
Dans sa conférence de presse de rentrée, la rectrice de l’académie de Dijon a mis ses pas dans ceux de la ministre Borne (à présent ministre démissionnaire), qui avait sorti de son chapeau la carte magique « Intelligence Artificielle » censée répondre à tous les problèmes et surtout détourner les regards des vrais enjeux de l’école publique : lutte contre les inégalités, revalorisation salariale, conditions de travail et d’apprentissage dégradées, difficultés à recruter des personnels... La rectrice annonce vouloir généraliser une expérimentation d’enseignement à l’IA menée dans un lycée dijonnais en 2024-2025, en disant s’appuyer sur des premiers retours très positifs.
Le SNES-FSU de l’académie de Dijon n’a pas les mêmes informations que la rectrice et reste très dubitatif :
- il n’a pas été présenté de bilan complet à l’équipe éducative de l’établissement concerné, et encore moins aux représentants syndicaux dans les instances académiques ;
- l’expérimentation a été coûteuse en moyens horaires, débloqués à titre exceptionnel et en nombre insuffisants pour permettre la rémunération complète du travail fourni,
- les enseignant·es n’ont pas donné de suite favorable à la demande qui leur a été faite de rédiger une plaquette de bilan de l’expérimentation en cédant leurs droits de propriété intellectuelle à l’Éducation nationale.
Dans un contexte où les enseignements obligatoires du second degré ne sont pas assurés partout parce qu’il n’y a pas de professeur·e nommé·e devant chaque classe, dans un contexte où les enseignements obligatoires sont assurés dans des conditions difficiles (effectifs très chargés dans les classes), dans un contexte enfin où des missions obligatoires inscrites au Code de l’éducation telles que l’Evars (éducation à la vie affective, relationnelle et à la sexualité) ne sont pas assurées faute de moyens, le SNES-FSU s’interroge sur les priorités du Rectorat et du Ministère.
Par ailleurs, le SNES-FSU recommande la prudence et un véritable recul critique sur les conséquences du recours aux intelligences artificielles génératives. Celles que le grand public est amené à utiliser sont détenues par de puissants groupes animés par des ambitions hégémoniques à l’opposé des valeurs du service public, qui vise à construire le bien commun et à émanciper des jeunes en construction. Elles ne répondent pas aux réglementations (dont le RGPD) auxquelles l’Éducation nationale doit se plier pour protéger les élèves, les familles et les personnels. Elles ont un impact environnemental documenté, ce qui entre en contradiction avec les objectifs de l’école dans la prise en compte des enjeux écologiques.
Les déclarations de la ministre quelques jours seulement avant la rentrée puis de la rectrice ressemblent bien à une fuite en avant alors que nous n’avons pas encore le recul nécessaire notamment au travers d’études solides, pour connaître les conséquences de ce phénomène nouveau. Pour le SNES-FSU, un principe de précaution doit prévaloir. Mais les entreprises de la EdTech, qui ont depuis longtemps leurs entrées au ministère, n’en ont cure.
Le SNES-FSU Dijon appelle les acteurs et actrices politiques à la responsabilité au sujet de l’IA, particulièrement dans le système éducatif, et continuera d’être aux côtés des collègues et de la défense de leurs métiers en organisant des stages de formation syndicale sur ce sujet. Le prochain aura lieu à Dijon en décembre prochain et nous y inviterons la profession.