Humeur

Mort aux vaches !

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Emmanuelle de Jesus.

Dans un rapport publié le 22 mai, la Cour des comptes a tranché : pour réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES), il faut tailler dans le vif et réduire drastiquement le cheptel bovin français. Aujourd’hui fort de 17 millions de têtes, ce vaste troupeau était responsable en 2018 de l’émission de 52,5 millions de tonnes de GES, soit 11, 8 % des émissions du pays.

En cause, la digestion des veaux, vaches et autres bovidés à l’estomac multipoches dont les pets et les rots autant que leur fumier produit du méthane, un gaz qui troue littéralement l’atmosphère.

Pour le fumier, on a un début de solution : cette matière peut servir à alimenter les méthaniseurs et fournir une source d’énergie, ironie du sort et de la réglementation, désormais « verte ».

En revanche, à moins d’équiper les orifices de Marguerite de tuyaux, on voit mal comment récupérer le méthane produit par les flatulences et autres rejets de la rumination. La solution est donc trouvée : « définir et rendre publique une stratégie de réduction ». En langage moins technocratique, cela signifie envoyer les vaches à l’abattoir, faire moins de vêlages et amoindrir un secteur agricole fortement impacté qui a déjà montré des signes de bonne volonté en réduisant le cheptel (- 10 % en six ans).

Mais, et c’est là que le sujet devient saignant et le rapport accablant pour les politiques publiques, « cette diminution reste subie et ne fait pas l’objet d’un véritable pilotage par l’État, au détriment des exploitants », relève la Cour des comptes, qui pointe aussi des aides distribuées en dépit du bon sens à un secteur notoirement émetteur de GES alors même que la France s’engageait dans le même temps à réduire ses émissions…

Réduire la production de viande pose un certain nombre de problématiques : comment satisfaire les amateurs de steaks sans transformer la viande locale en denrée de luxe et ouvrir grand les portes à des importations de viande produite dans des conditions loin d’être aussi nettes qu’en France, une viande low-cost pour les plus modestes (et la restauration collective) ? Le régime vegan est-il la solution lorsqu’on sait qu’à l’autre bout du monde, pour satisfaire des envies de barbecue végétal et d’avocado toasts, on déforeste des hectares entiers ?

La FNSEA, principal syndicat agricole, remontée comme un coucou, a dénoncé un énième agribashing, et rappelé que les agriculteurs ont proposé des solutions : changer la nourriture, accompagner les exploitants dans la diversification de leur activité… Enfin que vont devenir les prés, sans leurs troupeaux ? Des supports pour panneaux photovoltaïques ? Vous me direz, l’électricité c’est bien, ça fait marcher les barbecue décarbonés. Restera juste à trouver quelque chose à cuire dessus…