Humeur

Un bain et des Jeux

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Emmanuelle de Jesus.

La tentation est grande en ce moment de pratiquer la politique de l’autruche et de se fourrer la tête dans un trou pour attendre des jours meilleurs. Le hic est que le fond du trou, c’est justement là que l’on retrouve tous les ingrédients qui font le maëlstrom politico-émotionnel qui, de Butler (Pennsylvanie) au perchoir du Palais Bourbon en passant par les quais de Seine, me donne tous les matins l’impression de ne pas réussir à sortir d’un très long cauchemar grotesque...

Et on commence samedi dernier. Alors que Joe Biden prouve à chaque prise de parole publique qu’il sucre de plus en plus les fraises, Donald Trump s’assure l’élection avec quatre mois d’avance. Il aura suffi pour cela d’un tireur de 20 ans pas très doué, d’un bout d’oreille et d’une photo déjà mythique, celle que le photojournaliste Evan Vucci (Associated press) a prise du candidat républicain, le visage ensanglanté et le poing levé. À noter qu’un T-Shirt (35 $) est en vente sur un site américain, ainsi que des versions cheap chinoises, sorties trois heures à peine après la tentative d’attentat... Politique spectacle : 1 - Dignité : 0.

Le malaise s’est poursuivi mercredi 17 juillet : entourée d’une meute de journalistes et de curieux, Anne Hidalgo, maire de Paris, tient parole et nous gratifie de quelques mètres de crawl dans la Seine. Coût de dépollution pour rendre le fleuve baignable et pouvoir y organiser deux épreuves des JO : 1,4 Md€. À noter que le street artist James Colomina a tenté de vendre des bouteilles d’ « Eau de Seine finement polluée » pour dénoncer ce montant exorbitant avant d’être prié par les forces de l’ordre d’aller faire de l’agit-prop ailleurs. Politique spectacle : 2 - Dignité : dans les cordes.... À noter aussi qu’en plus de Tony Estanguet qui, en tant que président du comité d’organisation des JO, l’avait bien cherché, Anne Hidalgo était accompagnée pour faire plouf de Marc Guillaume, préfet d’Île-de-France. Et là, je dis, c’est trop bête : à même pas 60 ans, ce haut fonctionnaire avait le CV parfait. Naissance à Neuilly-sur-Seine (déjà), Science-Po Paris, ENA, Conseil d’État, Conseil constitutionnel, secrétaire général du gouvernement, Officier de l’Ordre national du mérite, Commandeur de la Légion d’honneur. Et tout ça pour quoi ? Pour qu’on se souvienne de lui comme du « type qui s’est baigné dans la Seine avec Hidalgo », c’est dur.

Enfin, à peine avais-je repris haleine, que les députés nous offraient jeudi 18 juillet le spectacle de la réélection de Yaël Braun-Pivet au terme d’une séance émaillée de chifoumi, de coups de gueule, de tractations. Yaël Braun-Pivet, oui. L’ancienne présidente de l’Assemblée nationale, celle-là même que le Président Macron avait dissoute le 9 juin dernier afin de « clarifier la situation politique du pays ». Yaël Braun-Pivet, élue avec 13 voix d’avance contre le candidat du Nouveau front populaire, pourtant arrivé en tête des législatives au terme de désistements opportuns.

Il y en a un qui doit bien rigoler à l’Élysée. Et se dire depuis son Olympe, que les JO vont venir ambiancer tout ça. « Panem et circenses » (du pain et des jeux), c’est une vieille recette qui nous vient des César, ces représentants de Jupiter sur terre. Au fait : pour ceux qui n’écoutaient pas en mathématiques et rêvent de tout casser, une « révolution », c’est la définition même d’un mouvement qui remet tout à sa place originelle. Voilà qui ne va pas nous sortir le cul des ronces. Sur ce, je vous laisse : je vais essayer de dégoter un trou plus rigolo pour me cacher jusqu’à la semaine prochaine...