« C’est un grand voyageur, un simple citoyen du monde, qui souhaite le parcourir pour mieux le connaître et le comprendre ». Ainsi s’expriment Jean-Michel et Sylvie Arnaud, les parents de Louis Arnaud. Originaire de Saône-et-Loire, âge de 35 ans, Louis Arnaud a fait des études de sciences économiques à l’université de Bourgogne entre 2005 et 2008. Fin 2022, il décide de partir de Paris où il réside pour voyager.
Il traverse l’Italie, la Grèce, la Turquie, la Géorgie et l’Arménie pour arriver en Iran le 2 septembre 2022. C’est là qu’il sera arrêté le 28 de ce même mois et détenu à la sinistre prison d’Evin, à Téhéran. Quatre mois plus tard, avec l’accord du Quai D’Orsay, ses parents brisent le silence sur ce qui est arrivé à leur fils afin d’alerter sur le sort de Louis Arnaud et des autres détenus français en Iran.
Et le 8 novembre, c’est par eux que les médias ont appris que Louis Arnaud a été condamné à cinq ans de prison, pour « propagande et atteinte à la sécurité de l’État ». « Cette condamnation, que rien ne permet d’étayer, et l’absence de tout accès à un avocat, est inacceptable », a réagi la porte-parole du ministère français des affaires étrangères, Anne-Claire Legendre, lors d’un point presse, avant d’appeler à « sa libération immédiate, ainsi qu’à celle de la totalité des Français arbitrairement détenus en Iran ».
L’Iran est ce pays où une jeune femme, Mahsa Amini, est décédée trois jours après avoir été arrêtée par la police des moeurs pour un port du voile jugé impropre. Selon des témoins, elle aurait été battue à mort. Son décès a entraîné une vague de protestation dans le pays, réprimée dans le sang : plus de 500 morts, au moins 20.000 arrestations et de multiples exécutions…
L’Iran est ce pays où plusieurs ressortissants français sont détenus dans des conditions épouvantables et condamnés toujours pour les mêmes motifs invérifiables d’« atteinte à la sécurité nationale » et « propagande contre le système » politique de la République islamique : Benjamin Brière arrêté en mai 2020 et condamné à huit ans et huit mois d’emprisonnement pour espionnage ; Cécile Kohler et son compagnon Jacques Paris arrêtés en mai alors qu’ils faisaient du tourisme en Iran ; le franco-irlandais Bernard Phelan et deux autres Français dont l’identité n’a pas été dévoilée.
L’Iran est ce pays qui a emprisonné pendant plusieurs année une chercheuse de Sciences-Po, Fariba Adelkhah, condamnée en mai 2020 à une peine de prison de cinq ans. L’Iran est ce pays qui est probablement derrière l’armement et la logistique du Hamas, responsable des massacres de Juifs israéliens le 7 octobre dernier et qui profite de la poudrière pour asseoir son influence au Moyen-Orient.
L’Iran est ce pays qui, à défaut d’être libre, a offert cette année un Prix Nobel de la Paix au monde en la personne de Narges Mohammadi, militante pour le droit des femmes et… détenue à Evin. Vingt ans avant c’était une autre Iranienne, l’avocate Shirin Ebadi, qui recevait elle aussi ce prix. Depuis 2013, elle alertait sans relâche sur le délitement des libertés en Iran.
L’Iran est ce pays, autrefois phare intellectuel de la Perse, dont aujourd’hui les Gardiens de la révolution islamique ont fait un tombeau des libertés collectives et individuelles, un puits de désespoir sans fond pour les prisonniers étrangers devenus des otages que l’on négociera.
N’oublions pas Louis Arnaud, Cécile Kohler, Benjamin Brière, Jacques Paris, Bernard Phelan et tous les autres. Et relisons les Lettres Persanes de Montesquieu, qui se servit de la correspondance imaginaire entre deux seigneurs persans, Usbek et Rica, pour écrire cet ouvrage qui fut le précurseur du phare des Lumières contre l’obscurantisme.