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Synsys, une première mondiale pour Proteor

Santé. Leader des appareillages orthopédiques, la société dijonnaise Proteor a mis au point la première prothèse bionique au monde qui reconstitue la marche humaine.

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Un exemple des prothèses Proteor
(Crédit : Proteor / Jonas Jacquel)

Dix degrés qui ont changé la vie. Il ne s’agit pas ici de météo mais de fléchissement de cheville de la première prothèse bionique qui recrée la marche humaine — Synsys — développée par l’entreprise dijonnaise Proteor, spécialisée dans la fabrication d’appareillages pour les personnes amputées depuis 1913 et qui fournit près d’un appareil orthopédique sur cinq en France.

Dix degrés qui ont permis à Ophélie Jonin, orthoprothésiste chez Proteor et amputée de la jambe droite à 17 mois après un accident de tondeuse, de vivre sa « renaissance » : « Synsys, c’est une prothèse mécatronique avec coordination simultanée du mouvement de la cheville et de celui du genou en prolongement de la hanche. Jusqu’alors les chevilles étaient indépendantes. Désormais, c’est un microprocesseur qui permet à un gyroscope et des capteurs de savoir où se trouve la prothèse dans l’espace et d’accompagner le mouvement ».

Mais ce qui change vraiment les choses assure Ophélie, c’est une « articulation de cheville à 42 degrés d’amplitude. C’est unique au monde. ».


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Dix degrés qui permettent de ne plus boiter, de n’être plus limitée dans ses déplacements, de ne plus avoir à « étaler » sa prothèse en voiture, en avion ou dans le train, de soulager la jambe valide, de reprendre le sport — la boxe française tout en trouvant l’équilibre sur sa prothèse, mais aussi d’améliorer son état de santé : « Auparavant, j’allais deux fois par semaine chez le kiné. Je n’y vais plus que par confort ».

Mais bien plus que cela, Ophélie affirme avoir « retrouvé une féminité. En tant qu’amputée, aller acheter une paire de chaussures était un calvaire. Aujourd’hui je peux porter des chaussures à talon et enregistrer dans mon application smartphone dix hauteurs de talon jusqu’à cinq centimètres : je peux marcher pieds nus, en baskets ou escarpins ! J’ai mis des chaussures à talon pour la première fois à 28 ans. Je porte des robes. Et surtout, je ne boîte plus et le regard des autres a changé ».

Dix ans de développement

Cette prothèse unique au monde, il aura fallu plus de dix ans à Proteor pour la développer. Un développement permis grâce au financement de l’armée française et l’usage du meilleur de la technologie électronique et des matériaux.

Composée de fibres de verre et de carbone, la prothèse « ne pèse que » 3,2 kilogrammes mais a obligé à relever de nombreux défis : « Sur des chevilles indépendantes, l’angle est réduit parce que la cheville doit absorber un poids important. En inventant un système hanche-genou-cheville, c’est l’ensemble de l’appareillage qui absorbe le poids et garantie l’équilibre », explique Alexandra Houist, responsable marketing opérationnel chez Proteor.

Une technologie qui a un prix : 86.000 euros entre la prothèse et l’orthopédie — mais qui devrait bénéficier d’une prise en charge par l’Assurance maladie. Grâce à cela, Ophélie Jonin dit se sentir enfin « elle » : « On a tenté des greffes quand j’ai eu mon accident mais heureusement ça n’a pas pris. Je suis fière d’être amputée ! Et de marcher comme je marche. D’être qui je suis. J’ai pu éclore de cette carapace dans laquelle je me renfermais parce qu’on me critiquait sur ma boiterie, sur ma prothèse. Aujourd’hui, je marche normalement et je me suis découverte. À 28 ans, je suis fière d’être amputée ! ».