidément, la première semaine de mars devient celle de tous les combats contre les obscurantismes. La veille du 8 mars, Journée internationale des droits des femmes, avait lieu en France le mouvement « Stand Up for science France », initié par Olivier Berné (astrophysicien), Patrick Lemaire (biologiste) et Emmanuelle Perez-Tisserant (historienne), en écho à la journée Stand-up for science initiée aux États-Unis pour dénoncer les attaques inouïes que porte l’administration Trump depuis le 20 janvier à l’encontre du monde scientifique.
Le monde selon Trump relègue la vérité scientifique au rang de simple opinion : la terre peut y être sphérique ou plate, il n’y a plus que deux genres, le réchauffement climatique n’existe pas, n’importe quel hurluberlu peut raconter absolument n’importe quoi au mépris de tout fait scientifiquement démontré, mais quand le curseur de la vérité est à ce point explosé, toutes les paroles se valent.

Plus grave encore, le monde selon Trump supprime des pans entiers de connaissance - merci les bases de données que l’on envoie dans les ténèbres en contrôlant les data centers -, sabre les effectifs des plus hautes administrations du pays telles la Food and Drugs Administration et censure à tour de bras. Les droits des minorités (y compris les femmes, soit, excusez du peu, 50% de l’humanité), le climat, mais aussi l’agronomie, la santé... : autant de pans entiers de la recherche soit privés de financements ou d’autorisations, soit dirigés en fonction d’une science autorisée, une science « américaine » qui reflète en réalité les croyances du président. « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme », écrivait Rabelais dans son ouvrage Gargantua, ce qui, à la lumière de ce que ces mots désignaient à l’époque, signifie que l’accumulation de savoirs sans la capacité de les comprendre et de les intégrer au service d’une morale (une sagesse individuelle ou, aujourd’hui, celle d’une vérité partagée par la communauté scientifique) n’est que chaos. Ajoutons que Rabelais, scientifique car médecin, mais aussi moine défroqué, s’opposait violemment dans ses ouvrages à la doxa de la Sorbonne, alors école de théologie, où l’enseignement était dispensé sous la férule des Écritures... une science « autorisée », déjà. Moi qui ne possède ni le savoir, ni la faconde du truculent Tourangeau, je me contenterais de conclure que, si l’on ôte « science » à « conscience », ce qui reste ne pèse pas lourd en neurones...