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Gens du voyage : Guillaume Ruet écrit à Bruno Retailleau

Je vous écris pour vous parler de ce qui angoisse et épuise de nombreux maires à l’approche de l’été : le retour des occupations illégales de notre domaine public par des groupes de gens du voyage.

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(Crédits : Freepik)

Monsieur le ministre d’État,

Je vous écris pour vous parler de ce qui angoisse et épuise de nombreux maires à l’approche de l’été : le retour des occupations illégales de notre domaine public par des groupes de gens du voyage. C’est une réalité qui se répète chaque année avec une cruelle constance et qui exaspère la population au plus haut point.

Cette année, je suis déjà le témoin impuissant de ma troisième intrusion forcée et illégale. Lors de la dernière, mi-juillet, 150 caravanes ont occupé le terrain de football municipal pendant 10 jours. Et depuis leur départ, je vis avec la hantise de nouvelles intrusions illégales et forcées.

Chaque installation laisse derrière elle son lot de dégradations, de déchets abandonnés (nos espaces verts sont souillés par leurs déjections !), de nuisances sonores, de délits routiers et, osons le dire, d’un sentiment d’insécurité au sein de ma commune.

Pour vous dire ce que j’ai sur le coeur, j’en ai ras-le-bol, d’autant plus que le maire est le réceptacle de la colère légitime et de l’exaspération, parfois virulente, de la population.

Nos services sont à bout de souffle. Nos policiers municipaux, nos équipes techniques et même nos élus consacrent une énergie folle à gérer ces situations, au détriment de leurs missions essentielles au service de la population.

Les procédures actuelles sont un véritable chemin de croix : longues, complexes et souvent inefficaces, elles offrent une latitude inacceptable aux contrevenants et laissent nos administrés dans un sentiment d’abandon et d’injustice.

Où est l’État de droit quand des territoires entiers sont bafoués de la sorte ? Où est l’égalité devant la loi lorsque certains peuvent s’affranchir impunément des règles qui s’appliquent à tous les autres citoyens ? L’attente de nos concitoyens n’est plus une simple requête, c’est un cri d’alarme. Ils nous demandent, à juste titre, de mettre fin à cette immunité qui mine la confiance envers nos institutions.

Malgré les efforts déployés par les services municipaux et les forces de l’ordre, les dispositifs législatifs actuels sont insuffisants pour endiguer efficacement ces pratiques. Les procédures d’expulsion sont souvent longues et complexes, permettant aux occupants de rester sur place pendant des périodes prolongées, au détriment de l’intérêt général et du respect du droit.

Je sais, monsieur le Ministre, que vous connaissez la pleine mesure de cette situation. Vous savez qu’il n’est pas attendu de simples ajustements ; il est impératif de procéder à une réforme législative audacieuse et rapide. donnez-nous, maires de France, ainsi qu’aux préfets, les outils juridiques efficaces pour :
-  raccourcir drastiquement les délais des procédures d’expulsion, pour que la justice soit rapide et dissuasive. Il faut rendre notamment plus accessible la demande de mise en demeure de quitter les lieux auprès du préfet en supprimant les conditions d’atteintes à la salubrité, la sécurité et la tranquillité publique, l’installation illégale étant une condition en soit suffisante et légitime pour faire ladite demande d’expulsion ;
-  renforcer significativement les sanctions pénales pour les occupations illégales et les dégradations associées, afin de rétablir un véritable principe de responsabilité ;
-  mettre en place des mécanismes de coercition plus forts et immédiats pour éviter les récidives.

L’inaction ou la timidité législative ne sont plus des options. L’État doit se montrer ferme et protecteur envers ses communes. L’avenir de nos territoires, la confiance de nos concitoyens dans l’autorité publique et la quiétude des populations en dépendent.

Je suis convaincu qu’un signal fort envoyé par le Gouvernement, à travers une modification de la loi, permettrait de restaurer l’autorité de l’État et de garantir le respect du droit sur l’ensemble du territoire. Les lois de la République doivent être respectées par tous, sans exception...

Je me tiens à votre entière disposition, prêt à vous exposer plus en détail les colères et les dysfonctionnements que ces situations engendrent sur le terrain. »